«Dans 120 ans, il y aura des spectateurs dans les salles»


«Dans 120 ans, il y aura des spectateurs dans les salles»

120 ans Gaumont

Alors que Gaumont, plus ancienne société cinématographique au monde, fête ses 120 ans, son président Nicolas Seydoux, à la tête de l’entreprise depuis 1975, est « absolument convaincu de l’avenir du cinéma » pour les 120 prochaines années.

« Gaumont est née avec le cinéma et a traversé toutes les crises vécues par le cinéma et la France. Cela signifie deux guerres, la décolonisation, et au minimum une crise économique majeure », raconte à l’AFP Nicolas Seydoux, 75 ans, dont l’entreprise fête son anniversaire avec une exposition au Centquatre à Paris et un livre (120 ans de cinéma, Gaumont, La Martinière).

« Cela signifie aussi d’être passé d’un statut très particulier, le monopole de l’image animée, dont bénéficiait le cinéma jusqu’en 1945, à une concurrence d’abord avec le petit écran et ensuite avec la multiplicité des écrans individuels », poursuit cet héritier de la famille d’industriels Schlumberger, dont les deux frères, Jérôme et Michel, sont respectivement président de Pathé et producteur de cinéma. Il est aussi le grand-oncle de l’actrice Léa Seydoux.

Créée par Léon Gaumont en 1895, année de l’invention du cinéma, Gaumont fabrique au départ des appareils de projection et de prises de vues, avant de se diversifier dans la production puis les salles.

Avec 190 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2014, elle est aujourd’hui l’une des principales sociétés françaises de production, distribution et exploitation, dont l’histoire est jalonnée de plus de mille films, avec de nombreuses comédies, de Fantômas de Louis Feuillade à Intouchables en passant par Les Visiteurs et Le Dîner de cons.

Associée avec Pathé pour l’exploitation des salles, Gaumont s’est aussi développée ces dernières années dans la production de séries télé – notamment aux Etats-Unis (Hannibal, Hemlock Grove) –, qui représente aujourd’hui près de la moitié de son chiffre d’affaires.

« Je pense que l’objectif est tout à fait clair. C’est d’être un acteur majeur dans le cinéma en France, et donc en Europe, et un acteur significatif dans la télévision », souligne son président, qui se dit « très satisfait d’avoir fait d’une de ses passions son métier ».

Nicolas Seydoux © AFP MARTIN BUREAU

Pourtant, quand Nicolas Seydoux est arrivé à la tête de Gaumont il y a 40 ans, « les gens ne croyaient pas à l’avenir du cinéma », se souvient celui qui se définit comme « un entrepreneur » mais non « un industriel », car dit-il, « un film, c’est vraiment de l’artisanat ».

En 1975, « Gaumont vivait la télévision comme un ennemi », ajoute l’homme d’affaires, qui a cédé en 2004 la direction opérationnelle de Gaumont à sa fille, Sidonie Dumas, tout en restant président du conseil de surveillance.

« Ce que je constate, c’est que, 40 ans plus tard, il y a plus de spectateurs dans les salles et que le pourcentage des films français vus par les Français est supérieur à ce qu’il était il y a 40 ans », poursuit-il, jugeant que « le cinéma français va bien ».

« J’en veux pour preuve le renouvellement des talents », dit-il. « Si le cinéma n’était fait que par des gens de mon âge, on pourrait être très inquiet. Mais ce n’est pas le cas ».

Nicolas Seydoux se dit par ailleurs « convaincu que l’omniprésence de l’écran individuel renforce aujourd’hui l’envie de se retrouver ensemble » au cinéma.

« Je crois au fait que demain, dans 120 ans, il y aura des spectateurs dans les salles de cinéma », dit cet homme alerte au fin collier de barbe.

« Mais deux conditions doivent être remplies, et d’abord que le téléchargement illicite non seulement arrête de se développer, mais soit sérieusement freiné », estime celui qui préside également depuis 2002 l’Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle (Alpa).

Par ailleurs, « il faut que Bruxelles ne ramène pas le droit d’auteur à une absence de droit des auteurs », met-il en garde, alors que la Commission européenne prépare actuellement des propositions de réforme qui inquiètent les milieux artistiques.

*Photos : © AFP/Archives Jean-Pierre Muller et © AFP Martin Bureau

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