L’auteur de Guérilla, le dernier combat estime que tous les facteurs d’un violent embrasement social sont réunis. Crise économique, immigration de masse et insécurité, passivité et cynisme politiques… Aujourd’hui, les « esprits éveillés » sont prêts à en découdre avec ceux qui pourrissent notre pays.
Causeur. Toute votre œuvre tourne autour de ce qui va mal en France – violence, déclassement, crise identitaire. Que feriez-vous de votre vie si la France allait bien ?
Laurent Obertone. Je me pose assez souvent la question. J’ai beaucoup de projets d’écriture positifs ! J’aimerais avoir la légèreté d’esprit pour écrire des fables par exemple. Je suis moins pessimiste que ce que vous croyez !
C’est mal imité ! Après le terrible meurtre de Lola, vous avez écrit que, si rien ne se passait maintenant, rien ne se passerait jamais… Croyez-vous vraiment que quelque chose va se passer ?
Il y aura encore beaucoup de crimes comme celui-ci. La mobilisation populaire, diabolisée avec acharnement, a eu le mérite de pousser les médias à parler pendant quelques jours d’une infime part du problème, à savoir le scandale des OQTF. Mais le principal objectif de l’État est de faire oublier son incompétence, certainement pas de corriger le tir.
De mon point de vue, il n’y a rien à attendre du citoyen moyen, conditionné par ses écrans, très réceptif au chantage à la « décence », cette énième lâcheté pour refuser de voir et de dire, ce diktat du silence transformé en vertu citoyenne.
En revanche, la colère et la détermination montent chez les esprits éveillés, et il sera de plus en plus difficile de la réfréner.
Au-delà de l’ensauvagement, on a le sentiment que rien ne marche en France. Avons-nous tort de parler de tiers-mondisation de la France ?
Non, bien sûr. En important massivement sur notre sol des populations du tiers-monde, tout en s’appliquant à casser notre éducation et notre justice, on se retrouve bien évidemment avec un tiers-monde plus vrai que nature. L’appeler « chance » et « vivre ensemble » ne fait que souligner l’immensité de l’écart entre les illusions et les réalités.
Votre livre est une fiction, mais il reprend les thèmes que vous explorez dans vos essais. L’apocalypse que vous décrivez est-elle un scénario plausible ?
Il l’est de plus en plus, comme le suggérait la tribune des généraux sur le délitement de notre pays. J’ai eu beaucoup de discussions avec des gens du renseignement bien informés, qui pensent que nous allons au-devant de très graves problèmes. Tous les ingrédients d’une déflagration sont dans le saladier, on n’a plus qu’à touiller !
Le scénario de Houellebecq d’une soumission lente n’est-il pas plus plausible, dès lors qu’en majorité, nous avons peur de la violence ?
Je croyais aussi à une longue dégringolade. D’ailleurs, la plupart des gens voteraient plutôt pour ce scénario, ils préfèrent mourir placidement ; mais beaucoup de réalités (endettement, économie, social, etc.) commencent à se condenser et on voit de moins en moins comment tout cela pourra tenir, notamment économiquement. Dans ma trilogie, l’élément déclencheur, ce sont les banlieues, mais l’étincelle pourrait tout aussi bien venir de l’économie.
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Qu’entendez-vous par là ?
Une cessation de paiement majeure, une crise énergétique qui nous confronterait vraiment à la réalité d’un État en ruines. Cela me semble encore plus probable que l’embrasement des banlieues, mais je ne suis pas sûr que les problèmes économiques intéressent autant le lectorat. De toute façon, tous les problèmes se nourrissent les uns les autres.
On a tout de même le sentiment qu’il existe déjà une guerre ethnique à bas bruit.
Je préfère le mot guérilla, on n’en est pas au stade de la guerre. Ne serait-ce que parce qu’il n’y a pas de cohésion des populations extra-européennes contre les autochtones, qui sont eux-mêmes archidivisés. De plus, en cas d’embrasement, Monsieur Moyen regardera le match à la télé, et je ne sais pas si les gangs seraient capables de mobiliser les jeunes qu’ils arrosent habituellement avec l’argent du trafic. La réponse de l’État sera comme toujours très faible, relevant avant tout de la communication. La terreur d’une simple bavure dans une course-poursuite paralyse déjà tout le système, alors gérer sérieusement un conflit ouvert, c’est carrément impensable.
Vous connaissez bien la banlieue ?
J’ai grandi dans la campagne jurassienne, mais la diversité m’a rattrapé assez vite. Il y a dans le Jura et le Doubs beaucoup de communautés, notamment maghrébines, qui vivent là depuis longtemps. Mais la banlieue en tant que telle, je n’y ai jamais vécu. En revanche, j’ai rencontré et interrogé beaucoup de gens qui y vivent.
