La République française semble de plus en plus s’inspirer des pays d’Afrique du Nord. Etat policier, gouvernance par les «élites», dépolitisation des ministres, affaiblissement du Parlement et des partis politiques, crise de l’école et ici comme là-bas, la jeunesse se détourne des urnes.
Il fut un temps où la France était le modèle politique des élites d’Afrique du Nord. La décolonisation du Maroc, de la Tunisie et de l’Algérie ne fut pas une révolte contre la France et les Français, mais contre le colonialisme qui bafouait les principes démocratiques et républicains que la IIIe République avait enseignés aux élites de la région. À l’indépendance, les trois pays d’Afrique du Nord ont adopté des Constitutions ressemblant à s’y méprendre au texte présidentiel gaullien de 1958. Le roi Hassan II, peu connu pour son amour de la démocratie mais passionné de droit constitutionnel, a co-écrit avec ses professeurs de Bordeaux la Constitution du Maroc, décalque du texte de la Ve République, monarchie et sacralité du roi exceptées. Tout cela n’a nulle part empêché l’autocratie de s’imposer.
Un demi-siècle plus tard, le circuit mimétique semble inversé. Certes, on ne copie pas à Paris les Constitutions et les modes de gouvernance en vigueur au nord de l’Afrique, largement ignorées. Mais comme Monsieur Jourdain, nos dirigeants usent de pratiques et de méthodes de gouvernement que nos voisins autoritaires du Sud ont expérimentées avec un certain succès à la fin du xxe siècle. Celles-ci nous éloignent des
