Sa pièce programmée le mois prochain et intitulée « Woke » se jouera à guichets fermés.
Décidément, les Lillois férus de théâtre déconstructiviste et sociétal sont gâtés. Depuis que David Bobée, co-fondateur de l’association “Décoloniser les arts”, dirige le Théâtre national du Nord, ils ont pu jouir de spectacles plus affriolants les uns que les autres. Entre autres réjouissances : un Dom Juan déconstruit et « démythifié », une lecture de textes de et par Eddy Louis, un « choc esthétique dessinant un féminisme révolutionnaire » avec Virginie Despentes et Béatrice Dalle. Martine Aubry, maire de Lille, attendait beaucoup de David Bobée et de son « répertoire très ambitieux sur les enjeux sociétaux ». Gageons qu’elle n’a pas été déçue. Et que ce début d’année répond entièrement à ses vœux.
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Les subversives drag queens à toutes les sauces
Car, au Théâtre du Nord, 2024 débute en fanfare. Un samedi par mois, les parents et leurs enfants à partir de cinq ans sont conviés à venir écouter des Contes à paillettes dans lesquels « des sorcières rusées, des princesses aventurières, des grenouilles poilues et des princes pas si charmants questionnent le monde ».Les lectures de ces contes sont assurées par les drag queens du Collectif Paillettes. « Iel était une fois… des créatures à poil et à vapeur dans un monde tout en couleurs », annonce-t-on sur le site internet du théâtre. Petit cours de français à l’usage des crétins inclusifs : au contraire de ce que semblent croire ces derniers, le « il » de « il était une fois » est comme le « il » de « il pleut » : il ne fait référence à aucune personne de sexe masculin mais introduit ce qu’on appelle une proposition impersonnelle. Mais allez expliquer ça à Tata Foxie, un des drag queens composant la « joyeuse bande qui questionne notre époque » mais ignore sa grammaire. Tata Foxie s’était déjà fait remarquer lors d’une soirée organisée par Mediapart au cours de laquelle iel s’était plaint de l’hostilité des « gens de droite et d’extrême droite » à son encontre. Présent à ses côtés, le rappeur Médine l’avait alors soutenu en convoquant l’idée d’un combat intersectionnel d’un genre nouveau : « Ils comprennent qu’une convergence politique est en train de se mettre en place. » Peut-être Médine, par solidarité avec la cause LGBT, emmènera-t-il un jour prochain sa progéniture à un de ces spectacles où Tata Foxie et ses camarades dénoncent le méchant patriarcat et la masculinité toxique en lisant aux enfants Un tigre en tutu. Mais, je ne sais pas pourquoi, j’ai quand même un doute.
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Du 13 au 17 février, les Lillois ont pu entendre « l’amoureux des mots » JoeyStarr. Ce dernier a lu sur la scène de leur théâtre « les grands écrits de la pensée antiraciste », des textes d’Aimé Césaire, de Malcolm X et… d’Assa Traoré. À l’issue du spectacle, l’amoureux des mots s’est livré au journal La Croix : « Mes deux parents sont Martiniquais, toute cette histoire, toute cette culture, me porte à mort. C’est une continuité, je fais partie du tissu social de tout ce qu’on a livré ce soir. » De son côté, le metteur en scène David Bobée, inquiet, s’est interrogé : « Aujourd’hui, le racisme est à l’œuvre. Alors, comment on se comporte ? C’est une vraie question surtout avec la menace d’une arrivée du RN aux plus hautes sphères du pouvoir. » Aux dires des quelques critiques plus sensibles à l’art scénique qu’à la propagande, la prestation du rappeur a été nullissime, et la mise en scène de Bobée, affligeante. Pourtant, la salle n’a pas désempli et il est prévu que JoeyStarr aille brailler dans de nombreux théâtres et autres centres culturels à travers la France.
Hommes déconstruits, racisés et femmes à barbe
Pendant ce temps, du 12 au 16 mars, la première pièce de théâtre de Virginie Despentes sera jouée au Théâtre du Nord. Elle s’intitule… Woke. En plus de Mme Despentes, le déconstructeur en chef de l’hétéro-patriarco-colonialisme, l’inénarrable Paul B. Preciado, fera partie des comédiens. La présentation officielle, écrite en simili-français, donne vraiment envie… de rire : « Ils et elles ont décidé de créer sur scène leurs doubles fictionnels, en répétitions et en processus d’écriture de personnage, qui peu à peu prendront leur autonomie. Quatre écrivain.es autour d’une table, c’est un immense bordel mental et une source infinie de tensions et d’alliances. Leurs personnages sont fous amoureux, un peu paumées (sic), précaires, lesbiennes, trans, racisées (sic), disco techno punk vaudou, prolixes, hésitants, en colère et se posent cette question : que serait, aujourd’hui, la révolution dont iels rêvent ? » Il n’est pas difficile d’imaginer le profil du public friand de ce genre de « théâtre » conforme à l’idéologie wokiste – là où il y a une université accueillant des professeurs et des étudiants en sociologie, en études de genre ou en études postcoloniales, une antenne de Sciences Po et une École de journalisme, là se trouvent les principales brigades de la culture woke. Ajoutez-y un ou deux bataillons de petits-bourgeois socialo-macroniens rebellocrates toujours à l’affût d’un moyen de flatter les totalitarismes culturels du moment, et il arrive ce qu’il devait arriver : le spectacle de Despentes, à peine ouvert à la réservation, affiche déjà complet.
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Ce public trié sur le volet se précipitera sûrement à un autre spectacle qui se déroulera du 10 au 13 avril. Le titre est prometteur : “Rien n’a jamais empêché l’histoire de bifurquer”. Anne Conti, metteuse en scène, comédienne et… ex-députée suppléante LFI, lira un texte de… Virginie Despentes écrit à l’occasion d’un séminaire organisé par… Paul B. Preciado au Centre Pompidou. Ce texte est « un appel à ce que l’histoire bifurque, libérée des carcans du capitalisme, du colonialisme, du patriarcat, du racisme et de l’homophobie ». Si vous voulez entendre à quoi ressemble une bouillie verbale, un charabia nombriliste se prenant pour de la poésie anarchiste, je vous invite à vous rendre sur YouTube et à tapoter sur votre clavier : Virginie Despentes Lecture Pompidou. Il faut avoir le cœur bien accroché pour écouter la totalité de cette ânerie pseudo-révolutionnaire scandée par une Virginie Despentes sur orbite. Allez, pour vous dissuader quand même de vous infliger ce supplice, je vous offre un extrait représentatif de ce « manifeste magistral et puissant » qui se veut également un « appel urgent au déploiement de la douceur » :
Cette porno-scatologie de bazar est faite pour épater l’étudiant analphabète et l’ex-trotskyste embourgeoisé. Quant aux critiques craignant de passer pour d’affreux réacs s’ils ne cirent pas les pompes de Virginie la rebelle, ils cirent, que voulez-vous, ils cirent.
La patronne
À propos de cirage de pompes, on se souviendra du Masque et la Plume génuflexible qui rendit compte de Cher connard, le dernier livre de Virginie Despentes. Jérôme Garcin n’hésita pas à comparer ce “roman épistolaire” à celui de Pierre Choderlos de Laclos. Élisabeth Philippe, critique à L’Obs, décréta que « la patronne » avait « saisi les mutations, les transformations de la société avec une vigueur et une intelligence qu’on trouve très peu ailleurs ». Frédéric Beigbeder mit ses pas dans ceux de Garcin et trouva que c’était « une très bonne idée d’avoir voulu réécrire Les Liaisons dangereuses ». Nelly Kapriélan, des Inrocks, fut tellement « bluffée » par ce livre « brillantissime », qu’elle se mit à baragouiner : « Tout tient sur la langue et le propos d’une intelligence foudroyante. »
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Gómez Dávila affirmait qu’un « lecteur expérimenté hume dès le premier adjectif le livre faisandé ». Consciencieux, Éric Naulleau lut à sa sortie le livre en entier mais, avant d’en faire une réjouissante et sarcastique recension dans Marianne, tint à rappeler deux choses essentielles. Premièrement, le fait que « cette rebelle en carton qui coche toutes les cases de la notabilité – ancienne jurée du prix Femina, du prix Goncourt, romancière dont un livre fut adapté pour une série sur Canal +, réalisatrice de films calamiteux soutenus par le CNC dont elle devint membre, etc. – est en vérité une rentière qui mange sa soupe à toutes les meilleures tables ». Deuxièmement, le texte émétique que cette islamo-gauchiste écrivit, immédiatement après l’attentat qui décima la rédaction de Charlie, pour déclarer son « amour » aux frères Kouachi dont le geste avait été, selon elle, « héroïque ». Éric Naulleau écharpa le livre de Despentes en saluant « l’habileté qui consiste à malaxer tous les thèmes du moment pour en faire une bouillie textuelle de grande consommation ». Bouillie que va pouvoir continuer d’éructer au Théâtre du Nord cette artiste subversive sachant profiter sans modération des généreuses institutions culturelles financées par la collectivité. En effet, Mme Despentes possède aujourd’hui le statut privilégié d’artiste associée au Théâtre du Nord – ce dernier bénéficie chaque année de 4 millions d’euros de subventions publiques.
David Bobée peut prolonger ce statut durant tout le temps de son mandat. Ainsi, les performances wokes vont pouvoir continuer de s’accaparer la scène du théâtre lillois tandis que le véritable art théâtral y disparaîtra à tout jamais.
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