Dans la ville-symbole du nationalisme algérien, le patriarcat arabo-musulman se porte bien. Il y est hélas acquis que l’homme a tous les droits quand la femme n’a que des devoirs.
« Le pays natal est un allié diminué. Sinon il nous entretiendrait de ses revers et de sa fatuité. » René Char
J’étais en Algérie pour quelques jours. Ce pays où je suis né, où je reviens pour visiter ma famille, m’apparaît souvent comme le plus étrange des pays que j’ai visités. Se promener dans les rues de ses villes, quand on est habitué à flâner sur les berges du Rhône ou dans les allées des Buttes-Chaumont, sur les hauteurs du quartier des Amériques, à Paris, est un choc. Les marches pacifiques du Hirak, qui se déroulent chaque vendredi, ont ébranlé un pouvoir qui se croyait à l’abri dans sa citadelle d’El Mouradia. Ces manifestations, qui ont déjà réussi à déposer un vieux président impotent, sont pour moi l’occasion d’analyser la société qui a été mienne jusqu’à ma majorité. À travers les discussions avec mes camarades du lycée Mohamed-Kérouani de Sétif, je découvre l’étendue de la frustration de la société algérienne, gangrénée par une vision sectaire de la religion.
Au café de la gare où je m’installe pour déguster une limonade ou un thé à la menthe avec Toufik, Fayçal et El Hadi, la ville de Sétif se raconte à travers leurs mots. Se présentent à moi tous les travers qui étouffent les citoyens de cette ville, parfois avec leur complicité, souvent parce qu’ils ne s’en rendent même pas compte, ces citadins qui ne sont ni mieux lotis ni moins bien pourvus que dans les autres villes de cet immense pays, le plus grand de tout le continent africain.

Sétif est, avec Guelma et Kherrata, l’incarnation de la révolte du 8 mai 1945. C’est une ville qui a fait connaître son nom au monde entier il y a plus de soixante-dix ans parce qu’une partie de sa jeunesse s’est soulevée pour réclamer à l’oppresseur un minimum de dignité et de respect, tandis que ce peuple l’avait aidé à terrasser la bête infâme. La répression, toujours aveugle, s’est terminée par plusieurs milliers de morts.
En matière de football, c’est la ville de l’Entente sétifienne, une des deux équipes les plus
