Françaises, Français,
En ce soir du 13 mai 2042, je vous remercie de m’avoir élu pour la sixième fois consécutive à la tête de notre beau pays. Sept, si j’oublie la d’ailleurs très oubliable parenthèse du hollandisme qui eut au moins le mérite de préparer de manière négative mon triomphe et le renouveau durable de ce pays qui est le nôtre et que nous chérissons tous tellement ! Je me souviens encore du temps de ma folle jeunesse, -après tout je n’avais que soixante ans- où il me fallut reprendre en main notre parti pas encore unique mais qui était appelé à le devenir puisque nous somme tous républicains, n’est-ce pas ? Il m’avait fallu certes éliminer des gens au sein même de nos rangs qui ne comprenaient pas les enjeux, des gens dont les noms sont aujourd’hui oubliés sinon de villes comme Bordeaux qui ont donné leur nom à des impasses.
Sept mandats, sept mandats ensemble… Une telle marque de confiance m’honore au plus haut point et je ne doute pas que vous donnerez dans quelques semaines, lors des élections législatives, une large majorité aux Républicains, mon cher et vieux parti ainsi qu’à nos alliés du Rassemblement Bleu Marine/Alliance Identitaire afin que je puisse prendre la toujours jeune sénatrice Marion Maréchal-Le Pen comme Premier ministre ainsi que je vous l’avais annoncé durant la campagne.
Certains pourront dire qu’étant le seul candidat autorisé par le Conseil constitutionnel à me présenter puisque tous les prétendants étaient corrompus et incarcérés, ma victoire a été facilitée. D’autres critiqueront le faible taux de participation, 13, 7%, que je déplore car il ne faut pas que la vitalité démocratique de notre beau pays s’étiole.
Mais, vous le savez, nous sommes le dernier îlot de démocratie en Europe et le monde entier a les yeux tournés vers nous. Partout ailleurs, dans l’ancienne UE, c’est le chaos et la chienlit. Rappelez vous, tout a commencé en 2015 avec la victoire en Grèce des marxistes sans Dieu de Syriza qui n’ont aucun respect, en plus, pour l’argent. Voudriez-vous vraiment, vous aussi, suivre ce destin qui a conduit ce pays à une véritable dictature ? Croyez-vous vraiment à ces Conseils Populaires qui prennent les décisions à la base, à ces écoles gratuites, à ces semaines de travail de 12 heures, à cette retraite à trente ans, à ces élus révocables à tout moment ? Et s’il n’y avait que la Grèce ! Mais vous le savez, chers concitoyens, nous sommes cernés. J’ai été obligé, lors de mon troisième mandat, de prendre de sévères mesures pour éviter la contagion et d’installer une surveillance électronique renforcée et des frontières rigoureusement imperméables autour de nos frontières comme m’y autorisait déjà, après quelques modifications, la loi sur le Renseignement, votée à l’unanimité sous mon prédécesseur dont j’ai toujours du mal à me souvenir du nom.
Mais il est faux de dire, comme le fait la presse étrangère, que la France est devenue « la Corée du Nord du capitalisme ». Il fallait bien, outre la Grèce, nous protéger de l’Italie mise en coupe réglée par Refondation Communiste, de l’Espagne sous le talon de fer des démagogues de Podemos, de l’Angleterre et de sa révolution sanglante de 2031 qui a amené au pouvoir une lie de sales gauchistes qui ont appliqué à la lettre le programme des mouvements néoluddites, de l’Allemagne qui fut la dernière à craquer mais a elle aussi sombré avec ce gouvernement rouge et vert au pouvoir depuis bientôt dix ans.
Nous avons notre fierté, nous Français, notre identité nationale. Nous ne cèderons pas. Nos amis chinois nous assurent le plein emploi dans leurs usines relocalisées chez nous car, comme le préconisait le Medef, nous avons su baisser radicalement le coût du travail dans un dialogue social constructif avec la CFDT, un syndicat vraiment responsable et représentatif dont les six cents militants sont des gens de confiance.
Vous me direz que nous ne sommes plus que dix-huit millions d’après le dernier recensement, que tous les jeunes sont partis poursuivre le mirage égalitaire chez nos voisins pour pouvoir se marier entre personne du même sexe, fumer de la drogue et perdre leur temps libre à pécher, lire, construire des habitats soi-disant respectueux de la nature en n’en foutant pas une rame ! Mais notre population n’est pas vieillissante, c’est faux, et elle est surtout travailleuse et expérimentée. Quel bonheur, à 76 ans, de se sentir encore utile à la société, en travaillant 65 heures par semaine et en attendant une retraite bien méritée à 82 ans qui sera, conformément à ma promesse de campagne, repoussée à 85 dans les mois qui viennent car seul le travail maintient jeune.
D’ailleurs, vous, mes chers concitoyens vous avez encore des salaires sur lesquels aucun impôt n’est prélevé, des salaires avec lesquels vous pouvez faire ce que vous voulez. Partout ailleurs, n’oubliez pas, ils ont aboli l’économie, le salariat et ils vivent du troc. Vous, au moins, avec vos 560 euroyuans, vous pouvez vous dire que la nourriture et les vêtements que vous avez achetés, vous les avez mérités, qu’ils sont à vous et vous faites ce que vous voulez ce que qu’il vous reste comme louer à plusieurs une voiture ou vous offrir, soyons fou, une mutuelle santé.
En plus, vous n’êtes plus embêtés par les immigrés, les Roms, les musulmans et les voyous : vous vivez dans un pays en paix ou vous êtes chez vous, entre vous, pour toujours. Et, à l’écart du monde, peuvent grandir enfin en paix les trois cents enfants qui naissent encore chaque année dans notre pays, démentant ce que de mauvais esprits disent sur notre natalité.
Alors courage, chers concitoyens. Je sais que vous en avez. N’oubliez pas de prendre vos médicaments ce soir et ouvrez une bouteille de Champomy pour fêter ma victoire. Moi, je vous laisse, j’ai une conférence à donner au Qatar sur « La France, dernier pays libéral d’Europe dans un océan de décroissants plus ou moins communistes ».
On se revoit dans cinq ans, enfin pour ceux qui seront encore vivants.
Vive la République, vive la France!
*Photo : WITT/SIPA. 00714424_000080.
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