De l’islamophobie comme paravent


De l’islamophobie comme paravent

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Vendredi dernier, en cinq points de la planète et en l’espace de quelques heures, la peste verte du djihadisme salafiste a frappé, faisant plusieurs centaines de morts. Sur une plage tunisienne, dans une mosquée du Koweït, dans une base de la mission de l’Union africaine en Somalie, dans une zone industrielle de l’Isère. Total : une centaines de victimes, sans compter la dernière offensive de l’EI sur Kobané qui s’est achevée par plus de 200 morts et, heureusement, une défaite des djihadistes.

Mais, par un mécanisme d’auto-défense psychologique, probablement pour se rassurer, certains commentateurs expliquent que cette vague d’attentats serait due à l’anniversaire de la déclaration du califat par Aboubaker Al-Bagdadi le 29 juin 2014. Peut-être. Qu’importe. Ce qu’il faut surtout expliquer, encore et toujours, c’est que les djihadistes de l’EI et consorts ont un objectif : la conquête du monde et l’application de la charia.

Pour ce faire, les salafistes appliquent avec un succès inquiétant deux stratégies :

  • la colonisation de territoires dont ils asservissent et convertissent de force les populations ou à défaut, les exterminent, et dont ils pillent les richesses.
  • l’implantation de cellules dormantes là où ils ne peuvent pas encore faire la guerre et qu’ils réveillent selon leur propre agenda pour des opérations terroristes.

En France, les gouvernements successifs ont abandonné les banlieues aux mains de ces derniers en échange de la paix sociale. Moins de drogue et moins de criminalité en contrepartie d’un blanc-seing sur leurs activités. Et de peur d’un ostracisme teinté d’islamophobie, dans l’espoir de sécuriser un vote local, régional mais aussi national, ces mêmes gouvernements ont fermé les yeux sur la montée du fondamentalisme musulman dans le monde et ont minimisé ses ravages en France.

Il est en effet difficile de lutter efficacement contre l’idéologie salafiste de certains pays qui ont financé l’EI – et peut-être le font-il encore – et les autoriser parallèlement à acquérir des hôtels de luxe, des clubs de foot ou de handball, à prendre des participations dans des groupes côtés au CAC 40, devenir le sponsor de grands prix hippiques…

La dernière action terroriste en France s’est donc produite le 26 juin dernier. Un homme de 35 ans a lancé sa voiture contre un entrepôt de bouteilles de gaz et d’acétone après avoir pris soins, tout de même, d’égorger et décapiter son employeur et d’accrocher la tête de ce dernier au grillage de l’usine entre deux drapeaux de l’EI, un noir et un blanc sur lesquels on pouvait lire la profession de foi musulmane. Il aurait enfin crié « Allahou Akbar » lors de son interpellation.

C’est ce que l’on appelle en droit des indices graves et concordants. Cela n’a pas empêché un journaliste d’une chaine d’information continue de se demander si, à tout hasard, il ne s’agirait pas d’un règlement de comptes…

À quand la thèse du déséquilibré mental? Pour bientôt manifestement car il semblerait que le suspect ait déclaré pendant sa garde à vue qu’il avait en réalité tenté de se suicider et de maquiller son geste en attentat terroriste en raison de tensions avec son employeur. Embauché au mois de mars 2015 seulement, on peine à imaginer le type de « tensions » susceptibles, en trois mois, de pousser un employé à décapiter son patron et accrocher sa tête au grillage d’une usine. Sauf s’il est fou, bien sûr…

Afin de ne pas affoler la population ou par un exercice stupéfiant d’auto-conviction, les journalistes et les experts qui se relayent sur les plateaux des journaux télévisés évoquent le loup solitaire.

Un bref rappel s’impose. Repéré à 24 ans pour ses fréquentations salafistes, fiché « S » (pour Sûreté de l’Etat) de 2006 à 2008, sorti du radar jusqu’en 2011 puis à nouveau surveillé ponctuellement jusqu’en 2014 pour des signes de radicalisation, Yassin S. se serait photographié avec la tête coupée de sa victime avant de l’envoyer à un correspondant se trouvant actuellement dans des zones de combat en Syrie. Voilà pour la solitude du loup. Espérons qu’ils ne chassent pas en meute.

Suite à ce drame atroce, et soucieux de préserver la cohésion nationale, le Président de la République a appelé à « ne pas créer de divisions inutiles, de suspicions qui seraient intolérables ». En d’autres termes, « Pas d’amalgame ».

Pas d’amalgame, bien sûr. Mais pourquoi ne pas dire la vérité tout simplement. Qu’il existe aujourd’hui un fléau islamiste qu’il faut combattre sans relâche. Que cet islamisme n’est pas la conséquence d’une islamophobie rampante mais bien un phénomène autonome, une politique de colonisation expansionniste fondée sur une application rigoureuse de l’Islam du VIIème siècle. Les chiites, les sectes pré-islamiques et autres apostats, que l’EI et Al-Nosra décapitent à l’envi en Syrie et en Irak, sont-ils de dangereux islamophobes? Que ce n’est pas être islamophobe que d’observer que les politiques migratoires française et européenne nécessitent d’être repensées, que les prêches des mosquées et des salles de prières musulmanes doivent être faits en français, que les imams doivent être formés en France, que dans une république laïque comme la nôtre, le fait religieux n’a pas à être imposé aux autres.

Les Français ne sont ni ontologiquement racistes ni idiots. Ils ne seront pas plus nombreux à faire des amalgames avant qu’après la commission d’actes abjects comme celui de Yassin S. Ils désespéreront vite, en revanche, si les gouvernants s’obstinent à vouloir ne pas voir. Quant à ceux qui font des amalgames, ils sont de la même trempe que ceux qui amalgament Juifs, sionistes, Israël et complots…

Il est grand temps d’enlever les œillères et de regarder les choses comme elles sont et non comme on voudrait qu’elles soient. La lâcheté ne paye pas. Elle humilie et laisse des tâches indélébiles dans la mémoire collective. Depuis le temps, les autorités françaises devraient le savoir.

*Photo: SIMON ISABELLE/SIPA.00489031_000005.



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