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Squatteurs: une loi « ignoble » pour la Nupes…

Ma vie à l'Assemblée, la chronique d'Emmanuelle Ménard


Squatteurs: une loi « ignoble » pour la Nupes…
NICOLAS MESSYASZ/SIPA

L’esprit de Noël n’était pas vraiment de mise à l’Assemblée nationale en décembre. Tranches de vie parlementaire.


Squatteurs

L’Assemblée a adopté une proposition de loi contre les squatteurs et les impayés de loyers, visant à protéger davantage les propriétaires. Ce qui a donné lieu à un florilège de clichés et autres caricatures sur « les gentils squatteurs en très grande difficulté » forcément victimes de « méchants propriétaires »… Une loi « ignoble » selon les députés de la Nupes qui arguent que « personne ne squatte un logement par plaisir ». Là-dessus, nous pouvons être à peu près d’accord. Mais peut-être pourrait-on convenir a contrario qu’il n’est pas tout à fait normal que les squatteurs aient le droit d’attaquer en justice les propriétaires qui changent la serrure pour… violation de domicile ou que, dans le cas où le propriétaire chercherait à se faire justice lui-même en expulsant manu militari le squatteur peu scrupuleux, ce dernier risquera finalement une peine moins lourde que le propriétaire. Mais non, droite et gauche sont, sur ces sujets, tout bonnement irréconciliables. Mort au bon sens ! Longue vie à l’idéologie et aux postures électorales !

D.R.

Délestage

Lors des questions au gouvernement, le sujet brûlant des coupures d’électricité et autres délestages est bien sûr abordé. Surtout après les « propos maladroits » (dixit le gouvernement) du porte-parole d’Enedis, Laurent Méric, qui avait indiqué la veille que les patients à haut risque vital, ceux qui disposent d’un respirateur par exemple, pourraient eux aussi subir des coupures de courant. C’est Élisabeth Borne en personne qui répond en intimant aux députés de « cesser d’agiter les peurs ». À quand « les heures les plus sombres de notre histoire » ?

49.3

Jeudi 8 décembre, à 14 h 55, un défilé de voitures officielles et de CRS arrivent toutes sirènes hurlantes devant l’Assemblée nationale. Cinq minutes plus tard, devant un hémicycle aux trois quarts vide, Élisabeth Borne, toujours elle, annonce qu’elle utilise l’article 49.3 de la Constitution pour la huitième fois consécutive… Elle a gagné son pari : plus personne n’y prête attention. C’est l’indifférence générale quand on nous prédisait le peuple dans la rue. Jusqu’à quand ?

Adrien Quatennens

Le verdict est tombé : Adrien Quatennens a été condamné à quatre mois de prison avec sursis, mardi 13 décembre, pour des violences sur son ex-compagne. Dans la foulée, son groupe politique, La France insoumise, a indiqué que le député serait radié du groupe « pour une durée de quatre mois, jusqu’au 13 avril 2023 », et que « son retour dans le groupe parlementaire [serait] conditionné à l’engagement de suivre un stage de responsabilisation sur les violences faites aux femmes auprès d’associations féministes ».

Problème, Adrien Quatennens a exclu de démissionner de son poste de député et se retrouve donc automatiquement parmi les députés non-inscrits.

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Les bras m’en tombent… siéger à l’Assemblée nationale parmi les non-inscrits ne signifie pas être un rebut, un paria de l’Assemblée nationale ! Nous sommes actuellement quatre députés non inscrits : Véronique Besse, Nicolas Dupont-Aignan, David Habib et moi-même. Et nous avons un point commun : avoir choisi d’être non-inscrits. Chacun d’entre nous a été approché pour rejoindre un groupe politique – et même sollicité, pour l’un de nous quatre, pour prendre la coprésidence d’un de ces groupes –, mais nous avons tous choisi, individuellement, de rester libres.

Le simple fait que le député Quatennens, condamné par la justice, puisse siéger parmi nous est une offense aux valeurs d’indépendance et de liberté que nous nous efforçons d’incarner. Non, monsieur Quatennens, nous n’avons aucun point commun avec vous !

49.3 encore

Dimanche 11 décembre, devant un hémicycle à nouveau fortement clairsemé pour cette séance dominicale, Élisabeth Borne brandit pour la neuvièmefois le 49.3 afin de faire adopter l’ensemble du projet de loi des finances. Avec, tel un réflexe pavlovien, une nouvelle motion de censure, la neuvième également, issue de la gauche, afin de lutter contre « l’autoritarisme du gouvernement [qui] n’a pas de limite ». À cela, la Première ministre rétorque que la « multiplication des motions a considérablement restreint le temps des discussions » et questionne : « Finalement, pourquoi fuyez-vous les débats ? » Fou rire sur les bancs. L’hôpital se moque décidément de la charité… La question est grotesque. Fou rire qui finit par la gagner et fait figure d’aveu : même elle n’y croit pas…

Coupe du monde

Même l’Assemblée vit au rythme du football. Le soir de la demi-finale de la Coupe du monde contre le Maroc, les horaires ont été aménagés et la session du soir n’a repris qu’à 22 heures pour laisser les députés regarder le match jusqu’au bout. Et je tairai les noms de ceux qui visionnent, en douce, depuis l’hémicycle, sur leur téléphone portable, les rencontres footballistiques…

Crèche de Noël

Je ne résiste pas à l’idée de finir cette chronique par une histoire de Noël : celle de la crèche de Béziers bien sûr ! Qui m’a fait quitter l’Assemblée nationale un peu plus tôt que prévu puisque je voulais être présente pour son « exil forcé » de la mairie de Béziers. En effet, comme chaque année, nous avons installé une crèche dans la cour intérieure de l’hôtel de ville. Et comme presque chaque année, la Ligue des droits de l’homme ou les Libres Penseurs l’attaquent en justice au nom de la laïcité. Cette fois, devant le refus du préfet de nous poursuivre, nous avons eu droit à un référé devant le tribunal administratif de Montpellier par la Ligue des droits de l’homme. Nous avons été condamnés au nom d’un « préjudice grave et immédiat », et contraints de la retirer de l’hôtel de ville. Nous nous y étions préparés : la crèche est depuis longtemps sur roulettes pour la déplacer facilement… L’histoire est un éternel recommencement : deux mille plus tard, après avoir été refoulés d’une auberge à Bethléem, voici dons Joseph et Marie expulsés de la mairie de Béziers à la veille de Noël. Au nom des droits de l’homme qui plus est !

Janvier 2023 – Causeur #108

Article extrait du Magazine Causeur




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Ancienne députée

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