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Pollution monstre en apnée

"Tropic", d’Edouard Salier, le 2 août


Pollution monstre en apnée
© Rezo Productions – Pictanovo – BNP Paribas Pictures – Digital District

Tropic, d’Edouard Salier, en salles mercredi prochain, est un petit film SF français très original mais dont le final cède un peu à la facilité.


Vous n’êtes ni dans Eraserhead (Lynch), ni dans Le Grand bleu (Besson). Si le prologue de Tropic met les jumeaux Lazaro et Tristan en compétition d’apnée dans un bassin dédié, c’est parce que les beaux jeunes gens (dans le rôle, Pablo Cobo et Louis Peres) suivent un entraînement sport-études ultra sélectif. Ils concourent, parmi d’autres impétrants triés sur le volet, comme cosmonautes au sein de l’ambitieux programme militaire européen de colonisation spatiale qui, s’ils sont reçus, leur promet une odyssée sidérale de dix années consécutives. Ce pourquoi on les recrute encore jeunes : il faut qu’ils arrivent encore frais à destination. Belle idée scénaristique de départ, pour un film qui allie SF et genre horrifique, mélodrame familial et tragédie sociale. 


Nos dizygotes de vingt ans Lazaro et Tristan Guerrero partagent avec leur mère hispanisante et polyglotte (campée par Marta Nieto, cf. Madre, de Rodrigo Sorogoyen) un rapport fusionnel, sans doute lié à l’absence du père et à la précarité économique du foyer – quelques indices distillés dans le script laissent entendre qu’elle pourrait être une exilée cubaine à la jeunesse volage, désespérément en quête de stabilité matérielle, élevant par compensation ses deux fils franco-latinos comme une paire de demi-dieux salvateurs.

Scénario inventif

Survient l’élément déclencheur du drame : alors que nos deux athlètes surdoués confrontent dans un étang leurs performances subaquatiques, une substance toxique envahit les eaux d’un étrange rayon vert. Malchance, la lame perfide rattrape le seul Tristan – Lazaro en réchappe à temps. Résultat, voilà notre Tristan contaminé :  couvert de bubons, difforme, édenté, vaguement attardé mental : un monstre. Comment affronter ce coup du sort ? La fratrie va-t-elle surmonter cette épreuve physique et psychologique ? Le handicap est-il la fin de tout ? 


Généreux et plaisamment inventif, le scénario du Chilien Mauricio Carrasco conduit l’intrigue hors des sentiers battus du genre horrifique comme de l’anticipation (on se sait seulement dans un futur proche), tandis que le grain de l’image argentique (en pellicule super 16mm, c’est devenu assez rare pour le souligner) esquive efficacement la contrainte d’un rendu prothétique à la définition parfaite, pour une production hexagonale au budget serré : effets spéciaux limités.

Épilogue sanglant

Si l’on s’attache de bout en bout à ce couple de teenagers traumatisé par le coup du destin, comme par les jeunes comparses handicapés avec lesquels ils sont amenés à frayer (d’où quelques passages chargés d’un bel humour acide), c’est une séquence improbable qui, de façon pas franchement crédible, introduit soudain le larron rival et vengeur pour un épilogue sanglant tenant vraiment de la pirouette scénaristique. Dommage d’avoir cédé à cette facilité.

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PS : À l’occasion de cette sortie en salles de Tropic, premier long métrage de fiction d’Edouard Salier, on vous recommande de visionner, en libre accès sur le Net, le court métrage du même réal qui, en 2015, avait raflé un Grand Prix à Gérardmer : Habana. Une dystopie totalitaire en noir et blanc, graphiquement superbe, avec d’époustouflantes architectures de synthèse incrustées dans le décor réel de la capitale cubaine. Un film prometteur. Edouard Salier reste un nom à suivre.     

Tropic. Film d’Edouard Salier. Avec Pablo Cobo, Louis Peres, Marta Nieto. France, couleur, 2022. Durée : 1h50. En salles le 2 août 2023



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