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Souvenirs orduriers du Big Bang


Souvenirs orduriers du Big Bang

Au début, comment dire, c’était chaud et dense, si tu veux… On entendait rien de spécial. Les trous noirs, pénards, reluquaient les microquasars et les trouvaient franchement binaires, entre nous. Leur calvitie pépère ne se laissait pas émouvoir par les collisions entre deux branes à la con et sans membre, fût-il ekpyrotique. La nucléosynthèse primordiale, eux, ils en avaient rien à secouer. Le corps de Schwarzschild remuait à peine : il avait, comme qui dirait, les astres occlus. On attendait le moment cinétique : tout le monde s’emmerdait dru. Et en plus, il pleuvait sur les ergorégions. Ça se dilatait parfois vers le rouge et on avait franchement l’impression de perdre son temps.[access capability= »lire_inedits »]

Et puis soudain, on a tous pété un boulon à six pans creux. On en avait tous ras la nouille de la censure cosmique : c’était pesant. On a sifflé un ballon de lithium, le patron nous a remis ça à l’hélium. Il faisait une chaleur pas possible, on puait des aisselles à plusieurs encablures. La densité de photons et de baryons était à peine croyable. Mais pour tout dire, ça nous dilatait l’électron sans nous remuer vraiment le positron.

Le fond cosmologique de neutrinos était pas beau à voir non plus. Ils étaient pas brillants, les neutrinos. Lorsque le thermomètre a indiqué 1 mégaélectronvolt, ces raclures se sont soudain mises à se découpler sans raison, ce qui valait quand même toujours mieux qu’un accouplement. Y’avait de l’annihilation dans l’air et les positrons en menaient pas large. Les neutrinos en venaient à douter de leur propre existence, et y z’avaient pas tort… Faut dire qu’ils avaient forcé sur l’anisotropie. Nous redoutions tous le spectre continu de la désintégration bêta. On a pas été déçu.

On a entendu comme un crissement glaireux, un froissement constant et épileptique des nanosecondes. C’est alors que le trou noir primordial où on créchait nous autres s’est dévissé la rate et les vertèbres comme un vieux bidet qui renâcle. Après, il a carrément retroussé ses poumons de néant, inventant leur envers dans un vomissement, un arrachement insoutenable et soudain de la plèvre de tout. Dégueulis de protons et d’épilotrons à la charnière sanieuse du vivant. Fission de fission de pute ! Le trou noir d’où qu’on vient a retroussé sa poche à néant, il a avalé son cul dans son cul dans son cul et encore, jusqu’à l’annulation dernière du tout dernier trou de balle par un retournement imprévu de la situation. Avec un crissement de verre, le végétal s’est subitement arraché au minéral, et on arrivait pas trop à y croire. Faut dire, sur le coup, ça nous a tous fait reprendre du poil de l’anté-bête. À peine un peu plus tard a commencé la gloire du royaume, une pluie pas croyable de grâce et de désastres et cette putain d’épidémie de langage et de temps.[/access]

Février 2011 · N°32

Article extrait du Magazine Causeur



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