La mort de Simone Veil est l’occasion pour certains médias de la présenter comme une combattante pour « le droit à l’avortement ». Ceci est au mieux un contresens. Au pire un mensonge. Simone Veil affirmait expressément le contraire : si la loi « n’interdit plus, elle ne crée aucun droit à l’avortement »[tooltips content=’Toutes les citations proviennent du discours de Simone Veil à l’Assemblée nationale le 26 novembre 1974, rapporté par le Journal officiel du 27 novembre 1974.’]1[/tooltips]. A ses yeux, l’avortement demeurait un mal, certes parfois nécessaire, mais qu’il convenait d’« éviter à tout prix ».
IVG : la dissuasion nécessaire
Défendant son projet de loi devant l’Assemblée nationale le 26 novembre 1974, Simone Veil insistait : « Aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l’avortement. Il suffit d’écouter les femmes. C’est toujours un drame et cela restera toujours un drame. C’est pourquoi, si le projet qui vous est présenté tient compte de la situation de fait existante, s’il admet la possibilité d’une interruption de grossesse, c’est pour la contrôler et, autant que possible, en dissuader la femme ».
La nécessité de la dissuasion revient comme un leitmotiv tout au long du discours de Simone Veil. L’objectif répété de la loi était d’affirmer le caractère exceptionnel de l’avortement : « Je le dis avec toute ma conviction : l’avortement doit rester l’exception, l’ultime recours pour des situations sans issue. »
IVG : les garde-fous abolis
Tous les parlementaires qui se sont exprimés pour soutenir la loi l’ont fait dans la même perspective, quelle que soit leur appartenance politique.
Cependant, 40 ans après, tous les garde-fous institués par la loi Veil ont été progressivement abolis : non-remboursement par la sécurité sociale, interdiction de l’incitation à l’avortement, consultation psycho-sociale et information aux femmes pour les dissuader d’avorter, autorisation parentale pour les mineures, délai de 10 semaines de grossesse, délai de réflexion de sept jours, situation de détresse, pratique exclusivement par un médecin à l’hôpital, et en partie même le droit à l’objection de conscience des médecins et auxiliaires médicaux, tout cela a été progressivement supprimé.
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Toutes ces mesures avaient pour but de protéger les femmes et de leur « faire prendre conscience (…) de ce qu’il ne s’agit pas d’un acte normal ou banal, mais d’une décision grave qui ne peut être prise sans en avoir pesé les conséquences et qu’il convient d’éviter à tout prix ». Simone Veil insistait sur le fait que l’interruption de grossesse est un acte « que la société tolère mais qu’elle ne saurait ni prendre en charge ni encourager ».
La loi Veil n’établit aucun droit à l’IVG
Prétendre que l’avortement est un droit, qui plus est un droit fondamental, est manifestement abusif. Et expressément contraire à la loi de 1975. On ne pouvait affirmer plus clairement que le principe est le respect de la vie dès la conception, l’avortement n’étant qu’une exception à ce principe, soumise à des conditions strictes.
L’objectif revendiqué de la loi Veil était de dissuader les femmes d’avorter, non de promouvoir un droit. Or, tous les garde-fous, tous les moyens qui pouvaient permettre une dissuasion efficace ont été méthodiquement éliminés. La loi Veil a ainsi été résolument détournée et récupérée comme fondement d’un prétendu droit à l’avortement. En contradiction avec la volonté expresse de Simone Veil et du législateur de l’époque.
Affirmer que Simone Veil a promu le droit à l’avortement revient soit à l’instrumentaliser contre ses affirmations expresses, soit à la présenter comme une hypocrite machiavélique, qui aurait sciemment trompé les députés pour parvenir à ses fins. Dans les deux cas, c’est trahir sa mémoire.
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