L’affaire McKinsey, du nom du cabinet de conseil de stratégie et de gestion américain, a attiré l’attention du grand public sur une activité méconnue en France. Pourtant, elle a accompagné l’évolution du capitalisme.
Que font les conseils en gestion et stratégie ? Pour dire les choses simplement, leur mission est d’améliorer les performances des entreprises et des organismes publics. Ils identifient les points forts et les points faibles du client dans différents domaines (stratégie commerciale, finances, RH, numérique) et recommandent des actions à mener pour résoudre ses problèmes et encourager sa croissance. Dans le cas des organismes publics, ils identifient les éléments qui pourraient améliorer l’efficacité du service et la satisfaction des usagers.
Leur méthode – audit-analyse-plan d’action – se structure dès les premières décennies du XXe siècle. Les pionniers en la matière sont les ingénieurs américains Frederick Taylor et Henry Gantt. Le premier, le plus célèbre, propose d’abandonner l’organisation traditionnelle du travail, qui repose sur le savoir-faire d’ouvriers qualifiés et autonomes, pour un système fondé sur une division du travail organisée par postes. Henry Gantt travaille avec Taylor à l’application de ce procédé dans l’industrie lourde. On lui doit le « diagramme de Gantt » qui permet de visualiser le temps nécessaire à chaque tâche. Adopté par les chantiers navals américains durant la Seconde Guerre mondiale, cet outil permet de réduire considérablement les temps de fabrication : la construction d’un « Liberty Ship », un cargo standardisé fabriqué entre 1941 et 1945 en 2 700 exemplaires, passe ainsi de deux cent cinquante à cinq jours.
Une telle optimisation des processus contribuant à l’amélioration de la qualité et de la rentabilité de la production industrielle a suscité un intérêt certain parmi les ingénieurs. Pourtant, le monde contemporain du conseil est largement issu du secteur de la finance.
A lire aussi : Emmanuel Macron, le plus “conseillé” de nos présidents!
Aux États-Unis, avant la crise des années 1930, les banques proposaient à leurs clients des services d’audit global de leur entreprise. C’est une compétence essentielle pour décider d’accorder un crédit, de financer un rachat, de liquider une entreprise endettée ou bien de la remettre en état. Dans les chemins de fer, l’acier ou les mines, des opérations de ce genre, à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, ont créé un écosystème composé de plusieurs métiers autour des grandes banques qui pilotaient ces opérations industrielles et financières.
En 1933, la loi Glass-Steagall instaure une séparation entre deux métiers bancaires : le dépôt et l’investissement. Ça change la donne. Presque du jour au lendemain, de nombreuses banques sont obligées de faire appel à des prestataires extérieurs pour mener ce genre d’audits. Fondé en 1926, McKinsey & Company est l’exemple emblématique du secteur. À partir des années 1990, les cabinets de conseil se tournent vers le secteur public pour proposer des stratégies de réforme, notamment dans l’armée et les services de santé. Bingo.
Aujourd’hui, McKinsey emploie 33 000 personnes dans le monde et son chiffre d’affaires dépasse les 10 milliards de dollars.