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Syrie-Turquie : des rebelles peuvent en cacher d’autres


Avant le déclenchement de la bataille d’Alep entre le pouvoir légaliste syrien et la guérilla qui se prévaut d’une légitimité démocratique, le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré que son pays se réservait le droit de pénétrer en territoire syrien pour y traquer les « terroristes du PKK » qui prépareraient des opérations antiturques. Dans la foulée, la page Facebook officielle de Bachar Al-Assad – hyperactive depuis 14 mois et qu’on imagine mal gérée par un fan freelance du président syrien – rétorquait vertement : « si la Turquie entend chasser les rebelles kurdes sur notre territoire, nous avons également le droit de traquer les rebelles qui officient sur le territoire turc ». Il est vrai que l’Armée Syrienne Libre utilise la Turquie comme base-arrière stratégique et logistique, ce qui n’est pas un élément négligeable sachant qu’Alep est à seulement trente-cinq kilomètres de la frontière.

Du point de vue strictement légaliste, les hommes de l’opposition armée qui attaquent postes de police, sièges de l’armée et enlèvent les dignitaires réputés proches du pouvoir, mais aussi certains pèlerins chiites libanais pour s’en servir de monnaie d’échange avec le Hezbollah, sont au régime de Damas ce que le PKK est à la République turque, la vitrine légale en moins.

On nous rétorquera à raison qu’Ankara ne réprime pas sauvagement les manifestations et n’étouffe pas le moindre début de contestation politique, pas plus qu’Erdogan n’a assis son pouvoir sur une dictature présidentielle à parti unique. C’est là que le bât blesse : le clan Assad, qui a accumulé crimes et erreurs politiques, mérite sans doute ce qui lui arrive, ce qui n’exonère d’ailleurs pas l’opposition de ses responsabilités, notamment vis-à-vis des minorités religieuses qui paient déjà un lourd tribut à la « révolution ».

Mais la Syrie, véritable perdante des années Assad comme de la rotation politique qui s’annonce, n’en méritait pas tant. Seul lot de consolation, dans la région kurde syrienne de la Jezireh, la transition s’effectue pacifiquement, les caciques baathistes ayant déserté leurs casernes pour défendre d’autres gouvernorats. Si les « rebelles » kurdes syriens parviennent à accomplir une révolution sans effusion de sang ni nettoyage ethnoreligieux, c’est sans doute aussi parce que leur nation est homogène et déjà solidement constituée, à la différence de la mosaïque syrienne. Ce fait est certainement regrettable mais force est de constater que, de Tunis au Caire, les « révolutions arabes » s’accommodent mal de la diversité. Que les laudateurs aveugles de ces deux concepts discutables se le tiennent pour dit.



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