Le réglementarisme de l’État a toujours échoué à protéger les travailleurs et travailleuses du sexe
Depuis qu’elle est « ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes », Élisabeth Moreno défend bec et ongles la loi d’avril 2016 visant à « renforcer la lutte contre le système prostitutionnel » à travers la pénalisation des clients et la « création d’un parcours de sortie de la prostitution ». Cinq ans plus tard, elle souhaite mener plus loin cette croisade en développant sa mission de reconversion professionnelle. Cette immixtion de l’État nounou dans les affaires des filles de joie n’est pas du goût de tous.
Fausse bonne idée
Le 2 juin, le Syndicat du travail sexuel en France (Strass) a fait publier sur la toile un « Manifeste féministe pro-droits des travailleurs et travailleuses du sexe ». Signé par une pléthore d’associations, de travailleurs sexuels et de personnes engagées aux côtés de ces derniers, ce long texte ne mâche pas ses mots. « Fausse bonne idée, la pénalisation des clients pousse les travailleur.se.s du sexe à exercer dans des lieux encore plus isolés et reculés », tonnent les militants, avant de fustiger « le réglementarisme » de l’État qui, soulignent-ils, « a toujours échoué à protéger les travailleur.se.s du sexe ».
« L’arsenal législatif de droit commun visant la traite, l’exploitation, le travail forcé, l’esclavagisme et les violences existe déjà et doit pouvoir être mobilisé », rappellent-ils, estimant que « les politiques publiques restrictives actuelles dirigées ou conditionnées à la sortie de la prostitution mettent de côté la vaste majorité des personnes pour lesquelles ces dispositifs ne sont pas adéquats ». Enfin, les militants lancent que « le féminisme pute n’est pas un oxymore », ajoutant que « le travail du sexe s’inscrit dans le combat pour la reconnaissance du travail des femmes ».
Un message lapidaire qui risque de donner de l’urticaire aux féministes autoproclamés. Quant aux velléités purificatrices de la ministre, elles pourraient finir par provoquer une grève générale de ces « travailleur.se.s du sexe ».