Le chroniqueur Jean Messiha est poursuivi pour injure
Le 11 février, Jean Messiha, ex-RN, débatteur redoutable connu des téléspectateurs de CNews et de la patronne (il fait profiter occasionnellement nos lecteurs de ses contributions), se fendait d’un message polémique sur Twitter. Bien mal lui en a pris.
À la suite de sa publication, il a été auditionné pendant toute une matinée au commissariat, les policiers n’avaient sûrement rien de plus urgent à faire. Et il a finalement comparu lundi devant le tribunal de Versailles, suite à une plainte pour injure publique du préfet des Yvelines Jean-Jacques Biot.
Messiha abîme la belle dentelle du préfet
Messiha, dont le compte Twitter est suspendu, réagissait en février à des propos concernant l’affaire Didier Lemaire, propos tenus par le préfet et rapportés par le journal Le Monde : “Trappes est un terrain difficile et délicat, nous faisons dans la dentelle et voilà que M. Lemaire arrive avec un bulddozer et saccage nos efforts” !
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Didier Lemaire est ce professeur de philosophie lanceur d’alerte qui avait dénoncé l’islamisation de la ville de Trappes, et avait été placé sous protection policière par le ministère de l’Intérieur. Il a depuis arrêté d’enseigner et publie ces jours-ci son témoignage chez Robert Laffont [1]. Quant au maire d’extrème gauche de la ville Ali Rabeh qui l’avait pris en grippe, son élection a été invalidée entre temps.
En désaccord et agacé par les propos du préfet qui ne soutenait donc pas franchement le prof, Messiha indiquait sur Twitter que l’islamisme avait désormais “un ami dans les Yvelines” qui n’était “pas content” que la “réalité de l’occupation islamique de la ville de Trappes” soit révélée. Il finissait son analyse de la situation par cette phrase au cœur des débats du tribunal : “La collaboration des préfets, un triste retour des heures les plus sombres”.
Messiha est-il allé trop loin ? Le procureur de la République estime que oui. Il a requis pas moins de 12 000 euros d’amende contre le chroniqueur. La liberté d’expression, ça peut coûter cher !
L’accusé parle à Causeur
Au lendemain de l’audience, Messiha se confie à Causeur, impartial juge de paix.
Est-il confiant quant à l’issue du procès ? Raisonnablement, oui. Messiha nous dit : “Toute la partie adverse a argumenté autour de l’idée que j’aurais injurié le préfet. En appui de cette assertion, elle affirme que j’aurai traité le préfet de “collabo”. Or, je ne l’ai pas traité de collabo, j’ai parlé de la “collaboration des préfets”, sans le mettre lui directement en cause. Le dossier est assez vide. Le procureur de la République a fait d’entrée de jeu de la politique et a voulu me ridiculiser, me prenant de très haut, disant que je ne valais guère mieux que les racailles qu’il voit défiler chaque jour dans le tribunal. Alors que cela fait quatre ans que je suis dans les médias et tiens des propos publics, et que je n’ai jamais été condamné. Il réclame le maximum, 12 000 euros, alors qu’il n’était requis que 5000 € contre le rappeur Nick Conrad qui appelait à tuer les Blancs, par exemple”.
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Regrette-t-il ses propos ? Reconnait-il une certaine outrance ? Oui… mais non. “Il y a sans doute des propos un peu hardis, mais il n’y a pas de haine ni de violence dans mes propos contre le préfet. Dans cette affaire, j’ai présenté mes excuses d’entrée de jeu, non pas pour ce que j’ai dit, mais des excuses si le préfet considère comme des insultes contre sa personne ce que j’avais dit, s’il faisait une telle interprétation, alors que ce n’était pas dans mon intention initiale” nous explique Jean Messiha. “Je rappelle que nous étions dans un contexte incandescent suite à la mort de Samuel Paty, et qu’un autre professeur, Didier Lemaire, venait de faire un descriptif de la ville de Trappes qu’il présentait comme tombée aux mains des islamistes. C’est d’abord le préfet qui avait chargé le professeur Didier Lemaire en l’accusant de jeter de l’huile sur le feu”.
Dans cette affaire, effectivement, c’est rétrospectivement le préfet Biot qui le premier entre dans l’arène politique avec ses propos repris par le journal Le Monde. Ce n’est qu’ensuite que Messiha embraie avec le message aujourd’hui incriminé. “Je n’ai pas attaqué le représentant de l’État. C’est le représentant de l’État, soumis à un devoir de réserve, qui était sorti de cette réserve et a voulu prendre part au débat public et au débat politique. Or dans le débat politique, il faut accepter de prendre des coups si on y prend part !” se défend Messiha. Originaire d’un pays – l’Égypte – où sa famille a assisté au tournant des années 70 à la montée terrible de l’islamisme, Messiha estime être le mieux placé pour savoir les menaces qui montent dans certains territoires de la République française.
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Si les propos de Messiha sont outranciers, il est cocasse de noter que lui-même reçoit de ses détracteurs une pluie d’autres termes historiques dédaigneux utilisés dans le débat public (“extrême-droite”, “facho”). Mais lui ne moufte pas et ne va jamais porter plainte. Le tribunal rendra son verdict le 18 octobre. En attendant, ses avocats viennent de déposer un référé pour qu’il puisse récupérer son compte Twitter. De leur côté, Nick Conrad ou les Talibans peuvent librement publier sur le réseau social…
[1] Lettre d’un hussard de la République
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