Vincent Lambert sera peut-être mort la semaine prochaine. Son médecin a annoncé l’arrêt des traitements à partir du 20 mai. Cet homme de 42 ans en état végétatif depuis un accident de la route en septembre 2008 est devenu le symbole du débat sur la fin de vie en France. Mais personne ne sait pourtant ce qu’il pense.
Faire disparaître ce que l’on ne comprend pas, ce qui vous échappe. Ce qui se passe à l‘intérieur de l’esprit, de l’âme de Vincent Lambert, tétraplégique depuis un accident de voiture en septembre 2008, nul ne le sait, nul ne peut prétendre le connaître, le comprendre, l’expliquer. C’est la Terra Incognita des comas de longue durée, des électro-encéphalogrammes plats, des « états végétatifs sans espoir d’amélioration », comme disent les gens en blouse blanche. Ils n’en savent rien, ils sont démunis, et ils ne savent même pas que quand il n’y a plus d’espoir, il reste encore l’espérance… et la simple humanité, surtout.
Faire disparaître Vincent Lambert
Je m’étais déjà interrogé, sur le site de Causeur en juin 2015, sur la sidérante injonction dite « morale » à faire mourir de soif et de faim (agonie particulièrement atroce, rappelons-le) cet être humain qui n’a fait et ne fait de mal à personne, au prétexte que continuer à le maintenir en vie relèverait d’un acharnement thérapeutique déraisonnable… L’acharnement déraisonnable à protéger toute vie devrait être l’obsession de tout médecin. Mais ce qui obsède le corps médical en charge de la vie de Vincent Lambert, c’est de le faire disparaître, en le tuant…
Au nom d’une bienveillance proclamée, affichée, revendiquée, il faut faire mourir cet homme. La semaine prochaine, le processus d’interruption des soins sera probablement engagé, Vincent Lambert ne sera plus ni hydraté ni nourri. Pour ne pas avoir à le voir souffrir, pour ne pas avoir à observer son corps pris de spasmes, parce que mourir de soif et de faim est une torture à tout organisme vivant, à tout esprit, à toute âme, les gens bienveillants en blouse blanche, soutenus par les autorités, le gouvernement, une partie de sa famille qui a envie de passer à autre chose, enfin bref tous ceux qui veulent qu’il meure une bonne fois pour toute, ont décidé qu’il serait plongé dans un état de sédation profonde… Il ne sentira rien, puisqu’on vous le dit…
Tous ces gens bienveillants…
Pourquoi ? Pourquoi tant de gens bienveillants, médecins, juges, ministre de la Santé, veulent-ils autant que cet homme, le plus vulnérable d’entre tous les citoyens français, soit mis à mort ? Parce qu’il est insupportable de ne pas comprendre, de ne pas savoir, de ne rien maîtriser à son état ? Parce que ça coûte trop cher ? Sommes-nous entrés dans l’ère de la mise à mort comptable ? De la gestion administrative et financière de la vie humaine ? Sommes-nous redevenus des barbares ?
On va procéder au lent assassinat de Vincent Lambert. C’est le premier d’entre nous à qui ce traitement est officiellement infligé, avec le concours et le soutien de l’Etat. Les gens bienveillants continueront, et petit à petit, on commencera à se faire à l’idée qu’il est bon et raisonnable de faire disparaître d’autres gens inutiles. Ce meurtre programmé est une honte, un scandale sans fond, comme parfois sont les actes des gens trop bienveillants. Ou le sont-ils vraiment ?
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