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Wokisme : la leçon du poulailler

Le billet de Dominique Labarrière


Wokisme : la leçon du poulailler
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Et si nous arrêtions d’avoir peur du wokisme? Ce phénomène inquiétant pourrait ne pas durer. La preuve par les poules.


Le wokisme donne, semble-t-il, notamment aux États-Unis, les premiers signes d’essoufflement. Chez Disney, où la logique du tiroir-caisse ne tarde jamais à s’imposer face aux autres considérations, si élevées soient-elles, on en arrive à considérer que « dégenrer » Blanche Neige ou métamorphoser les sept nains en ectoplasmes virtuels ne serait pas une si bonne idée que cela ! On s’en réjouit.

Dans un précédent billet, je m’étais autorisé à avancer que le wokisme ne me semblait pas devoir infiltrer aussi profondément le cerveau et le cœur des gens qu’on paraissait le craindre parce qu’il lui manquerait une composante essentielle pour atteindre la force de conviction du religieux. Cette composante serait, selon moi, le Salut. Les religions – du moins celles que je connais – ont cette sublime puissance de promettre à leurs fidèles une voie salvatrice, une issue de lumière, une sortie par le haut. Collective autant qu’individuelle. Même les dogmes prêchés par des Saints Staline ou des Saints Mao n’auraient su faire l’économie de la promesse de « lendemains qui chantent », de l’avènement d’un monde sans classes, donc sans lutte de classes, et de ce fait d’une idyllique harmonie. Pour l’harmonie, on a pu juger sur pièce.

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Cependant, là n’est pas l’unique élément matérialisant la stérilité fondamentale du wokisme et son incapacité à pénétrer assez profondément dans l’esprit des populations pour les y convertir tout à fait. Il y a un autre signe – plus ténu j’en conviens – qui, de mon point de vue, ne trompe pas. Il s’agit du comportement des intellectuels, je veux dire de ceux qui officient de préférence dans le milieu universitaire et la sphère des « sciences sociales », là où le vide est le domaine où s’exerce le mieux la raison. Ce comportement me semble tout entier inspiré de celui des poules, animal sympathique à l’intelligence apparemment limitée mais qui – paradoxe des plus troublants – sait nous pondre au quotidien l’absolue perfection formelle et physico-chimique de l’œuf. (Ce qui, au demeurant, lui confère un remarquable avantage sur l’intelligentsia susmentionnée chez qui les résultats de la ponte sont beaucoup plus discutables). Correspondance de comportement, disais-je.

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Vivre à la campagne présente mille intérêts : l’air est plus pur et la nature nous donne des leçons fascinantes. Celle-ci, en particulier : des poules sont au pré qui picorent. La pluie se met à tomber. S’il ne s’agit que d’une averse, une précipitation de courte durée, voilà bien qu’elles se ruent à l’intérieur du poulailler pour se mettre à l’abri. En revanche, si la pluie doit durer, elles restent sur place, entrent le cou dans le plumage et attendent patiemment que ça se passe, quand bien même y en aurait-il pour des heures. Eh bien, il en va de même pour la catégorie d’intellos de campus dont je parle ici : lorsqu’un bouillonnement d’idées, un mouvement social se produit, quand une théorie supposée révolutionnaire ou novatrice émerge, s’ils se bousculent pour l’épouser et promouvoir la chose, vous pouvez être quasi certain que celle-ci fera long feu, qu’elle s’épuisera bientôt en vaines circonlocutions. Mais si cette nouvelle approche est destinée à prospérer, à pénétrer les populations, à peser sur le réel, vous constaterez que comme les vaches de nos campagnes, animal également fort sympathique, ces brillants esprits n’auront fait, en vérité, que regarder passer le train. Bien évidemment, ils y grimperont quelques stations plus loin, toute honte bue et bardés de leur habituel surplus de bagage.

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Ex-prof de philo, auteur, conférencier, chroniqueur. Dernière parution : « Moi, papesse Jeanne », éditions Scriptus Malvas

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