Un phénomène curieux gagne les Français… Ils régressent! Pas seulement en termes de niveau d’éducation. Non! ils sont gagnés par une curieuse nostalgie de l’enfance.
Est-ce le résultat pernicieux de la prise en charge croissante de l’État-nounou, lequel s’occupe de notre régime alimentaire, de nos co-voiturages ou du nombre de pas qu’il faut effectuer quotidiennement ? Est-ce la conséquence de notre abandon à cet Etat maternant qui gère la façon dont nous travaillons, l’éducation sexuelle de nos enfants (lesquels nous donnerons bientôt des leçons en la matière) ou notre microbiote et les cinq fruits et légumes qui vont avec ?
Bonne fête des mamans !
Tout un vocabulaire régressif accompagne le phénomène. N’est-ce pas un peu inquiétant d’entendre un ministre de la République important s’exprimer en disant « ma maman… », d’autres évoquer « mon papa » ?[1] Des termes mignons qui renvoient à la petite enfance et au domaine de l’affectif pur. Rappelons quand même que papa et maman sont les premiers mots de bébé lorsqu’il apprend à parler, et que l’adjectif possessif que certains y accolent systématiquement parachève son aspect enfantin – au-delà de la sympathie sous-jacente, bien sûr, que ces termes provoquent. Même à la radio, les journalistes oublient le mot mère, utilisant « sa maman » pour parler de la mère d’un joueur de foot ! Une dilution sémantique qui nous fait vivre sous le règne de l’émotion bienveillante permanente. C’est tous les jours la fête des mères. Pardon, la fête des « mamans » !
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Dans le même ordre de constats, j’observe en entreprise depuis quelque temps l’apparition des bonbons en salle de réunion ; les cadres sont shootés à l’Haribo ! C’est tout juste si la DRH ne distribue pas des doudous en cas de menaces de burnout. Et puis, on fait joujou ; il y a désormais l’heure de la récré dans l’entreprise ; le babyfoot est à côté de la machine à café, et une table de billard installée en salle de réunion. Terminé le temps jadis où les adolescents et les jeunes rêvaient d’atteindre l’âge adulte, l’époque où la valeur, certes, « n’attendait pas le nombre des années », mais où l’on rêvait de faire ses preuves. On empruntait alors en cachette les vêtements des parents et l’impatience de vieillir était l’impatience de la vie. C’est fini : nos ados ne veulent plus vieillir, ils ne souhaitent pas follement entrer dans la vie active et prolongent indéfiniment leurs études. Ils revendiquent avec insolence le fait d’être jeunes… On a honte des boomers. Ce serait une qualité d’être jeune, au pire une excuse. C’est la démarche inverse qui a pris le pas, le jeunisme rôde: les parents s’habillent comme les « d’jeunes » ; à eux jeans troués, baskets et tee-shirts. On copie jusqu’au langage de sa progéniture pour être aussi jeunes qu’eux, soyons « cool ». Nous observons une sorte de refus de la maturité à tous les niveaux. Plus grave, le refus d’éduquer ses propres enfants, à qui on demande ce qu’il convient de faire, est à la mode. C’est un conformisme ambiant ; on a peur de ne pas être aimé de ses enfants, et l’autorité a changé de camp.
Big Bisou
En cas de vrai problème, quand on en a les moyens, on préfère faire appel à des psys. « Il voit quelqu’un », c’est la formule consacrée. Cela permet en tout cas de se disculper et de ne pas prendre ses responsabilités. Quant à l’Education nationale, chargée d’éduquer autant que d’enseigner, elle ne sait plus à quel prof se vouer, entre le prof à piercing vachement sympa parce qu’on ne le distingue plus des élèves, et celui qui tente d’imposer une discipline et qui sait que les parents lui tomberont dessus dès qu’il en punira un.
Mais, au pays des Bisounours, tout le monde s’aime, ou du moins donne des signes extérieurs d’affection… Le tutoiement est de rigueur, les fautes de syntaxes également. C’est chaleureux la faute de syntaxe ; la grammaire avait un côté censure rigide quand la faute de français apporte un côté plus humain à la phrase… « Bisous » remplace « au revoir », et tout le monde s’embrasse. Là aussi, c’est encore la mode ado qui nous a contaminés et on regretterait presque le Covid qui nous avait fourni l’occasion de rependre quelques distances sous un prétexte médical ! Tout le monde il est beau, tout le monde il est sympa, c’est devenu un véritable programme politique.
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On aime les jeunes au point d’en faire des idoles. On envisage de les faire voter de plus en plus tôt (alors qu’ils votent de moins en moins). On les fait s’exprimer, à 15 ans, sur les retraites à la télé, sans qu’ils comprennent d’ailleurs que c’est leur propre retraite qui va sauter si on les écoute, car en tout état de cause on ne pourra pas la leur payer… De toute façon, sous l’œil admiratif de nos élus de gauche et de leurs parents esbaudis, ils déclarent « qu’ils ne veulent pas perdre leur vie à la gagner » ; ça c’est dit ! Ces petits chéris sont nos sages d’antan. Le monde n’a-t-il pas pris conscience de l’urgence écologique grâce à Greta Thunberg, alors âgée de 14 ans, et à qui on n’a jamais osé demander quand elle allait à l’école ?
Le péril jeune
Quant aux manifs actuelles en France, on les scrute à la loupe. Le drame serait que les étudiants sortent en masse dans la rue, car on ne sait vraiment pas comment les faire rentrer ensuite. C’est comme si on avait des cohortes d’orphelins à gérer, et la culture de l’excuse a remplacé tout jugement objectif : ni responsables, ni coupables. Ce sont des jeunes, ils ont le droit de savoir mieux que tout le monde. D’ailleurs ils l’ont lu sur internet !
Quoi qu’il en soit, l’assistanat croissant est une façon, volontaire ou pas, d’infantiliser tous les adultes que nous sommes, de même que la politique des chèques cadeaux se révèle très efficace pour avoir la main sur nos dépenses et nos gains.
Demande à l’État, papa et maman n’ont plus les moyens…
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[1] https://www.gala.fr/l_actu/news_de_stars/video-ma-maman-gerald-darmanin-ses-arguments-personnels-pour-convaincre-sur-la-reforme-des-retraites_512575