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Limogeage à Saint-Jean de Passy: qu’est-ce que « l’éducation intégrale » ?

Un peu trop "militaire" au goût de certains


Limogeage à Saint-Jean de Passy: qu’est-ce que « l’éducation intégrale » ?
École privée St Jean de Passy © ALI/SIPA Numéro de reportage : 00537234_000002

Le 14 avril dernier, le directeur de Saint-Jean de Passy a été brusquement mis à pied. Un personnage emblématique de cet établissement scolaire d’exception du très chic seizième arrondissement…. 


 

Si le conseil d’administration de l’école a justifié le limogeage de François-Xavier Clément en pointant des « pratiques managériales dysfonctionnelles », c’est plus probablement les méthodes pédagogiques du chef d’établissement qui sont en cause. Se revendiquant de « l’éducation intégrale », ce catholique convaincu a donné à cette école une empreinte particulière, des résultats exceptionnels, mais il a aussi récolté certaines critiques.

Depuis plusieurs années, la pédagogie appliquée à Saint-Jean de Passy a largement développé l’attractivité de cet établissement catholique de l’ouest de la capitale. Il y a d’ailleurs quelques semaines, le Figaro publiait un reportage élogieux sur « l’éducation intégrale » appliquée par son directeur. Uniforme, un enseignement rigoureux et un accompagnement particulier pour chaque élève, le tout accompagné par des cours de catéchèses obligatoires, tout le long de la scolarité. Avec la prétention de former « le cerveau, mais aussi le cœur et l’âme », le directeur de l’établissement pouvait s’enorgueillir de très bons résultats : aux dernières sessions du baccalauréat, 99% des élèves du lycée remportaient leur diplôme avec mention.

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Un virage vers un enseignement plus traditionnel couronné de succès, mais qui aurait aussi suscité quelques tensions : en 2018, un article du Parisien relatait les tensions internes à l’établissement, une partie du personnel éducatif dénonçant une « dérive national-catholique ». En mars dernier, le Figaro soulignait que la ligne pédagogique « ne plaisait pas à tout le monde et certains parents d’élèves grinçaient des dents ». « On s’inquiète de la tournure que le lycée est en train de prendre, ça devient un peu trop militaire à mon goût » aurait ainsi déclaré la mère d’un élève au quotidien de droite.

Hasard ou coïncidence, un mois plus tard, dans des circonstances encore très nébuleuses, le conseil d’administration de l’établissement a fait paraître un communiqué qui pointait du doigt « l’existence de pratiques managériales dysfonctionnelles portant atteinte à la santé et à la sécurité physique et psychique des collaborateurs ». Quelques heures plus tôt, un huissier était dépêché au domicile du directeur François-Xavier Clément, lui annonçant sa mise à pied.

Une situation pour l’instant très confuse, tant les reproches adressés au chef d’établissement semblent servir de prétexte pour évincer un directeur d’établissement aux méthodes résolument conservatrices. C’est en tout cas la conviction du collectif de parents d’élèves « Tous unis autour du Directeur », qui dans son dernier communiqué pointe du doigt « un courant d’opposition interne purement idéologique, lequel n’a rien à voir avec des compétences managériales. ». Un audit aurait été commandé au mois de janvier dernier au cabinet AlterHego par le conseil d’administration. Alors que les conclusions de ce rapport n’ont jamais été publiées et qu’un nombre très restreint de membres du personnel avaient alors été interrogés, les soutiens au directeur dénoncent une cabale montée de toute pièce. Pour ces derniers, cet audit justifie a posteriori un licenciement motivé en réalité par des désaccords idéologiques. Mais pourquoi la méthode de « l’Éducation Intégrale » de François-Xavier Clément fait-elle polémique ?

« L’Éducation Intégrale » : une vision catholique de l’enseignement scolaire

En se revendiquant de « l’Éducation intégrale », le directeur de Saint-Jean de Passy s’est donc exposé à un certain nombre de critiques, qui pourraient bien expliquer sa destitution aujourd’hui. Mais de quoi parle-t-on ? Dans le Figaro publié en mars dernier, François-Xavier Clément revendique s’inscrire dans les pas des « Frères des écoles chrétiennes » qui fondèrent l’établissement en 1839. Un ordre religieux laïc, consacré à l’éducation et l’enseignement.

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Et de fait, « l’Éducation intégrale » est avant tout un concept catholique, qui cherche à détacher l’enseignement traditionnel de sa dimension purement « matérielle ». Au-delà d’une éducation restreinte à la seule acquisition de compétentes et de savoirs, l’Église défend un enseignement aussi capable « de faire grandir l’homme dans son intégralité ». Une vision qui s’inscrit dans la morale catholique, qui considère l’homme comme un être à la fois corporel, mais aussi spirituel.

Dans une conférence organisée en 2006 au siège de l’Unesco sur le thème de l’Éducation, le Saint-Siège avait ainsi rappelé sa vision de l’enseignement : la scolarité n’est pas seulement l’occasion d’apprendre des connaissances pour s’intégrer au monde du travail et à la société ; c’est aussi un outil d’épanouissement personnel et spirituel. Une perspective qui accorde donc une large place à l’enseignement religieux, mais aussi aux humanités (histoire, littérature…). Le tout avec un accompagnement adapté à chaque élève, aucun d’entre eux ne devant être « abandonné » en cours de scolarité.

La pédagogie appliquée depuis 2015 à Saint-Jean de Passy semble résolument s’inscrire dans cette démarche. Une approche atypique pour les défenseurs de l’ancien directeur de l’établissement, anachronique pour ses opposants. Dans le prestigieux lycée parisien, le bras de fer ne fait que commencer…



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