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Tous violeurs?

Des féministes veulent faire du procès de Mazan le procès de tous les hommes


Tous violeurs?
Gisèle Pelicot, Avignon, 10 septembre 2024 © Alain ROBERT/SIPA

Le procès de Dominique Pélicot sera-t-il suspendu et reporté ? On peut le craindre. En attendant, Elisabeth Lévy redoute que le procès de Mazan se transforme en procès de tous les hommes.


Faut-il craindre que le procès de Mazan se transforme en procès des hommes ? Je ne fais pas que le craindre : c’est la petite musique qui monte. Elle repose sur un sophisme : ces violeurs présumés sont des « hommes ordinaires ». Tous les hommes sont ordinaires, donc tous les hommes sont des violeurs en puissance. Et puisqu’ « on est toutes Gisèle », comme le clamaient les manifestantes réunies samedi pour soutenir Madame Pélicot, alors tous les hommes sont un peu Dominique Pélicot…

Un féminisme pas banal

Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des Femmes, dénonce le prétendu silence des hommes. Comme si seulement des femmes s’étaient émues ou indignées du sort de Madame Pélicot depuis 15 jours ! « Allons-nous voir enfin, que la culture du viol bénéficie de la solidarité masculine, écrit-elle (ah bon ?), et de l’impunité de nos institutions ? » (Non, je n’avais pas remarqué). Tout ceci est évidemment faux. Camille Kouchner, dans Libération et El Pais, publie une tribune intitulée « Ce sont simplement des hommes ». Dans son texte, elle nous parle d’un monde « où les hommes se permettent encore de croire qu’un mari peut disposer du corps de sa femme ». Les hommes, pas des, écrit-elle. L’auteur de La Familia grande voudrait que ce procès soit celui de la soumission chimique, mais aussi « celui de la violence patriarcale, de cette société qui n’en finit pas avec la culture du viol ». Et elle s’étonne de l’étonnement des observateurs autour de cette affaire : « Comme si les violences faites aux femmes n’étaient pas la norme » s’indigne-t-elle. Nous y voilà : la norme, ce seraient les violeurs, les prédateurs, les agresseurs… Félix Lemaître, journaliste, publie La nuit des hommes, une enquête sur la soumission chimique. Il y invite les hommes à « interroger leur socialisation ». Résumé de Libé : ce désir de posséder une femme inanimée n’est pas le fruit de quelques cerveaux malades, mais s’inscrit dans la domination masculine la plus banale, une culture du viol dans laquelle tous les hommes grandissent. Félix Lemaître affirme que « la soumission chimique n’est qu’une manifestation extrême d’une domination ordinaire, d’une culture et d’une socialisation banale », puis réfléchit au rapport à la fête et en arrive à la conclusion hilarante que « l’insouciance reste un privilège masculin ». La charge mentale commence en boite de nuit !

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Il est vrai que la plupart des violeurs sont des hommes. Mais, cela ne veut évidemment pas dire que la plupart des hommes sont des violeurs, pitié ! La majorité des empoisonneurs sont des empoisonneuses. Dit-on pour autant que toutes les femmes sont des empoisonneuses ?

Nombre de féministes invoquent la « banalité du mal », expression utilisée par Hannah Arendt pour le cas de Eichmann. On évoque aussi les « hommes ordinaires », titre d’un essai de Christopher Browning consacré à un bataillon de SS, qui nous parlait de braves pères de famille devenus des brutes sans nom. Mais, cet essai ne disait pas que tous les hommes étaient des criminels, mais que tous les hommes, comme toutes les femmes d’ailleurs, pouvaient le devenir. Et que personne n’était immunisé.

Récit délirant

Nous nous voyons imposer ce récit totalement délirant de l’impunité et de la prétendue complaisance de la société. Il suffit de faire une recherche MeToo pour voir que c’est faux. Ce récit repose sur la confusion habituelle des féministes entre la norme de la société et l’exception criminelle. Les violences sexuelles concernent pourtant 1/5 des détenus aujourd’hui, contre seulement 5% en 1980 : les choses ont donc évolué. Les violences sexuelles sont aujourd’hui unanimement condamnées socialement. On me rétorque qu’énormément de plaintes pour viol sont classées sans suite. En effet, la justice française ne condamne pas sans preuves. Mais pour des féministes (je dis bien des, moi), le progrès consisterait à ce que la justice condamne dès qu’une femme accuse.  

Le procès de Mazan est donc celui d’un homme et de ses complices, pas celui de la domination masculine. Mais pour certaines féministes, c’est l’occasion de régler des comptes historiques. À votre tour d’en baver, Messieurs ! Tous criminels ! Tous violeurs ! Elles nous fatiguent. Si vous n’aimez pas les hommes Mesdames, ce n’est pas grave, mais vous ne parviendrez pas à en dégoûter les autres.

J’ai une solution : transition de genre pour tout le monde ! Devenez des femmes, Messieurs, et nous vivrons enfin au paradis de la sororité !


Cette chronique a d’abord été diffusée sur Sud Radio

Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de Jean-Jacques Bourdin




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Fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur. Journaliste, elle est chroniqueuse sur CNews, Sud Radio... Auparavant, Elisabeth Lévy a notamment collaboré à Marianne, au Figaro Magazine, à France Culture et aux émissions de télévision de Franz-Olivier Giesbert (France 2). Elle est l’auteur de plusieurs essais, dont le dernier "Les rien-pensants" (Cerf), est sorti en 2017.

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