La présence du populiste américain Donald Trump, à Notre-Dame, samedi, est venue accentuer, par contraste, la réalité du déclin du progressisme macronien. L’analyse politique d’Ivan Rioufol.
La grandeur perdue de la France, conjurée le temps d’un week-end par la renaissance de Notre-Dame de Paris, fait apparaître Emmanuel Macron dans sa petitesse. Il faut certes reconnaître au chef de l’État d’avoir tenu sa promesse de faire reconstruire en cinq ans la cathédrale incendiée. Lui-même n’aura pas manqué de rappeler ses propres mérites, le 29 novembre puis le 7 décembre, en prenant la parole par deux fois au cœur du joyau gothique légué par le pieux Moyen Âge, avant que l’église blessée ne soit à nouveau consacrée dimanche.
Toutefois, cette énergie à reconstruire le symbole spirituel de la civilisation occidentale ne peut faire oublier le zèle mis par le même président à déconstruire, au nom du progressisme universaliste, la nation et sa souveraineté. Dans son face-à-face théâtralisé avec la chrétienté, Macron s’est montré incapable d’illustrer la force libératrice du mea culpa (« Mea culpa, mea culpa, mea maxima culpa »). Cette invitation du Confiteor à rejeter le déni et le mensonge au profit de la réalité et de l’aveu rend l’homme responsable de ses actes et de ses fautes, dans le but de les corriger et de se perfectionner. Or, jeudi soir, commentant la censure du gouvernement et la démission consécutive de Michel Barnier, Le chef de l’État s’est plus bassement employé, une fois de plus, à se défausser sur « l’irresponsabilité des autres ». Pour lui, si le premier ministre est tombé, c’est « parce que l’extrême droite et l’extrême gauche se sont unies dans un front antirépublicain », et non parce qu’il a choisi de dissoudre capricieusement l’Assemblée nationale le 9 juin, pour la rendre ingouvernable.
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La présence de Donald Trump, samedi, à la cérémonie de réouverture des portes de Notre-Dame est venue accentuer, par contraste, la réalité d’une France officielle en déclin. Mêmes les médias suiveurs, qui clabaudaient hier contre le « clown » aux « cheveux orange », n’avaient d’yeux que pour l’homme fort des États-Unis. Alors que le président américain porte en lui la promesse d’une semblable renaissance des États-Unis (« Make America great again »), la France se faisait humilier par Ursula von der Leyen. Au nom de l’Union européenne, la présidente de la commission signait vendredi à Montevideo (Uruguay) l’accord de libre-échange avec des pays d’Amérique du sud (Mercosur), en dépit du refus français d’entériner ce marché qui profitera à l’Allemagne et pénalisera nos agriculteurs. Cette perte de souveraineté nationale est la conséquence du choix de Macron de promouvoir une souveraineté européenne. Ce renoncement à défendre ce qu’est la France ne s’arrête pas là. La détention à Alger, depuis le 16 novembre, de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, coupable d’un crime d’opinion, rappelle la faiblesse de la République pusillanime face aux régimes et idéologies totalitaires qui s’essuient les pieds sur la nation bradée. Celle-ci peut renaître de ses ruines, puisque c’est la promesse de résurrection que Notre-Dame invite à méditer. Mais ce lazarisme a comme obstacle les piètres acteurs qui persistent à saccager le pays. Samedi, ils regardaient avec fascination le surpuissant entrepreneur Elon Musk, également présent sous la nef. Comment ne pas voir un immense gâchis dans la détermination de Macron à sauver la cathédrale et à laisser tomber la France.