Verdun: j’irai sprinter sur vos tombes


Verdun: j’irai sprinter sur vos tombes
Sipa. Numéro de reportage : 00758064_000016.
verdun hollande merkel zimet
Sipa. Numéro de reportage : 00758064_000016.

Il y a des jours où on ne regrette pas, pour cause d’impératif familial, d’avoir raté la retransmission télévisée de la cérémonie censée commémorer le centenaire de la bataille de Verdun. On serait même tenté, après en avoir vu le résumé, de parler de kermesse plutôt que de commémoration. En voyant une foultitude de personnes courir dans des tenues aux couleurs bigarrées au milieu des tombes, je n’ai pu m’empêcher de penser à trois de mes ancêtres.

Tout d’abord à mon grand-père paternel, Etienne David, qui arriva à Verdun avec ses camarades du 17ème Régiment d’Infanterie le 5 mars 1916. Il venait de fêter ses 21 ans et connut sur place les combats de Douaumont, les attaques au « Flammenwerfer », lance-flammes, qui terrorisaient nos soldats ou encore les combats pour prendre ou reprendre les décombres du village de Fleury. En trois jours, son régiment eut 125 tués et 360 blessés mais, vu sa vaillance pour briser les assauts allemands, fut cité à l’ordre de l’Armée.

Deux tiers du régiment morts

J’ai également pensé à mon grand-oncle, Pierre Lapeyre, qui arriva à Verdun avec son unité, le 14ème Régiment d’Infanterie, le 26 juin 1916. Le 27, son unité fut envoyée en renfort des troupes qui avaient repris les ruines du même village de Fleury sous une pluie d’obus de 150 et 210 millimètres. Ce jour-là, les deux tiers de l’effectif du régiment sont restés sur le terrain…

Lorsque le 9 juillet on les envoya défendre le fort de Souville, ce furent des obus de 380 et de 420mm qui leur tombèrent dessus mais ils tinrent bon au point de repousser du 11 au 13 juillet ce qui restera la dernière offensive allemande de la bataille.

Enfin, j’ai pensé à mon grand-père maternel qui avait combattu durant la Première guerre mondiale mais qui, trop jeune, n’était arrivé au front qu’en janvier 1918 et qui voulut voir Verdun. Ce fut fait en novembre 1985 et son émotion fut immense lorsqu’il retrouva son canon, le Schneider 155 millimètres, exposé dans le musée situé dans le mausolée. Au retour, il me raconta ce qu’il avait fait de pire dans sa vie : « le nettoyage de tranchées » qui était de rigueur lorsque ses obus tombaient dans les tranchées françaises et qu’on demandait aux hommes d’aller ramasser les corps de leurs camarades ou ce qu’il en restait.

Heureusement que le ridicule ne tue pas

Je revois mon grand-père les larmes aux yeux devant ces croix plantées face à l’ossuaire, devenues l’espace d’une kermesse une annexe de club de sport où on fait de l’exercice physique en musique.

J’espère simplement que la tombe de mon grand-oncle, qui tomba le 3 juin 1918 dans les combats de Longpont – Corcy – Blanzy, et qui repose à la Nécropole nationale de Vauxbuin tombe 432 D, ne verra jamais ce type de mascarade autour de sa sépulture.

Le ridicule ne tue pas, heureusement pour les organisateurs de cette odieuse caricature de commémoration mêlant jogging et musique alors que silence et respect s’imposaient. Je pense en particulier à Volker Schlondorff, le metteur en scène, et à Joseph Zimet, directeur général de la mission du centenaire de la Première guerre mondiale.

Quant à Angela Merkel et François Hollande, ils peuvent d’ores et déjà écrire un livre à quatre mains dont le titre est tout trouvé : J’irai sprinter sur vos tombes



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est journaliste et auteur de "Virons Dieu du débat politique !" (Ed. Fauves). On l'entend sur Sud Radio.

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