Fallait-il voir hier un quatorze juillet comme les autres, ou un adieu? Il n’y avait rien à reprocher à notre magnifique défilé militaire, mais quelque chose n’allait pas.
« C’est une fête ? Non, Sire, c’est un au revoir. » Ainsi pourrait-on parodier la phrase célèbre de La Rochefoucauld-Liancourt, lancée à Louis XVI, un soir fameux de 14 juillet 1789. Car, enfin, quelle tristesse ce 14 juillet 2021 ! Non que quelque chose eût manqué au défilé traditionnel des Champs Élysées. Tout y était sauf le cœur. Et qu’on ne mette pas tout sur le dos du Covid ni sur le temps.
Dans la limite des masques disponibles
Le défilé militaire avait pour thème « Gagner l’avenir ». Drôle de titre ! Celui du feu d’artifice, ce soir, au pied de la tour Eiffel, c’est « La Liberté » : un classique. Si le bal des pompiers est annulé, le grand concert du Champ de Mars aura lieu—Japonais en moins. Un peu partout, il y aura des festivités : pique-niques citoyens, marches aux lampions. Le Louvre sera gratuit dans la limite des masques disponibles. Mais alors pourquoi tant de tristesse ?
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Parce que la France est en distanciel avec son Roi. La Nation en fête ? Elle est fracturée comme jamais. Le patriotisme ? Les hampes sont là mais le cœur est en berne. La patrouille de France, empanachée de bleu, de blanc et de rouge est passée dans le ciel, avec ses deux clowns à bord, et l’estrade présidentielle avait les yeux au ciel. Les défilés se sont impeccablement dédoublés au pied de l’estrade. Le chef d’État, impeccable, est descendu saluer les troupes. Il a aussi félicité les choristes, lançant à tout le monde des « ça va, ne vous inquiétez pas ! » Et personne n’a dit : « Non, Monsieur le président, ça ne va pas du tout ! » Le mélange des genres final, douteux ? Le « en même temps » a fait long feu. Et dire qu’il va falloir se taper, en septembre, l’Arc-de-Triomphe emballé selon Christo ! Parce que ça ne suffisait pas qu’il ait été tagué.
Macron attendu à Lourdes
Lors de son petit bain de foule, le président a demandé que l’on allât chercher la première dame. Fatiguée, la première dame a marché sur les pavés au bras d’un garde du corps. Le président a caressé la tête d’un enfant, parlé à sa mère. La vérité est qu’il n’a pas réussi à « faire nation », le président. Faire des orphelins, il a su, en revanche. En regardant ce dédoublement de la parade et de la réalité derrière les barrières de fer blanc, je pensais aux deux tableaux de Monet et de Manet, peints le même jour, le 30 juin 1878, pour la fête nationale, en l’honneur de la République. « La rue Montorgueil » (Monet), peinte, au débotté, d’une fenêtre d’une maison, est pavoisée de drapeaux, vibrante de couleurs. « La rue Mosnier aux drapeaux » (Manet) est désolée. Ainsi, la France : là un spectacle, au-delà, un désastre.
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Demain, le couple présidentiel se rend à Lourdes. Prier la Vierge Marie de sauver la France au nom du Sacré-Cœur ? On connaît le vœu fait, par Louis XVI, à l’Assemblée, le 30 septembre 1791: « Que la nation reprenne son heureux caractère ! » Faites vos jeux, rien ne va plus ! L’avenir n’est pas gagné, Monsieur le président.
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