Le Premier Secrétaire du PS estime que Nicolas Sarkozy « drague » les électeurs lepénistes. Ça ne lui plaît pas. Soit. Mais il va plus loin en sommant Alain Juppé, François Fillon et Bruno Le Maire de se désolidariser de l’ancien président. Faute de quoi, il sera fondé de les considérer comme ses « complices ».
La sommation de Jean-Christophe Cambadélis a fait « plouf » ou si l’on préfère « pschitt ». Aucun des interpellés n’a daigné lui répondre, ce qui est très certainement dommageable pour son ego. Le vrai problème est que tout le monde, ou presque, et pas seulement Sarkozy, drague les électeurs du FN. Dans le genre « plus à droite que moi tu meurs », François Fillon en fait des tonnes. Mais son petit filet de voix ne fait pas recette auprès des médias. Nicolas Dupont-Aignan n’est pas mal non plus. Mais qui écoute Nicolas Dupont-Aignan ? Dans cette drague, c’est Mélenchon le meilleur. Lui n’a pas besoin de faire le beau, tant ses positions sont proches de celles de Marine Le Pen.
Cette dernière drague aussi : les siens, car elle sait qu’une passion amoureuse doit être entretenue. Bruno Le Maire, lui, ne dit rien. Il attend sagement son heure. Et quand elle viendra, on verra que c’est un expert dans le domaine de la conquête de l’électorat frontiste. On n’entend pas non plus Alain Juppé : il a passé l’âge de conter fleurette aux électrices et aux électeurs du FN, qu’il convoite comme tout un chacun. François Bayrou se tait également : il est trop occupé à pousser la chaise roulante de l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac.
Feu donc sur Sarkozy qui, lui, ne se cache pas. Mais Cambadélis oublie une partie du propos de l’ancien président. Nicolas Sarkozy, en effet, répète qu’il comprend les électeurs frontistes. Mais que le FN est son adversaire, un adversaire qui trompe ses électeurs. Ça ressemble à quelque chose qui a déjà été dit, et entendu. « Le FN pose de bonnes questions et apporte de mauvaises réponses ». Mais qui a dit cette horreur ? Qui a fait du Sarkozy avant la lettre ?
Si Cambadélis ne sait pas et souhaite se renseigner, c’est la porte à côté. Il suffit de quelques minutes pour aller de la rue de Solférino au Quai d’Orsay. Là-bas siège quelqu’un qu’il connaît depuis longtemps. Et on imagine aisément que Laurent Fabius, en honnête homme qu’il est, lui dira : « Oui, c’est moi qui ai prononcé cette phrase. » « Ah ! » fera Cambadélis. « Mais c’était en 1983, quand nous étions jeunes tous les deux. Tu ne t’en souviens pas ? » Cambadélis lui répondra : « Tu sais bien qu’à cette époque j’étais trotskiste et que je n’écoutais pas les sociaux-traîtres de ton espèce. » Les temps ont changé. Fabius est devenu moins « traître » et Cambadélis beaucoup moins « social ».
*Photo: Sipa. N° de reportage: 00715943_000055.
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