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Une girouette nommée Zineb

(Girouette : sert à indiquer la direction du vent - Les dictionnaires)


Une girouette nommée Zineb
Zineb El Rhazoui, Versailles, 18 juillet 2022 © Abd Rabbo-POOL/SIPA

La journaliste franco-marocaine, ancienne de Charlie Hebdo, est passée du statut de lanceuse d’alerte contre l’islamisme à défenseuse des pogroms en Israël. Elle fait l’objet d’une enquête pour «apologie du terrorisme».


Il est parfois lourd de nuages sombres, le vent qui fait tourner la girouette…

Elle se nomme Zineb El Rhazoui. Dieu sait que nous l’avons portée aux nues lorsque, voilà quelques années, elle savait mieux que personne nous mettre en garde, nous l’Occident, contre l’expansionnisme islamiste, ses menées, ses réseaux, ses ruses, ses pièges. Elle parlait. On l’écoutait, on l’admirait pour son courage, on saluait en elle une lucidité qui faisait tellement défaut à notre intelligentsia, à nos élites. Faut-il avouer que la part de séduction n’était pas mince dans l’intérêt qu’elle suscitait ? Un phrasé n’appartenant qu’à elle, identifiable entre tous, rehaussé d’une subtile pointe d’accent d’Orient. Une diction aussi claire que la pensée exprimée. Une dialectique parfaitement maîtrisée, ornée de la juste dose d’érudition, de culture européenne et orientale qui, subtilement, en impose sans jamais écraser. Avec cela, une charmante présence à l’écran. Nous tenions l’oracle à la parole d’or. Je me souviens de commentateurs qui n’hésitaient pas à évoquer une parenté, sur les plans de la témérité, de l’audace, de la clairvoyance, avec notre Jeanne d’Arc…

Curieux personnage

Une Jeanne d’Arc qui aurait fait volte-face et changé de bannière. L’oriflamme que Zineb el Rhazoui brandit haut aujourd’hui semble aujourd’hui être celle de l’islamisme conquérant, de préférence dans ses prolongements terroristes. Découvrant cette mue des plus inattendues, nous sommes tombés de haut. Il est vrai que nous ignorions à peu près tout de ce qu’est vraiment cette femme.

Très opportunément, une enquête du Figaro signée Paul Sugy[1] nous apporte l’éclairage qui nous manquait, tant sur sa personnalité, que sur son parcours et ses véritables convictions.

Étrange personnage. Une diva, en fait, qui aurait trouvé son rôle magistral non dans l’art lyrique mais dans la croisade politique. Une ancienne camarade livre dans l’article ce portait assez surprenant : « Dès qu’elle est arrivée en France elle a débarqué comme une rock star, avec ses grands manteaux et ses lunettes Gucci. Elle avait quelque chose en plus des autres, elle était drôle, cultivée, elle avait une histoire d’amour marrante avec un chef touareg, elle était touchante et libre, elle racontait sans pudeur ses avortements à Charb. Elle était un personnage ! »

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Charb, de Charlie Hebdo, bien sûr. Elle y collabore. En diva. Notes de frais à l’avenant, présence aléatoire, colères tonitruantes. Il semble que, pour ces motifs, elle n’y aurait pas fait long feu. Or, survient la tuerie, le massacre des frères Kouachi. Les rafales passées, elle s’insère à la perfection dans le petit cercle des survivants, elle qui se pavanait en vacances au Maroc lors de l’attentat. En France, elle s’y trouve cependant lorsqu’il s’agit de rassembler autour d’elle une petite clique pressée de se gaver de la fortune toute soudaine du journal dont le numéro d’après l’attentat s’est vendu à 8 millions d’exemplaires. Le pactole. Faire de l’argent sur le cadavre de leurs amis n’arrête pas ces gens, Zineb El Rhazoui en particulier.

Le nouveau visage de Zineb El Rhazoui

Suit une période conjugale avec un banquier de chez Rothschild en charge de la « finance islamique ». Installation à Dubaï. Existence sur le mode mille et une nuits. Luxe, calme, volupté. Et bistouri du chirurgien esthétique des stars pour, au passage, s’améliorer la frimousse. Il se peut que les cagnottes en lignes ouvertes pour financer sa sécurité en France, et qui continuent de courir, aient pu aider quelque peu à ces rafistolages dispendieux. À ce moment-là, il semblerait qu’elle se consacre aussi à une passion de toujours, la peinture. Son registre préféré dans ce domaine, nous apprend Paul Sugy, l’autoportrait. On s’en serait douté. Narcissique un jour…

La barbarie terroriste du 7-Octobre perpétrée par le Hamas en Israël l’extirpe de cette forme de somnolence idéologique. Plus exactement, c’est la riposte inévitable d’Israël qui lui fait reprendre l’étendard de la lutte. La lutte pro-islamiste désormais. Israël qu’elle considère être un état colonial et « génocidaire ». Un « Daech qui a réussi », ose-t-elle toute honte bue.

Elle ne condamne évidemment pas les massacres du 7-Octobre qui sont pour elle « un acte de résistance et de désespoir ». Cela lui vaut d’ailleurs, à l’initiative du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau – qui fut jadis l’un de ses plus ardents soutiens – l’ouverture d’une enquête pour « apologie du terrorisme ». Cela au grand dam, on s’en doute, de nos médias d’insalubrité publique qui, on peut le supposer, s’apprêtent à dérouler sous les pieds de la malheureuse victime le tapis rouge qui convient afin qu’elle puisse de nouveau dérouler sa dialectique si bien huilée. L’article en donne un aperçu. N’a-t-elle pas le front de déclarer, en effet, s’efforçant de rejeter toute accusation d’opportunisme ou de trahison : « Je n’ai pas hésité à faire mon devoir en dénonçant le terrorisme islamiste lorsqu’il a frappé notre pays. C’est au nom du même principe que je dénonce la dérive sanguinaire du gouvernement israélien. » Est-il seulement besoin de commenter l’obscénité de cette mise en parallèle ?

Vent mauvais

Girouette : sert à indiquer la direction du vent, écrivais-je en commençant. Il me semble que derrière la volte-face stupéfiante de cette femme, de ce personnage singulier à la psychologie manifestement complexe, erratique, se profile une tendance que je me permettrais de qualifier de lourde. Lourde par sa puissance quasi souterraine, et lourde, pesante, par la décrépitude morale qu’elle traduit.

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Le revirement de Zineb El Rhazoui s’inscrit dans le vent mauvais qui s’immisce chez nous depuis une année à présent, notamment chez les élites, les gens qui sont au sommet. La riposte d’Israël après la tentative exterminatrice du 7-Octobre n’a pas eu d’effet « libérateur » que chez cette militante, elle a aussi ouvert chez nous, en grand, les vannes aux eaux encore dormantes et toujours fétides d’un antisémitisme mal maquillé en antisionisme. Cela en soi est terrifiant. Révoltant au plus haut point. L’histoire nous a pourtant appris, et pas seulement celle du vingtième siècle, ce sur quoi débouche le flux de ces eaux-là lorsqu’il devient crue. La sauvagerie totalitaire, la dictature obscurantiste, voilà où cela mène inexorablement.

Cette musique antisémite en contrepoint du chant antisioniste on l’entend ces jours-ci dans la bouche des Villepin, des Kouchner et d’autres aussi. Mais le grand et beau ténor, le virtuose en la matière n’est autre – quel chagrin de devoir écrire cela ! – que le président de la République. Notre président de notre République. À l’unisson avec une Zineb El Rhazoui, voilà qu’il va jusque’à imputer à l’Etat d’Israël – démocratie alliée et amie de la France, me semble-t-il – le recours à la barbarie ! Pire encore, il y a ces propos que, comme si souvent avec le personnage il convient de ranger dans la catégorie amusante mais lassante du « j’ai pas dit ce que j’ai dit et on n’a pas à dire pour moi ce que j’ai dit quand je dis que je ne l’ai pas dit. » Ces défenses sont d’une puérilité consternante. Elles sont surtout l’accablante expression d’un intellect à la dérive. Rappelons ces propos : « M. Netanyahou ne doit pas oublier que son pays a été créé par une décision de l’ONU. » Comment ne pas entrevoir derrière ces mots une menace ? Menace à peine voilée dont la traduction en clair pourrait être : « M. Netanyahou ne doit pas oublier que ce qu’une décision de l’ONU a fait, une autre décision de l’ONU peut le défaire. »

En réalité, c’est la montée en puissance de ce vent-là, porteur de l’idée d’une disparition à terme de l’État d’Israël, que nous indique la volte-face, finalement moins sidérante qu’il n’y paraît, de Zineb El Rhazoui. Il s’agit de bien autre chose que d’un caprice de diva, d’une foucade de passionaria égarée. Aussi, ne nous faisons aucune illusion. Lorsqu’elle viendra déployer ses talents dans ce registre chez nous, en France, il y aura du monde pour applaudir. Y compris – et peut-être même surtout – du beau monde.

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[1] https://www.lefigaro.fr/actualite-france/elle-a-vrille-comment-zineb-el-rhazoui-est-passee-d-icone-laique-a-avocate-du-hamas-20241024



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Ex-prof de philo, auteur, conférencier, chroniqueur. Dernière parution : « Moi, papesse Jeanne », éditions Scriptus Malvas

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