Sans atteindre pour le moment les hauteurs progressistes de l’académie des Oscars, mais ça viendra !
Dans un article du 2 septembre, Télérama nous renseigne entre autres sur une nouvelle pratique instituée au Québec : le « 1+1 ». Cette parité progressiste, forcément progressiste, concerne le milieu cinématographique et a été mise en place par la Société de développement des entreprises culturelles (Sodec), organisme d’État. « Les producteurs peuvent déposer deux demandes de financement de longs métrages de fiction par an, à condition que l’un des deux soit écrit ou réalisé par une femme », précise la journaliste qui, enthousiaste, s’enflamme dans la foulée : « Le résultat ne s’est pas fait attendre. “Aujourd’hui, 50 % de nos décisions de financement concernent des projets de femmes scénaristes ou réalisatrices”, assure la directrice générale du cinéma et de la production télévisuelle à la Sodec. » Comme c’est curieux ! Après qu’on a obligé les boites de production à présenter au moins un film sur deux réalisé par une femme, il est arrivé qu’un film sur deux financé par la Sodec est un film réalisé par une femme…
Réalisatrices Équitables
Au détour de cet édifiant article, nous découvrons qu’il existe au Québec une association qui a rangé les combats des réalisatrices au côté de ceux de l’agriculture bio, du café éthique ou du chocolat déontologique, puisqu’elle s’appelle… Réalisatrices Équitables.
En allant sur le site de cette association, nous apprenons que « Réalisatrices Équitables se préoccupe beaucoup de l’image des femmes dans les médias, et cherche à sensibiliser le milieu des arts médiatiques à diversifier les personnages féminins comme masculins écrits et mis en scène par les créateurs d’ici et d’ailleurs, afin de s’éloigner des stéréotypes homme/femme. »
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Les membres de l’association s’adressant à des néophytes (au mieux), ou à des crétins (au pire), elles précisent très exactement ce qu’est une réalisatrice afin qu’il n’y ait aucune confusion possible : « C’est une créatrice. […] une artiste. […] Les tâches de cette personnes (sic) sont : choisir les comédiens ou les personnages et leur indiquer un style de jeu. Choisir les costumes, les décors et les lieux de tournage. Choisir le cadrage de l’image, son angle, son ambiance. Décider de la meilleure prise au montage, à quel rythme les images seront vues et sur quelle musique. Bref, tous les choix qui auront un impact sensoriel, visuel et sonore sur la manière dont le scénario ou le sujet sera perçu et compris par le spectateur. » Cela méritait d’être souligné, et ainsi aucun doute ne subsiste : une réalisatrice cinématographique québécoise n’est pas une cuisinière, un peintre en bâtiment, une présentatrice météo ou un chauffeur de bus, mais une personne qui réalise des films et fait des « choix qui auront un impact sensoriel, visuel et sonore. »
Troisième voie
Mais l’idée de progrès ne serait pas ce qu’elle est actuellement s’il n’était pas envisagé d’en repousser sans cesse les limites. « Avec son savoir ingénieux qui passe toute attente, l’homme progresse vers le mal ou vers le bien » (Sophocle, Antigone). Une troisième voie nous semble envisageable, celle de la bêtise. Pour preuve, la conclusion de l’article téléramesque : « Prochaine étape : la diversité. “Le féminisme qui a permis la mise en place de la parité est un féminisme de blanches (sic), conclut Myriam Verreault qui a mis en scène la communauté innue dans Kuessipan. Le combat n’est pas terminé, on ne peut pas se contenter de ça.” »
Sur le toujours fameux site québécois des Réalisatrices Équitables, tout est d’ailleurs prévu dans ce sens. La page « Mentorat et atelier pour les réalisatrices de la diversité » s’adresse spécifiquement aux réalisatrices « en début de carrière, récemment immigrée ou bien appartenant à une minorité ethno-culturelle ou à une Première Nation », et l’association « a mis sur pied un comité pour épauler les cinéastes femmes qui vivent de l’exclusion (sic) et qui aimeraient mieux comprendre le fonctionnement du milieu cinématographique et télévisuel québécois. »
Une illustration de plus du régime diversitaire
Mathieu Bock-Côté rappelle régulièrement ce qu’est devenu le Canada en général et ce que risque de devenir le Québec en particulier. Cet exemple cinématographique semble lui donner raison. Le régime diversitaire, cette « entreprise de réingénierie sociale et identitaire intégrale », s’installe partout où il le peut. Comme souvent, ce sont les milieux intellectuels et/ou artistiques qui œuvrent à détruire les fondamentaux universalistes et à conforter une idéologie qui distingue le féminisme et le féminisme « blanc », le cinéma et le cinéma des femmes, le cinéma des femmes et celui des femmes issues de la diversité, etc. jusqu’au délire.
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La France n’y échappe pas : « C’est une grande avancée, mais il faut aller encore plus loin pour la parité et la diversité dans le cinéma », déclare Frédérique Bredin, présidente du CNC, en présentant le premier bilan de « bonus parité » en mai 2019. [« Bonus parité ? » En clair : « plus t’as de femmes dans ton staff, plus t’as d’oseille, coco ! »] Comme le cinéma français n’a pas attendu la parité diversitaire pour devenir ce qu’il est et que le CNC cautionne ce cinéma indigent depuis des lustres, tous les désespoirs sont permis et le Sodec québécois n’a qu’à bien se tenir : à la course aux âneries paritaires et diversitaires, il n’est pas dit que le CNC français ne parvienne pas à la coiffer sur le poteau. Et que les deux réunis n’arrivent pas à supplanter un jour ou l’autre les nouvelles directives diversitaires de l’académie des Oscars. « Deux choses sont infinies, disait Einstein. L’univers et la bêtise humaine. Mais, en ce qui concerne l’univers, je n’ai pas encore acquis la certitude absolue. »
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