Tariq Ramadan, le semeur de corruption


Tariq Ramadan, le semeur de corruption

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Sans doute beaucoup d’événements ont-ils eu lieu entre mars 2012 et mai 2014. Tant d’événements, certes, mais tant de mensonges çà et là, dispersés, disséminés, comme des mauvaises graines dans le but de nous éloigner toutes et tous de l’essentiel. Oui, entre les dates mentionnées, c’est-à-dire entre les assassinats commis par Mohammed Merah et celui commis par Mehdi Nemmouche fin mai, la vérité, à mes yeux, est la même, tristement impressionnante : le fascisme rampe et tout y contribue, y compris les rêves les plus beaux de liberté, de dignité, de progrès.

Comme il ne faut pas trop tourner autour du pot, je voudrais m’en prendre tout de go à ce qui impunément alimente la haine : « Les deux touristes visés à Bruxelles travaillaient pour les services secrets israéliens selon Le Soir et d’autres sources qui se recoupent. Le gouvernement ne commente pas. Par hasard. S’agit-il d’antisémitisme ou de manœuvre de diversion quant aux vrais motifs et aux exécutants ? On condamne les assassinats d’innocents et tous les racismes, sans exception, mais il faut aussi cesser de nous prendre pour des imbéciles. »

Oui, ces quelques phrases sont de Tariq Ramadan, publiées sur le mur de son Facebook officiel, le 27 mai 2014. Cette page, la sienne, compte plus de 700 mille adhérents. Page digne d’une rock star. Ou d’une personnalité politique. Or, M. Ramadan est sûrement les deux. Peut-être plus, à mon avis, dans la mesure où le « statut » qui précède témoigne de l’opprobre en cours, passé et hélas à venir, l’antisémitisme étant fédérateur, rassembleur, bénéfique même. Car, s’il suffit de prononcer les mots Israël, juif, antisémitisme, racisme et complot, pour que tout change : la linéarité de l’événementiel prend la forme, circulaire, de la queue de poisson, et l’on ne s’en sort plus, à juste titre, afin que là où les théories du complot foisonnent amplement.

Tout cela est néanmoins triste, pour ne pas dire autre chose. Le « mais » de la dernière phrase de M. Ramadan en dit long sur tout le reste. M. Ramadan, dont les commentaires sur sa page Facebook sont multilingues, y compris en arabe, doit savoir qu’un grand linguiste musulman du IXe siècle, auquel Noam Chomsky et tant d’autres contemporains doivent énormément, a expliqué dans une sorte de « bon usage de la langue », donc des valeurs humaines portées et véhiculées par la langue, que la concession mais est une sorte de privation allant jusqu’à annuler tout ce qui précède de positif. Jugez-en vous-mêmes : « Oui, je t’aime et tu es ma vie, mais il y a eu cette histoire et j’ai dérapé… »

Nulle excuse qui tienne, me semble-t-il, ni pour la personne fictive à laquelle je viens de donner la parole, ni à Tariq Ramadan, vu que l’assassinat de deux personnes à Bruxelles, si espionnes soient-elles, ne soit, somme toute, qu’un acte sanguinaire, autrement dit un crime, et que le reste relève de la simple haine qui se cache derrière la théorie du complot. À ce propos, je voudrais dire que nous pensons que ceux qui, comme Tariq Ramadan crient au complot, sont assurément celles qui le mieux en vivent, s’en alimentent, s’en servent au quotidien. J’avoue que je n’ai jamais réussi à lire en entier un seul livre de M. Ramadan. J’avoue également que je ne suis jamais parvenu à écouter ou à suivre l’une de ces innombrables conférences. J’avoue aussi que je ne pense pas que M. Ramadan soit représentatif de quelque pensée que cela soit. M. Ramadan est un faiseur, un meneur, un prédicateur, et tout ce qu’il porte a été dit il y a longtemps. Certes, lui, a la subtilité de le relever, d’y mettre de la forme, du goût, de le rendre appétissant même, mais cela ne vaut que pour les affamés en quête d’identité erronée, de religion et de foi dévoyées, de repères désaxés.

Je n’ai nullement envie, ici, c’est-à-dire dans ce texte, de débattre de foi ou de questions religieuses. C’est que je vis au quotidien avec des personnes croyantes et pieuses. Moi qui ne le suis pas par rapport aux dogmes les plus islamiques, et non simplement musulmans, je puis dire que mon quotidien, aussi bien chez moi que dans mon pays, se passe harmonieusement. Mais il suffit que les propos des Ramadan et autres prédicateurs du Nord, de l’Est et d’ailleurs s’en mêlent pour que  la désharmonie ait lieu et le sang finisse par couler. La question religieuse, oui, ne doit pas être abordée et pour cause. Il faut, à mon sens, parler de ce qui rassemble et non le contraire. En parler signifie douter de la valeur qui importe le plus, celle de la laïcité. C’est que l’homme, le mari, le père, l’enseignant et le poète que je suis, entre autres, considère qu’être juif, chrétien et musulman est un droit privé, alors que tout le reste est un droit universel.

Ce droit, cela va de soi, est à démontrer à tout instant, au sens où il est l’instance suprême capable de construire les règles séantes au vivre-ensemble dont nous avons besoin, si nous ne voulons pas être en guerre. Mais les Merah, les Nemmouche, ainsi que les commanditaires de blanc vêtus, qui se planquent derrière les exécutants, cherchent la guerre, la cultivent, la vivent même à tout instant. Elles existent, car il n’est nulle théorie du complot ou que sais-je encore ici. Cette existence, la leur, pour moi, qui suis d’ici, donc de l’autre bord, a un cours, et non un sens. C’est peut-être le sens auquel croient des fous riches voulant faire parler d’eux, mais c’est sûrement le cours de l’histoire, la petite, contre l’Histoire, Clio, puisqu’il faut que les barbares fassent la guerre aux civilisés. Ce sont les fascismes, les nazismes, les tribalismes et autres clanismes à l’œuvre contre la civilisation, elle, qui conduit les peuples, à l’abri des genres, des races, des religions et des sectarismes, ensemble et à l’unanimité, au nom du salut et de la paix, lesquels existent et doivent être renforcés.

Sachez-le : les Merah et les Nemmouche tueront encore et toujours tant que les Ramadan ne rendront pas de comptes. Le Professeur Mohamed Talbi l’avait dit à M. Ramadan à Tunis : « Vous êtes un islamiste ! » Cela signifie qu’il est un semeur de corruption. Moi, je ne parlerai pas au nom de l’islam contre l’islamisme. Cette cause n’est pas la mienne et je n’y crois pas. Moi, je parlerai au nom de l’Humanité envers et contre le droit-de-l’hommisme, afin de séparer le bon grain de l’ivraie et d’en finir avec l’islamisme et tant d’autres maladies qui doivent être, comme la peste, le choléra et j’en passe, combattues par le glaive et la plume. Il est temps de revenir à Voltaire et aux Lumières. Il est temps d’écraser l’infâme !

*Photo : Kathy Willens/AP/SIPA. AP20925911_000002. 



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est l’auteur d’une quinzaine d’ouvrages. Poète, prosateur, essayiste, traducteur et chroniqueur littéraire, il enseigne la langue, la civilisation et la littérature françaises à l’École Normale Supérieure de Tunis.

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