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Yassine Belattar: splendeurs et misères d’un courtisan

J’aurais voulu être un artiste


Yassine Belattar: splendeurs et misères d’un courtisan
Alexis Corbiere et Yassine Belattar à un rassemblement pour Carlos Martens Bilongo, Paris, 4 novembre 2022 © ISA HARSIN/SIPA

Avant que la Nupes ne s’amourache du sinistre Médine – que nous mettons en couverture du magazine – d’Assa Traoré ou du «petit ange» Nahel, le progressiste Emmanuel Macron, de son côté, avait fait du comique crypto-islamiste Yassine Belattar son «Monsieur banlieue»… Le joyeux drille vient d’être condamné à quatre mois de prison avec sursis et obligation de soins pour « menaces de mort et de crimes » par la justice. Portrait.


Depuis la réélection d’Emmanuel Macron, l’humoriste Yassine Belattar s’était fait singulièrement discret. Sa dernière poussée d’hubris remontait à la campagne présidentielle de 2022. Il avait alors donné de la voix et occupé le terrain, notamment le plateau de « Balance ton post », avec la redoutable efficacité qu’on lui connaît. Gagné par la fièvre électorale, le troubadour franco-marocain qui avait reconnu en notre chef de l’État son semblable, « son frère », s’était alors lancé dans la course à la fonction suprême. Il incarnait, il n’en doutait pas, « la jeunesse issue de la diversité » et se posait alors en inexpugnable rempart anti-Zemmour. C’était sans compter pourtant avec les partisans de l’extrême droite. Farouches et déterminés, ils lui livrèrent un combat sans merci pour l’intimider, le bouter hors des ondes et lui fermer les salles de spectacle. Parce qu’il craignait d’y laisser jusqu’à la vie, le sage sut renoncer à son destin politique pour se replier sur ces paroles solennelles qui sonnèrent comme un glas : « L’acte symbolique est de me retirer. »

Un passage en politique trop court !

Alors que l’actualité judiciaire remet sur le devant de la scène ce sympathique garçon censé vendre du rêve à une partie de « nos jeunes », nous espérons ruinées toutes ses velléités de retour sur la scène politique. Puisse ce personnage hâbleur qui n’a cessé d’avancer ses pions idéologiques avoir définitivement perdu son aura. Il y a quelques années, déjà, sans succès, l’auteur des « Guignols de l’info » (Bruno Gaccio) avait déposé une première plainte contre l’histrion passé par la chaîne LCI. Aujourd’hui, le voici condamné par le tribunal correctionnel de Paris pour « menaces de mort », « menaces de crimes », « envoi réitéré de messages malveillants et harcèlement moral » à l’encontre de plusieurs personnalités du monde du spectacle. Il est maintenant de notoriété publique que le bougre a la parole percutante et l’argument frappant. Quatre mois d’emprisonnement avec sursis, donc, pour Yassine Belattar : les faits de menaces de mort et de crimes vis-à-vis du metteur en scène et scénariste Kader Aoun dont il s’est rendu coupable sont « établis et objectivés » par les enregistrements de plusieurs appels téléphoniques. C’est peu cher payé, mais, c’est indéniablement un bon début. L’amuseur devra aussi verser 500 euros de dommages-intérêts au comédien Kevin Razy qu’il aurait également harcelé. Cette condamnation est assortie d’une obligation de soins et d’une interdiction formelle de rencontrer les victimes. Notre « modèle inspirant » pour « la jeunesse issue de la diversité » est aussi un proche d’Emmanuel Macron, tout comme Alexandre Benalla. Lui aussi, en son temps, frappa plus que les esprits. Il semblerait que le chef de l’État se soit fait une spécialité d’afficher les amitiés les plus improbables croyant ainsi s’attirer la sympathie d’une jeunesse issue de l’immigration. On en est désolé pour elle parce que cette jeunesse mérite d’autres porte-parole que des rouleurs de mécaniques sans scrupules et forts en gueule. Ces bateleurs ne font que la cantonner dans un rôle victimaire pour servir leur seule ambition personnelle.

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Le « Monsieur banlieue » d’Emmanuel Macron

Yassine Belattar n’a pas hésité à abandonner la défroque de l’ancien monde qu’il portait encore en sa jeunesse pour promouvoir l’islam politique susceptible de le mettre sous les projecteurs. Né en 1982, il n’a pas grandi dans une cité mais dans la ville bourgeoise de L’Étang-la-Ville (Yvelines). Il y fut longtemps « le seul arabe du coin », comme il l’a confessé en 2015 à Pascal Boniface, dans un entretien à la Revue internationale et stratégique. C’est simplement à la fin de son adolescence qu’il s’installera aux Mureaux. Avant Dieudonné, ses modèles furent Jean-Marie Bigard et Laurent Gerra, autant dire qu’il n’envisageait pas forcément de défendre le port du voile ou du burqini. C’était sans compter sur l’étiquette « diversité » qu’on n’a pas manqué de lui coller sur le dos. Il a alors flairé que l’estampille ne pouvait que favoriser son ascension dans pays qui se fustige éternellement pour son passé colonial. Sur la radio et à la télévision, il n’aura de cesse que de tourner la France rance en dérision. Dans l’émission les Trente Glorieuses qu’il anime avec Thomas Barbazan, il ironise sur les poilus de la Grande Guerre, raille les prénoms Gontran et Marguerite, applaudit lorsqu’il est question des « soldats » de Dae’ch. Le voici lancé. En 2015, il anime la soirée de gala du Comité contre l’islamophobie en France (CCIF) ; on y plébiscite son humour. « Rire du pire », tel est son credo. Le drôle mettra désormais un point d’honneur à être de toutes les causes douteuses, affichant sans vergogne son communautarisme. Il soutient le rappeur Médine quand celui-ci envisage de se produire au Bataclan et supporte Decathlon dans l’affaire du « hijab de sport ». Sans ciller, il compare le djihadiste à un « gamin qui fout le bordel à un anniversaire » et considère les attentats islamistes en France comme des « faits isolés ». Rien ne l’arrête.

Yassine Belattar et Emmanuel Macron en 2017 © ERIC FEFERBERG / AFP

Ce curriculum vitae n’a pas manqué de séduire le chef de l’État. Il en fit, lors de son premier mandat, son « monsieur banlieue ». Yassine Belattar, heureux de sa bonne fortune, intégra le Conseil présidentiel des villes, instance élyséenne mise en place pour alimenter la réflexion sur la politique à mener dans les quartiers prioritaires.

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Il en démissionna en octobre 2019, après une énième histoire de voile, estimant l’islamophobie qui, selon lui, règne en France jusqu’au sein de l’État, incompatible avec ses convictions. En ces heures les plus sombres, c’est par le truchement de Libération qu’il s’adressa au président, dans une lettre qui visait Jean-Michel Blanquer : « (…) je suis déçu que certains ministres que vous avez choisis ne supportent même pas l’idée de voir une femme voilée sur le territoire. » Dans sa missive, il déclara aussi, prophétique : « La France va connaître une mue communautaire. »  Loué soit le nouveau coup d’arrêt qui vient d’être porté à sa carrière politique.




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est professeur de Lettres modernes

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