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Gloire à la reine Catherine!

“Deneuve, la reine Catherine”, demain soir sur la trois


Gloire à la reine Catherine!
© Jean-Pierre Fizet Bridgeman Images

France 3 diffusera jeudi à 21 h 10 un portrait inédit de Catherine Deneuve signé Virginie Linhart


Sa blondeur est un leurre. Ne vous fiez pas à ce visage d’ange traversé par des ondes mélancoliques. Catherine n’est pas douce. Catherine n’est pas une potiche. Catherine n’est pas une victime. Catherine est trop insoumise pour se laisser guider par sa seule beauté physique. Il y a chez elle, une dignité qui élève, un refus de se vautrer dans la psychologie de bazar et un souci de vérité qui ne regarde qu’elle-même. Elle est étrangère au regard des autres, ce qui venant de la plus grande actrice française s’avère un paradoxe des plus troublants. Catherine vous emmerde poliment, gentiment, sereinement mais elle vous emmerde quand même. 

© AGIP Bridgeman Images

Vous ne percerez jamais son mystère, c’est son fonds de commerce. Elle ne laisse entrer personne dans son intimité. Chasse gardée ! Vous ne l’enfermerez dans aucune prison dorée. Si elle daigne vendre son image depuis quarante ans dans des publicités internationales, c’est pour mieux se libérer des contraintes. L’argent ne lui fait pas peur. Elle n’en a pas honte. Elle va le chercher là où il se trouve, sans minauder, ni jouer les artistes maudits. Elle n’a jamais été, ni ne sera sous le joug d’un mentor, encore moins d’un homme. Catherine n’est la marionnette de personne. Son inflexibilité est un signe d’espoir dans une société du spectacle si prompte à se lamenter et à quémander un peu d’amour. Catherine ne dégouline pas de bons sentiments et de prudences assassines. Elle a horreur des confessions calculées pour satisfaire l’audimat. Elle ne se dépoitraille pas l’égo pour se conformer aux désirs des majorités. Son individualisme est une leçon de maintien pour nous tous. Elle ne regrette jamais ce qu’elle dit. Cette vérité qui peut paraître carnassière dans sa bouche est, au contraire, une source d’émerveillement et de jubilation pour un public tellement habitué aux simagrées. Catherine est une Marianne qui ne mâche pas ses mots. La tête haute et la parole claire. Elle assène son opinion avec le calme et la précision des filles qui ont quitté le foyer pour convoler avec un réalisateur de quinze ans son aîné. Vadim venait de découvrir BB et roulait, à la ville comme à la plage, en Ferrari Spider California, ce sont deux raisons suffisantes pour arrêter le lycée. Là, réside tout son potentiel érotique. Dans une forme de pudeur qui ne triche pas, d’absence totale de louvoiement et un goût prononcé pour la fantaisie. Catherine ne s’allonge pas sur le divan des Français pour se plaindre. Elle conserve pieusement ses malheurs et que personne ne s’avise de salir, pervertir ou vienne seulement marchander les blessures de sa vie. Catherine ne se livre pas sur commande, elle ne s’explique pas à la veillée des chaumières, elle ne tente pas de convaincre comme un politicien en campagne. Elle a trop le sens des valeurs pour se compromettre dans ce genre de déballages. 

On se dit que nous avons eu la chance de croiser sa route, par écrans interposés. Elle aura donné à nos vies anonymes, plus de consistance, plus d’élan aussi, peut-être même la force de ne pas plier. Sa résistance au laid, au vulgaire, à la facilité et à la démagogie ambiante nous montre qu’une autre voie est possible. Le portrait signé Virginie Linhart qui sera diffusé jeudi soir sur France 3 retrace sa longue carrière et ouvre la boîte aux souvenirs. Ils sont tous là. Les sœurs Dorléac dans leur chambre d’adolescentes, une grand-mère souffleuse à l’Odéon, Johnny et sa guitare, Danielle Darrieux en mère de cinéma, Varda qui s’improvise coiffeuse pour Demy, Marcello qui sourit tristement toujours sur les photos, David Bailey qui ne sait pas un mot de français et se mariera pourtant avec elle, les naissances de son fils et de sa fille, son ami Yves Saint-Laurent qui habille ses pensées, Depardieu et Truffaut, les César et les montées des marches, Polanski et Buñuel, Gainsbourg et ses jeux de mots foireux. Catherine aura traversé mille vies. Mick Jagger fut témoin à son mariage. Elle a posé nue pour Playboy. Et elle est une jardinière hors pair. Ce documentaire bien charpenté et plaisant à regarder laisse filtrer le caractère d’une légende, à la fois si proche et si lointaine. Catherine, c’est un bloc, un roc dans l’océan des platitudes actuelles. Quand on l’interroge au détour d’une interview sur la disparition de sa sœur, elle accuse le coup et répond avec une émotion contenue qui honore le téléspectateur. Cette manière d’être impose le respect. 


Deneuve, la reine Catherine – Un film écrit et réalisé par Virginie Linhart. Produit par Georges-Marc Benamou (Siècle Productions). Narratrice Chloé Réjon. Musique originale composée, orchestrée et dirigée par Pablo Pico. Avec le soutien de la PROCIREP et de l’ANGOA. Avec la participation de la RTS, de la RTBF, de Paris Première, de Radio Canada et du CNC. En coproduction avec France Télévisions. Diffusion : France 3 – Jeudi 14 avril – 21 h 10



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Journaliste et écrivain. À paraître : "Tendre est la province", Éditions Equateurs, 2024

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