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Allemagne: après le blackface, le redface…

Le choix d'un acteur blanc pour incarner un Indien provoque la polémique


Allemagne: après le blackface, le redface…
Alexander Klaws grimé en Indien Apache au côté de Thomas Gottschalk. © Capture d'écran du compte Instagram d'Alexander Klaws

Une fiction télévisée familiale allemande mettant en scène deux personnages populaires n’est pas du goût de certains…


Énième mini-tempête dans le verre d’eau progressiste. En cause, comme le révèle la presse allemande, une fiction familiale prévue pour les fêtes de fin d’année. Winnetou est une trilogie écrite à la fin du XIXème siècle par l’écrivain Karl May et devenue depuis extrêmement populaire outre-Rhin. Elle met en scène un Indien Apache, Winnetou, et son fidèle compagnon, un aventurier blanc surnommé Old Shatterhand. En 150 ans, la trilogie a donné lieu à d’innombrables adaptations aussi bien au théâtre qu’au cinéma, ou encore à la télévision (et Winnetou a été joué aussi bien par des Indiens comme Robert Alan Packard, rendu célèbre par le film Der Schuh des Manitou, que par des blancs).

Le groupe allemand ARD, propriétaire notamment des chaines Das Erste[tooltips content= »Das Erste est la première chaîne de télévision généraliste publique fédérale allemande appartenant au groupement public des radiodiffuseurs régionaux, ARD NDLR »]*[/tooltips], KiKA ou encore DW-TV, prépare une nouvelle version télévisuelle avec dans les rôles titres les acteurs populaires Alexander Klaws (Winnetou) et Thomas Gottschalk (Old Shatterhand) ; il s’agit de l’adaptation d’une pièce donnée l’année dernière au festival Karl May de Bad Segeberg. Le tout devant être diffusé fin décembre, pour un public familial.

Klaws est très apprécié des jeunes, s’étant d’abord fait connaître en Allemagne comme chanteur en remportant la première édition du télé-crochet Nouvelle Star en 2003.

La photo de la discorde

Sauf que, patatras, Alexander Klaws a eu la mauvaise idée de publier une photo sur son compte Instagram en guise de teaser. Une simple photo bon enfant où on peut le voir grimé en Winnetou aux côtés de son compère.

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Il n’en faudra pas plus pour que des centaines d’internautes s’offusquent de cette publication et accusent Klaws de racisme. Que ce dernier soit le meilleur ou non pour le rôle, cela pourra toujours être débattu par nos amis allemands. Mais là n’est visiblement pas la question pour certains téléspectateurs : le problème est apparemment sa couleur de peau. « Ce redface est inimaginable en 2020, comment la production a-t-elle pu accepter cela » ; écrit un internaute, suivi par d’autres commentaires offusqués – certains s’en prenant même à l’équipe de maquillage…

Sauf que, comme l’a rappelé Ute Thienel, directeur de la société de production Segeberger Kalkberg, dès l’origine Karl May insistait sur le respect mutuel entre les personnages (et les différents groupes ethniques), en dénonçant toute forme de racisme et de xénophobie. « Regardons la couleur des cœurs, pas celle de la peau », fait-il d’ailleurs dire à Winnetou. Et Thienel de rappeler, à titre de comparaison, l’exemple de Ben Kingsley, acteur métisse (son père était d’origine indienne mais sa mère anglaise) qui fut oscarisé pour sa performance exceptionnelle dans le rôle de Ghandi. Pour prendre un autre exemple, le rôle de Cio-Cio-san (une femme japonaise) dans Madame Butterfly de Puccini a été merveilleusement interprété autant par des sopranos blanches, noires (telles que Camilla Williams) qu’asiatiques. Quoi qu’en disent ceux qui crient au yellowface et à « l’appropriation cultuelle ».

Burt Lancaster et Audrey Hepburn dans « Le Vent de la plaine » (1960). L’actrice britannique interprète une Indienne dans le film.D.R.

En tout état de cause, la production de Winnetou a confirmé qu’à aucun moment la couleur de peau n’a joué un rôle dans le recrutement du rôle du célèbre Apache. Seul le talent a compté, et selon ces critères, c’est Klaws qui l’a emporté. Ute Thienel rappelle d’ailleurs le succès immense du spectacle en 2019, et le groupe ARD confirme à ce jour la programmation. Pas de quoi convaincre certains trublions outre-Rhin.

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Les grands classiques américains menacés ?

Faudra-t-il donc remiser certains grands classiques américains, de la même manière que HBO a retiré l’iconique Autant en emporte le vent de sa plateforme (avant toutefois de le remettre au programme, mais avec un avertissement) ? Exit, le mythique Burt Lancaster dans Bronco Apache de Robert Aldrich (1954) ou Le vent de la plaine de John Huston (1964) où Audrey Hepburn interprète une jeune Indienne Kiowa adoptée, film qui visait justement à lutter contre le racisme ? Au tiroir, le pittoresque La rivière de nos amours (1955) où Kirk Douglas donne la réplique à Eduard Franz dans le rôle de Nuage Rouge ? Tout est imaginable…



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Juriste, chroniqueur

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