À dix jours du premier tour, la candidate répond aux questions de «Causeur»
Cela a pris du temps. Mais malgré les hauts et les bas d’une campagne en dents de scie, Valérie Pécresse a finalement répondu aux questions que je lui ai posées — qu’elle en soit ici publiquement remerciée • Jean-Paul Brighelli
Causeur. Qu’est-ce qui sépare votre programme de l’action et des propositions d’Emmanuel Macron ?
Valérie Pécresse. Je présente un projet de claire rupture avec un quinquennat de renoncement, un projet de droite assumée qui reconstruit une France affaiblie depuis dix ans. Sur l’autorité, les réformes, la valorisation du travail, il y a un fossé entre nos deux projets. Je propose des quotas migratoires pour mettre un terme à l’immigration incontrôlée, lui non. Je propose des peines planchers pour les multirécidivistes et des peines minimales fermes pour les infractions les plus graves, notamment un an de prison ferme pour tous ceux qui agressent un uniforme, un professeur ou un élu de la République, lui non. Je propose des mesures essentielles pour le pouvoir d’achat des Français : une augmentation des salaires de 10% et aucune retraite inférieure au SMIC net pour tous ceux qui ont travaillé toute leur vie, lui non. Je propose de réformer l’Etat, ce qu’il a été incapable de faire, de réformer l’assurance chômage, de réduire les déficits et la dette grâce à une règle d’or budgétaire, lui non. Pire, il continue la fuite en avant de l’argent magique. Je propose deux fois plus de baisses d’impôts que lui pour réindustrialiser la France et valoriser le travail. Je propose de remédier au déclin démographique et à la casse de la politique familiale en instaurant une allocation universelle dès le premier enfant de 900 euros par an, en augmentant les allocations familiales pour le deuxième et le troisième enfant, lui non. Emmanuel Macron est tout simplement dans le déni, le déni de l’état dans lequel il laisse la France après cinq années.
Et quand il tente de copier certaines de mes mesures, c’est du mauvais plagiat. Je propose 15 heures d’activité d’intérêt général obligatoires en échange du RSA, avec lui ces heures ne sont que facultatives. Rien ne changera. Cela résume la vision de la société d’Emmanuel Macron : il ne mettra pas fin à l’assistanat. Pour ma part, je veux une société du travail !
Nous n’avons, en réalité, pas la même vision de la France. Ma France est une et indivisible et pas fracturée entre les communautés. Ma France, elle n’a qu’une seule culture et une seule histoire qu’il ne s’agit pas de « déconstruire ». Dans ma France, jamais on ne parlerait de « crime contre l’humanité » pour qualifier la colonisation et ainsi insulter notre mémoire collective et celle des milliers de rapatriés et de harkis. Dans ma France, le chef de l’Etat protège les forces de l’ordre et ne les accuse pas de « violences policières ».
Éric Woerth annonçant son soutien à Macron a préludé à toute une série de défections — et les rédactions bruissent de la rumeur d’un possible ralliement de Sarkozy à la candidature de Macron. Le fait est que l’ancien président de la République ne s’est guère manifesté pour vous soutenir. Comment interprétez-vous ces attitudes si contraires à la nécessaire union pour gagner ? Ambitions personnelles ? Manque de lisibilité de votre propre campagne ? Les rats quittent le navire ?
Depuis cinq ans, Emmanuel Macron pratique mieux que quiconque le débauchage à droite comme à gauche. D’où les zigzags permanents du « en même temps ». Le pays a besoin d’une ligne politique claire. Celle d’une droite forte et juste. Celle d’une droite qui a les solutions efficaces pour le pays et qui aura le courage de les mettre en œuvre. Ce qui compte pour moi c’est d’aller au contact des Français pour leur présenter mon projet de franche rupture qui permettra de reconstruire notre souveraineté agricole, industrielle, énergétique et militaire, qui remettra de l’ordre dans la rue, dans nos comptes et aux frontières, qui rebâtira nos grands services publics et reconstruira une prospérité durable fondée sur le travail. Oui, il y a urgence à reconstruire la France.

La nécessaire reconstruction de la maison France passe par une nouvelle politique industrielle — l’actuel et abyssal déficit, surtout comparé à l’excédent allemand, vient pour l’essentiel des délocalisations de notre secteur industriel depuis vingt ans. Comment comptez-vous réindustrialiser la France — ou faut-il accepter de ne plus être que la destination de vacances de l’Europe du Nord ?
La réindustrialisation de la France est une priorité absolue. Avoir une industrie forte, pour une nation, est essentiel : pour l’emploi, pour notre souveraineté mais également pour des questions d’insertion dans la société et la place de la valeur travail.
Malheureusement, la part de l’industrie dans notre économie a été réduite à la portion congrue, et le quinquennat d’Emmanuel Macron n’a rien arrangé : la France a perdu près de 100 000 emplois industriels en cinq ans et notre déficit commercial s’est considérablement aggravé, jusqu’à atteindre un niveau record de plus de 80 milliards d’euros en 2021.
Une immigration incontrôlée et une intégration ratée, cela disloque une nation (…) J’inscrirai dans la constitution que nul ne peut se prévaloir
