Thierry Breton ou l’ambition comme dernier refuge de l’échec
Alors que l’Europe renouvelle son exécutif, Thierry Breton bénéficie du soutien de Macron pour être reconduit à son poste de commissaire au Marché intérieur. Il en a bien besoin. Il est en effet peu apprécié par la présidente de la Commission, dont il lorgne la place avec une insistance dépourvue de finesse, mais il est surtout discrédité par son manque de sens politique et ses échecs en termes de réalisations. Son récent bras de fer avec Elon Musk a non seulement fini en humiliation pour lui, mais a réussi de surcroît à créer un grave incident diplomatique : le Congrès américain lui reproche dans un courrier cinglant d’entraver la démocratie en s’immisçant dans la campagne présidentielle américaine. Comme ancien président d’Atos, sa gestion alliant acquisitions mal pensées et ratages technologiques a conduit à la perte de ce qui aurait pu être un champion industriel pour la France. Aujourd’hui l’entreprise est sur le point d’être rachetée par un milliardaire tchèque alors qu’elle est un des outils de la souveraineté française : ses logiciels sont essentiels à la politique de dissuasion nucléaire.
Tout ce qu’il met en avant pour se pousser du col est à l’avenant. La politique de réindustrialisation dont il se vante d’être l’acteur déterminant est un des grands impensés stratégiques de l’UE, qui se montre incapable de s’accorder sur des priorités ou de soutenir son industrie par une véritable politique de coopération. La seule chose que l’Europe crée en masse, ce sont des consommateurs de moins en moins capables de produire de la richesse. Quant à la création d’une stratégie de défense commune fondée sur la préférence communautaire, ambition qu’il s’attribue également, l’idée n’existe que sur le papier. La situation calamiteuse du projet de char européen en témoigne.
Le seul domaine où Thierry Breton apparaît pertinent est son activité d’auteur de science-fiction. Dans Softwar (1984), il dépeint un avenir où le destin de l’Europe est entre les mains des Américains et des Russes. Sans voir qu’il est l’incarnation même de ce déclin, lui dont le rêve est de faire de l’Europe un empire où la réglementation tatillonne demeure le seul horizon de l’action politique.