Accueil Politique Pendant ce temps, chez deux autres candidats «radicalisés»…

Pendant ce temps, chez deux autres candidats «radicalisés»…

Hep "Causeur", y'a pas que Zemmour dans cette campagne!


Pendant ce temps, chez deux autres candidats «radicalisés»…
Valérie Pécresse réunit ses soutiens à la Maison de la Mutualité, 11 décembre 2021, Paris © Jacques Witt/SIPA Numéro de reportage : 01052448_000031

Alors que beaucoup d’encre a coulé dans les journaux après les rassemblements de Zemmour ou Mélenchon – notamment dans Causeur… – les placides Pécresse et Jadot continuent leur petit bonhomme de chemin de leur côté.


Bien décidé à faire le tour des meetings mais n’étant doué d’aucun don d’ubiquité, je me suis rabattu sur Youtube. Et c’est avec un peu de retard que j’ai lancé la lecture des deux discours, au sacrifice d’une heure douze pour le candidat écologiste, de trente-huit minutes pour la candidate de droite.  

Pécresse, une chiraquienne qui voudrait nous convaincre de sa fermeté

Déjà ministre sous Nicolas Sarkozy, Valérie Pécresse est l’une des dernières survivantes du monde d’avant, le monde d’avant le grand coup de balai de 2017, qui a vu partir à la retraite, en vrac, François Fillon, Nicolas Sarkozy, Nathalie Kosciusko-Morizet ou Alain Juppé. Dans un monde dominé par le dégagisme, où la virginité politique est devenue un atout (en tout cas l’assurance de ne pas avoir un lourd passif à défendre), Pécresse a su tirer son épingle du jeu dans le congrès de son parti tout en bénéficiant d’un incroyable rebond dans les sondages, la plaçant au second tour et même en mesure de battre Macron. On se souvient toutefois des élans connus momentanément au lendemain des primaires, faisant monter François Fillon à 29% en décembre 2016 et Benoît Hamon à 18% en janvier 2017 ; avec le final que l’on sait.

Ayant évité l’hémorragie pour l’instant sur son aile droite – seul Guillaume Peltier, qui après vingt ans d’une longue dédroitisation, n’a pas pu s’empêcher de rechuter et de se dire sensible au discours d’Eric Zemmour-, Pécresse pouvait donc se donner des accents musclés mais nuancés : « je suis une femme de paix, mais je n’hésiterai pas à devenir chef de guerre à chaque fois que la France, notre France sera menacée ». Elle est très heureuse de nous rappeler que pour la première fois, la droite républicaine est représentée par une femme, même si c’est un peu vache pour Marie-France Garaud et sa candidature de 1981 (qui n’avait fait, il est vrai, que 1,33%).

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Fermeté face aux caïds et à l’immigration incontrôlée, indépendance vis-à-vis de l’Allemagne (puisque celle-ci a désormais un chancelier de gauche), sérieux budgétaire… avec Pécresse, on va voir ce qu’on va voir. Elle appartient à une famille politique, il est vrai, qui a été au pouvoir pendant quatorze années sur dix-neuf entre 1993 et 2012, et qui n’a pas donc été pour rien dans le déclin de la France, le changement de sa population, son dérapage budgétaire. Heureusement pour elle, tout le monde a oublié qui était ministre du Budget en 2011, quand la France a perdu son triple A auprès de l’agence de notation financière Standard and Poor’s. Libérale économiquement et politiquement, elle nous promet d’en finir avec un État tentaculaire et d’assurer la liberté de pensée aux intellectuels – pourvu qu’ils ne se lancent pas en politique et ne deviennent pas des concurrents directs…

Jadot garde quand même quelques idées « à la con » dans sa besace

Dans le même temps, à Laon, Yannick Jadot (EELV) donnait aussi son meeting. Le choix de la petite préfecture de l’Aisne (moins de 25 000 habitants), n’est pas forcément innocent : il faut rompre avec l’image d’un parti qui ne parlerait qu’aux électeurs en trottinette des métropoles. Déjà vainqueur de la primaire de son parti il y a cinq ans mais s’étant désisté au profit de Benoît Hamon, Jadot doute peut-être depuis de sa capacité à miser sur le bon cheval et semble résolu à faire cavalier seul. Au milieu d’Alice Coffin et de Sandrine Rousseau, Yannick Jadot passe pour l’aile raisonnable de son parti (il n’y a pas grand mal) ; sa compagne Isabelle Saporta, avait fustigé le concours « d’idées à la con » de la part des nouveaux maires écologistes. Sur un spectre qui va d’Yves Cochet préparant la fin du monde avec ses chevaux en Bretagne à François de Rugy dégustant son homard au château de Lassay, Jadot apparaît sur une ligne plutôt austère. Il raconte une jeunesse champêtre en Picardie au milieu des cerfs mais tient quand même à nous rassurer : avec lui, nous ne serons pas condamnés à ne prendre qu’une douche froide par mois dans le noir. Les lecteurs d’Ernst Jünger seront presque déçus.

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Isabelle Saporta, la compagne de Yannick Jadot, n’hésite pas à réprimander les écolos quand ils déconnent de trop… © Hannah ASSOULINE

Après de beaux succès sur des élections à faible taux de participation, auxquelles seules les CSP+ participent, EELV et son candidat ont du mal à décoller dans le marécage des divers candidats de gauche. Annonce de la sortie du nucléaire tout en remerciant la filière de son travail (la remercier pour mieux la remercier), bio à la cantine, le candidat renforce les thèmes d’origine de son parti. C’est surtout après le meeting, dans un service après-vente assuré sur Franceinfo que Jadot s’est lâché, avec pêle-mêle, GPA éthique, ère du soupçon généralisé, et promesse de nommer une femme à Matignon. On se demande si, à l’inverse des papes qui font l’objet d’un test de masculinité (« Duas habet et bene pendentes ») après leur élection (en tout cas, d’après la légende), le prochain Premier ministre ne fera pas l’objet d’un test de féminité, au milieu des ors de la République.

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Deux petits points communs apparaissent dans les deux discours. Bien qu’en perte de vitesse dans les sondages, Eric Zemmour est bien l’attraction de la pré-campagne et la cible où le plus de flèches doivent tomber. Chez Pécresse, il n’est pas cité nommément mais l’allusion est nette : « Comme vous, mes chers amis, je ne choisis pas Pétain, je choisis les marins de l’île de Sein ». Côté Jadot, Zemmour n’est jamais cité non plus mais il est évoqué presque de bout en bout. Par ailleurs, les deux candidats revendiquent l’adjectif « radical ». « Mon projet est radical car la situation l’exige » a-t-on entendu à la Maison de la Mutualité. À Laon, Jadot a aussi emprunté le terme à Sandrine Rousseau qui l’avait mis sur la table lors de la primaire écologiste. On imagine que même Macron est capable de le réclamer. En 2022, tout le monde sera radical, jusqu’aux radicalement modérés.



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Professeur démissionnaire de l'Education nationale

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