Alain Finkielkraut, Brésil, Éleveurs vs prédateurs, Philippe Val, Paul Morand, vin: notre numéro d’été est en vente
Un spectre enchante le monde : le tourisme. Arpenter la planète pour en tirer des selfies au risque de la dévaster est devenu un droit de l’homme. Pour apaiser nos consciences certains écolos imaginent réconcilier nature et tourisme en transformant une partie de nos campagnes en réserves naturelles payantes. De Versailles à la Lozère, rien ne nous sera épargné.
Le monde est à vous… hélas
Mais ne nous flagellons pas trop. Comme l’indique Elisabeth Lévy, « Que l’on ne croie pas que ce monstre enfanté par la démocratisation de la consommation serait l’apanage de l’Occident. De Pékin à Riyad, de Kuala Lumpur à La Havane, des fonctionnaires se creusent le citron pour rendre attractives, accessibles et rentables, en un mot pour « valoriser », les merveilles créées par le génie humain ou divin, désormais répertoriées en tant que sites » sans autre forme de respect pour l’environnement et le patrimoine. « Cependant, les affaires de gros sous n’expliquent pas à elles seules la tolérance dérogatoire dont bénéficie le touriste, quand le travailleur est désigné comme l’agent de la catastrophe climatique. C’est qu’à l’ère du low cost et d’internet, arpenter la planète est devenu un droit de l’homme, peut-être le seul qui soit aujourd’hui supérieur en dignité à celui de la planète elle-même. Le touriste a tous les droits, y compris celui de réclamer que, dans les cathédrales, les heures des messes soient adaptées pour ne pas trop le gêner », persifle notre directrice de la rédaction. Avec notre esprit sarcastique, nous vous avons donc concocté tout un dossier d’été autour du cauchemar des vacances, ce rêve que tant d’entre nous caressaient lorsqu’il était encore inaccessible aux masses.
>>> Lire le magazine <<<
Les loups sont entrés dans nos vies
Dans notre pays jamais à court d’idées, faute de pétrole, le tourisme s’étendra bientôt à des terrains jusqu’alors relativement préservés : nos campagnes. Grâce à l’enquête de Tristan Corbier, vous saurez tout sur ces technocrates écolos qui voudraient transformer les Alpes, les Pyrénées, voire le Jura ou les Vosges en immenses réserves naturelles peuplées de prédateurs disparus. Bien évidemment, le ministère de la transition écologique voit d’un bon œil ce projet aux retombées touristiques juteuses. Au loup ! Pour la peine, même José Bové se joint à notre appel en prenant la défense des éleveurs menacés par cette mode de l’ensauvagement. Pour la zootechnicienne Jocelyne Porcher, les militants animalistes rêvent d’éradiquer l’élevage des animaux. Cette grave erreur nous ferait tourner le dos à dix mille ans d’histoire au profit de la viande in vitro et du lait issu de levures OGM. Et Pierre Lamalattie de nous rappeler que ces projets s’inscrivent dans un mouvement de fond. De la Bretagne à la Corse, les espaces agricoles perdent en effet chaque année du terrain au profit de la forêt. Ce mouvement bouscule de plein fouet les habitants traditionnels des campagnes mais attire néo-ruraux et touristes friands de grands mammifères. Interrogé dans nos colonnes, l’éleveur de vaches bio Grégoire Laugier rappelle que l’aménagement de nos campagnes offre un l’environnement idéal à certains petits animaux comme l’hirondelle et les petits mammifères. A contrario, la réintroduction de l’ours et du loup pourrait perturber cet écosystème façonné par des siècles d’agriculture.
Versailles débordé
Retour en région parisienne, épicentre du tourisme français. Comme nous l’apprend Paulina Dalmayer dans son reportage, le château de Versailles n’est subventionné qu’à hauteur de 18% par l’Etat. Or, pour boucler son budget, ce joyau de l’architecture française compte sur le mécénat et les revenus du tourisme. Mais ses 4.5 millions de visiteurs annuels l’endommagent, engendrant de lourdes dépenses d’entretien. La poule et l’œuf… Aux pieds de la Tour Eiffel, le site touristique le plus visité de France qu’est le jardin du Champ-de-Mars accueille de nombreux événements commerciaux qui en dégradent les pelouses. La responsabilité de son entretien incombe à la mairie de Paris qui concocte un énième projet de piétonnisation.
L’affaire Angot
Comme dans les salles obscures d’antan, passons aux actualités. Rien ne va plus entre le président brésilien Jair Bolsonaro et les tenants de l’ordre établi. Alors que les officiers de l’armée campent sur la défense de l’Etat de droit, les bolsonaristes fanatiques rêvent de détruire le système avec l’appui virtuel des foules galvanisées sur Twitter. Réagissant à l’affaire Angot, notre grognard Cyril Bennasar rue dans les brancards. Car en déclarant la destruction des Juifs d’Europe incomparable à l’esclavage des Africains, Christine Angot a suscité la colère des associations noires. Dans notre pays communautarisé, les susceptibilités prennent désormais le pas sur la réalité historique. C’est oublier que l’étude de la Shoah ne vise pas à donner aux juifs un ascendant sur le monde mais à éveiller les consciences. Un argument que pourrait reprendre à son compte Alain Finkielkraut, dont L’esprit de l’escalier s’en prend aux ravis de la crèche progressistes.
Terminons par la culture avec le maître de ces lieux nommé Jérôme Leroy. Notre rédacteur en chef a lu l’anthologie des voyages de Paul Morand. Ce cosmopolite génial rappelle que l’uniformisation du monde n’est pas une menace nouvelle. Pour retrouver l’essence du voyage, encore faut-il accepter qu’il soit une expérience intime… Enfin, l’auteur de Tu finiras clochard, comme ton Zola, Philippe Val, se raconte. De son duo humoristique avec Font à la direction de France Inter en passant par Charlie hebdo, l’essayiste a vu une grande partie de la gauche renoncer à l’universalisme. Triste fin, que l’on oubliera avec Emmanuel Tresmontant grâce aux nectars de ses amis vignerons, derniers poètes de notre époque. Santé !
>>> Lire le magazine <<<
Ré-ensauvageons la France: Plaidoyer pour une nature sauvage et libre
Price: 21,00 €
21 used & new available from 16,81 €
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !