Le réalisateur Yohan Manca était en pleine ascension. Une dispute violente avec sa compagne Judith Chemla a déclenché la terreur MeToo et brisé sa carrière. Depuis, alors qu’il a purgé sa peine, l’actrice multiplie les accusations les plus folles avec la bénédiction des médias. Face à cet acharnement, il sort de son silence.
Au printemps 2021, Yohan Manca est un jeune espoir du cinéma. La presse de gauche se l’arrache. Son premier long-métrage, Mes frères et moi, doit être présenté à Cannes, avec dans le rôle principal la comédienne Judith Chemla qui est aussi sa compagne depuis 2016 et la mère de leur fille, née en mai 2017. Quelques jours avant la projection, Manca apprend qu’elle l’a trompé et, de colère, lui jette son téléphone au visage, la blessant. Le film est présenté au Festival, mais le couple est absent. Chemla porte plainte et le jeune réalisateur se retrouve en garde à vue, puis placé sous contrôle judiciaire avec interdiction d’entrer en contact avec elle. Le 15 novembre, alors que Yohan Manca se présente au domicile de son ex-compagne, elle prévient la police. Ayant rompu son contrôle judiciaire, il est placé en détention durant quinze jours. En janvier 2022, le film sort en salle. En mai, Manca est condamné à huit mois de prison avec sursis. Mais ce n’est pas fini ! En juillet 2022, l’actrice poste sur Instagram les photos de son visage tuméfié (datant de juillet 2021, donc un an plus tôt) suite au jet de téléphone. Aussitôt, elle est invitée par la matinale de France Inter. Deux mois plus tard, devant la brigade des mineurs, elle accuse Yohan Manca d’embrasser leur fille sur la bouche avec la langue. En janvier 2024, elle publie un livre dans lequel elle revient sur les différentes violences qu’elle aurait subies et enchaîne les télévisions et radios, devenant une figure militante majeure du mouvement de « libération de la parole ». Yohan Manca, lui, disparaît des radars. Aujourd’hui, il décide à son tour de sortir du silence et de dire sa vérité.
Causeur. Vous avez été incarcéré pour non-respect de votre contrôle judiciaire. Pourquoi vous être mis dans cette situation, ce qui alimente l’image d’homme violent que l’on vous attribue et que vous contestez ?
Yohan Manca. Je n’avais pas le droit d’entrer en contact avec Judith, ni de me présenter à son domicile (et donc au mien puisqu’on y vivait ensemble), sauf pour ce qui concernait notre fille. Nous avions donc quelques contacts pour la garde alternée de la petite. Et j’ai voulu aller plus loin. Je voulais la reconquérir, sauver notre famille. J’ai été trop insistant, comme un con, je m’y suis mal pris. Mais avec Judith, nous en discutions, elle n’était pas fermée au dialogue, au contraire. On dînait même ensemble parfois. On riait de nouveau, on pleurait. Sauf qu’un jour, je me présente au domicile alors que je n’y étais pas invité. Là, on s’engueule et elle décide donc de signaler ma présence à la police. Je n’aurais jamais imaginé que cela m’emmène aussi loin dans l’enfer. Parce que je tiens à rappeler qu’en dehors de ce jet de téléphone – dont j’ai honte ! –, il n’y a jamais eu aucune autre violence, ni aucune menace. Jamais. C’est un point très important.
Lorsqu’en juillet 2022, elle poste sur Instagram les photos de son visage tuméfié, que pensez-vous ?
Je comprends que j’entre dans un engrenage terrible. Judith publie ces photos deux mois après ma condamnation et plus d’un an après les faits. J’avais donc déjà payé ma dette. Quarante-huit heures de garde à vue, huit mois de prison avec sursis et deux ans de mise à l’épreuve. Sans compter les deux semaines à la Santé. Ce n’est pas rien ! Je ne minimise pas la gravité de mon geste et je n’ai d’ailleurs pas fait appel de la décision. Mais pour Judith, ce n’est pas assez. Donc, après que la justice est passée – et alors qu’elle non plus n’a pas fait appel de la décision –, elle m’inflige le tribunal médiatique, elle me livre en pâture à la meute. Je tiens à préciser qu’elle le fait au moment où l’on n’arrivait pas à s’entendre sur les dates de garde de notre fille pour les vacances. Elle m’en voulait. Avec la médiatisation, elle avait une puissance de feu énorme, un quasi-pouvoir de vie et de mort sur ma vie professionnelle et sociale. Elle savait qu’elle anéantirait ma vie, ma carrière qui commençait.
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Et cela n’a pas manqué…
Le lendemain de la publication de cette photo, elle était invitée par Léa Salamé sur France Inter. Et là, toute la machine médiatique s’est emballée. J’étais devenu un monstre, un pervers narcissique, un homme violent. Alors que je le répète, en dehors de ce jet de téléphone sur le coup de la colère, que je regrette et que j’ai payé devant la justice, il n’y a jamais eu aucune autre violence. Après France Inter, ça a été le déchaînement dans les médias. Et aucun journaliste ne m’a contacté pour avoir ma parole à moi ! Aucun. J’ai proposé à des tas de médias de leur donner ma version, personne n’en a voulu. Ils sont allés chercher (avec l’aide de Judith) des filles avec lesquelles je me serais mal comporté quand j’avais 17 ans. Ils n’ont rien trouvé de sérieux contre moi. Mais ils ont réussi à trouver une fille pour dire « Il m’a pincé le genou », et une autre pour dire qu’à 18 ans, j’avais dormi sur son paillasson parce que j’étais fou d’elle. Ces filles, je déjeunais pourtant avec elles dix jours avant la publication. C’est fou ! Quand je leur ai demandé pourquoi elles racontaient ça aux journalistes, certaines me répondaient qu’on leur avait mis la pression, d’autres que c’était par sororité. Toutes ces petites choses parviennent à dresser un portrait bien noir de vous. C’est une machine infernale, un rouleau compresseur. C’est tout un système qui se met en branle contre vous.
Une fois dans cet engrenage, peut-on s’en sortir ?
J’ai l’impression que ça ne s’arrêtera jamais. Judith s’acharne. Elle a continué à déposer d’autres plaintes contre moi. Mais ce qui m’a décidé à prendre la parole, c’est qu’elle m’accuse d’inceste sur notre fille. Elle dit qu’avec mon beau-père, nous embrassons ensemble ma fille avec la langue « en réunion ». L’ignominie. Sa plainte a été classée sans suite. À partir de ce moment, j’ai décidé de parler, même si ça doit me coûter. Parce que sinon, quand ma fille grandira et qu’elle tapera son nom sur internet, elle ne verra que des vidéos de sa mère dressant un portrait horrifique de moi. Je ne peux pas laisser ainsi le champ libre au mensonge. Je dois faire exister ma vérité. Les accusés ont peur de parler. Tout le monde est terrifié, et à juste titre d’ailleurs. Il faut que cela cesse. On ne peut plus laisser des gens aussi extrémistes imposer leur justice à eux, leurs règles à eux. C’est la terreur.
Donc non seulement elle mobilise les médias, mais elle continue son combat judiciaire contre vous ?
Oui. Sauf que – en dehors de la plainte pour le jet du téléphone – toutes ses plaintes ont été classées sans suite. Ses plaintes sont délirantes ! Un jour elle est allée au commissariat parce que je n’avais pas mis de crème solaire à notre fille et qu’elle avait le nez cramé. Une autre plainte parce que je lui ai déposé la petite un peu en retard. Une autre pour harcèlement (ce que je conteste, et qui encore une fois a été classée sans suite). Les services de police l’ont toujours écoutée et ne m’ont pas loupé. Mais au bout d’un moment, même eux n’en pouvaient plus et ne voulaient plus la recevoir. Elle prétendra évidemment que la police n’écoute pas sa parole ! Après m’avoir accusé d’inceste sur notre fille, elle me l’a confiée sans problème pendant un an, comme si de rien n’était. Drôle de manière de protéger sa fille ! Toutes ses plaintes déposées en vain ont tout de même eu un effet ! Je n’ai pas vu ma fille pendant plus d’un an. Donc elle a tout de même réussi à m’infliger une punition de plus sans la moindre décision de justice.
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À partir de la médiatisation de votre affaire, comment s’est comporté le milieu professionnel avec vous ?
Au moment où l’affaire a éclaté, j’étais en pleine ascension. Toutes les portes s’ouvraient à moi. Mon film était présenté à Cannes ! Tous les projets se sont naturellement arrêtés. Très peu de gens m’ont appelé. J’ai senti la majeure partie des gens se détourner de moi. Je suis passé du statut de jeune réalisateur prometteur à celui d’agresseur. Pour cette erreur que j’ai commise et que je ne minimise pas, dois-je payer toute ma vie ? Ai-je le droit d’exister ? Ou alors, qu’on me condamne clairement à la perpétuité avec une peine de sûreté ! Mais j’espère pouvoir refaire du cinéma un jour. J’y travaille. J’ai récemment reçu des nouvelles positives et je sais que je peux compter sur quelques personnes courageuses qui ne sont pas prêtes à se laisser intimider.
Avez-vous lu son livre à charge contre vous ?
Oui. C’est du grand n’importe quoi. Tout est déformé. Tout est malhonnête. C’est du délire. Dans ce livre, elle accuse également l’acteur James Thierrée – père de son autre enfant – de violences conjugales. Ce que James conteste ! En cinq ans de vie commune, elle ne m’a pourtant jamais parlé des prétendues violences de James. James n’a pas vu son fils pendant plus d’un an pour des raisons obscures également. Que le même scénario se répète n’éveille pas le moindre doute, tout le monde trouve ça normal, elle continue d’écumer les médias sans avoir jamais à affronter la moindre petite contradiction. Tout ce qu’elle dit est parole d’Évangile. Elle est reçue partout comme une sainte. J’ai envie de demander aux journalistes : jusqu’où doit-elle aller pour qu’ils se disent que c’est trop ? C’est tout de même flagrant que Judith a complètement perdu la raison !
Lorsque vous l’avez rencontrée, défendait-elle ce féminisme-là ?
Pas du tout ! Elle n’avait même pas lu Simone de Beauvoir. Aujourd’hui, je ne la reconnais plus. Sa voix, ses mots ont changé. Physiquement non plus, je ne la reconnais pas. C’est comme si elle était entrée dans une secte. Les mots qu’elle utilise ne sont plus les siens. Elle utilise le lexique MeToo. Elle n’a plus que ce vocabulaire en bouche. Lorsque j’ai eu affaire à elle lors des confrontations, j’en ai eu froid dans le dos. Je ne voyais plus aucune humanité en elle. Et pourtant je ne suis pas contre ce mouvement MeToo. Je suis pour que l’on remette de l’ordre dans les relations hommes-femmes. Mais je suis obligé de constater la dérive totalement folle dans laquelle nous sommes.
Pourquoi ne pas vous défendre devant la justice, par exemple en l’attaquant pour dénonciations calomnieuses ?
Les avocats vous déconseillent de le faire. Si je la poursuis, je vais être considéré comme l’agresseur qui piétine la parole des victimes. Regardez ce qu’elle m’inflige alors que je ne répondais même pas à ses attaques. Imaginez ce que ce serait si je l’attaquais à mon tour. Et tous les médias la suivraient, c’est certain. C’est difficile de faire le poids. D’ailleurs, je l’ai attaquée une fois, parce qu’elle ne m’avait pas présenté ma fille pendant trente et une journées. Eh bien, c’est moi qui ai été condamné à 3 000 euros d’amende pour préjudice moral et financier pour procédure abusive. Sans compter que depuis le début de cette affaire, j’en suis presque à 70 000 euros de frais d’avocats.
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Rien de ce qu’elle dit contre vous ne tombe sous le coup de la diffamation ?
A priori non. Lorsqu’elle martèle que je suis un auteur de violences conjugales, elle ne ment pas. Cette vérité est actée. Mais la réalité précise, que Judith dissimule, est que je ne suis l’auteur que d’une violence conjugale. Pas plus. En masquant cette petite nuance, elle fait de moi un monstre. Et dans ce mouvement MeToo, c’est bien cela le problème : la nuance. Ce jet de téléphone, pour eux, fait de moi un nouveau Bertrand Cantat.
Pensez-vous que Judith Chemla est sincère ?
En partie, oui. Judith a basculé dans une dérive extrémiste du féminisme. C’est presque sectaire. C’est comme quelqu’un qui entre dans l’univers Web de Soral et qui s’abreuve toute la journée de ses vidéos antisémites. Il finit par ne plus avoir qu’une vision totalement déformée du monde, à ne plus voir que des complots juifs partout. Eh bien Judith ne vit plus qu’à travers son nouveau combat féministe. Sur ses réseaux sociaux, elle ne publie que des contenus wokistes qui incitent à penser que tous les hommes sont des monstres, des violeurs et que toutes les femmes sont des victimes. Elle ne se nourrit plus que de ça. Elle n’est entourée que par des gens qui pensent ainsi. Son avocate est une spécialiste des violences sexistes. Vous savez comment m’appelle son avocate lorsque je me trouve dans la même pièce qu’elle ? « L’agresseur multirécidiviste » ! Après, il n’y a pas que de la conviction. Je pense aussi que Judith se sert de la cause juste du combat contre les violences faites aux femmes pour mener sa vendetta personnelle contre moi, parce que je l’ai trompée lorsque nous étions ensemble et qu’elle ne l’a pas digéré. Et puis, elle n’a jamais été aussi célèbre que depuis qu’elle est devenue une figure de proue de ce féminisme révolutionnaire. Donc, peut-être qu’il y a un brin d’opportunisme inconscient dans sa sincérité.