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Twitter et les résistants de bac à sable

Après les Américains, de nombreux Français disent déserter Twitter


Twitter et les résistants de bac à sable
À la suite de l'élection de Donald Trump, de nombreux utilisateurs progressistes disent quitter Twitter et rejoindre le concurrent Bluesky © Jaap Arriens/Sipa USA/SIPA

En avoir ? Ou pas. Faut-il quitter X-Twitter ? Quoi que vous choisissiez, « la flamme de la Résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas. »


Fight ! Fight ! Fight ! L’heure est grave. En France, après l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis, la parole libre refuse de se voir muselée ; on est entré en résistance. Après Ouest-France, le journal Sud-Ouest suspend maintenant sa présence sur le réseau social X, emboitant le pas au quotidien espagnol La Vanguardia et au britannique The Guardian.

Nicolas Sterckx, le directeur du général du groupe Sud-Ouest a annoncé courageusement dans un communiqué que les contenus du quotidien ne seront plus partagés « tant que des garanties sérieuses de lutte contre la désinformation et en faveur de l’équilibre des débats n’auront pas été apportées. » « X a tourné le dos aux médias et n’offre pas les conditions nécessaires à l’exercice serein du journalisme. » C’est entériné.

Les wokes quittent le navire

Dès le rachat de Twitter par Elon Musk, l’alerte avait été lancée ; outre-Atlantique, le dévoiement du réseau social était pointé du doigt. On se le rappelle, plusieurs personnalités du monde libre parmi lesquelles Gigi Hadid, Whoopi Goldberg, Jim Carrey ou Shonda Rhimes n’avaient pas hésité à déserter la plateforme acquise aux suprémacistes blancs, aux climatosceptiques, aux oppresseurs des minorités et autres engeances ennemies de la démocratie. Quelques courageux s’étaient d’emblée désolidarisés d’un réseau qui incitait à la haine et sur lequel on n’hésitait pas à dire que l’homme n’était pas une femme, où l’on invitait même à manger des enfants au petit déjeuner. On avait su, grâce à une étude du Center for Countering Digital Hate qu’un mois après le rachat de Twitter par l’homme de Tesla, les messages d’insultes anti-Noirs Américains avaient bondi de 202%.  Le Washington Post avait, lui, résumé un rapport de L’institute for Strategic Dialogue indiquant que le contenu pro-Hitler « atteignait les plus grandes audiences sur X (par rapport aux autres plateformes sociales) et était le plus susceptible d’être recommandé par l’algorithme du site. »  On ne s’était pas soulevé en France. On regardait encore ailleurs.

Bien sûr, on savait qu’Elon Musk n’avait racheté Twitter et investi 44 milliards dedans que dans le but de faire la propagande des idées délétères d’un vieux mâle blanc patriarcal désireux de reprendre la Maison-Blanche, mais, on avait détourné la tête. Peut-être, et c’est là un grand tort, avons-nous espéré naïvement le triomphe du Bien ? Toujours est-il qu’autruches que nous sommes, nous n’avons pas voulu voir Satan aux portes de la Maison-Blanche.

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Quand Musk a d’emblée viré les employés de Twitter pour y placer ses sbires, on a protesté, un peu, mais mollement. Et puis… la modération des contenus a disparu permettant à l’algorithme de mettre en avant insultes, propos réactionnaires, invectives, menaces et autres incitations à la haine. Les fake news se sont propagées à la vitesse de la lumière. S’en était fait. Le Mâle avait gagné l’Amérique. Maintenant qu’Elon Musk et l’homme aux cheveux jaunes ont racheté les États-Unis, on se réveille, toustes. On marque notre désapprobation et on rallume la lumière.

Pour ceux qui estimeraient que c’est un peu tard, il faut nous pardonner, on n’a pas vraiment vu le truc venir. On est des amateurs, en France. On a juste Vincent Bolloré qui rachète quelques chaînes de télé, un journal et une radio, c’est pas bien méchant. Toujours est-il qu’entre « twittos » (ceux qui restent sur X, anciennement Twitter) et ceux qui abandonnent le réseau, nous les appellerons les « cassos », il y a maintenant débat : « Quitter ou pas X ? » La question se pose. Avant de prendre une décision, on réfléchit. On n’est pas obligé de quitter le navire. Le tout, c’est de combattre le mal.

Les résistants de l’intérieur

Si certains ont déserté X, d’autres, parmi les politiques ou les membres de l’intelligentsia, ont fait le choix difficile d’y rester. C’est donc de l’intérieur qu’ils lutteront. Ainsi Marine Tondelier, secrétaire nationale des Écologistes, et défenderesse incontestée de la liberté d’expression, a appelé les internautes à migrer vers Mastodon ou Bluesky, d’autres réseaux où l’air est encore pur et le débat possible. Elle, toutefois, demeurera sur X pour rester visible, elle l’a précisé sur… X : « Ce réseau social (X/ Twitter) est une souffrance, en tant que politique, en tant que femme, parce que c’est très violent, tout le temps. Il faut le réguler ou le fermer, mais je n’ai pas l’intention de le laisser aux haineux sinon ils gagnent. » Charline Vanhoenacker, journaliste et humoriste de Radio France a fait un choix identique : « À titre personnel, pour l’instant, j’ai décidé de rester. Aujourd’hui, quand je poste mes chroniques sur X, j’ai l’impression d’injecter une gouttelette de service public dans la vie d’un milliardaire. Un peu comme quand Bernard Arnault contacte la Sécu pour le remboursement de ses frais médicaux. »

En avoir, ou pas ? Partir ? Rester sur X, réseau instrumentalisé à des fins politiques ? La réponse ne va pas de soi et on en débat, abondamment. Mercredi 27 novembre encore, sur France Inter, chez Léa Salamé et Nicolas Demorand, des intellectuels (Frédéric Filloux, responsable numérique aux Échos et Gérald Bronner, professeur de sociologie à Sorbonne Université) nous ont éclairés pour nous aider à trancher.  Nous ne sommes pas seuls.

« Certes, nous avons été et nous sommes submergés par la force mécanique, terrestre et aérienne de l’ennemi… Quoi qu’il arrive, la Flamme de la résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas. »



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est professeur de Lettres modernes

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