Dans L’Express, l’impayable Sandrine Rousseau affirme qu’« au nom de la richesse économique, on a exploité les femmes comme la nature pour faire du profit. Tout comme on avait exploité des esclaves africains avec la traite négrière »…
Sandrine Rousseau a donc été battue par Yannick Jadot. Fatalitas ! Battue par un homme — fatalitas ! Dans son système de représentation, l’expression est pléonastique, les hommes sont sur terre pour user, abuser, battre et violer les femmes — c’est d’ailleurs ce à quoi nous passons notre temps, nous les cisgenres, comme ils disent. Faute d’être des Juifs allemands, nous sommes tous des Denis Baupin — ce militant EELV qui aurait abusé d’elle, et lui a permis de glisser de la défense des éoliennes à l’éco-féminisme — quoi que ce mot puisse bien signifier.
C’est le traumatisme fondateur grâce auquel Sandrine Rousseau a trouvé sa voie, comme dit le Chinois fou dans le Lotus bleu : pas seulement l’écologie, mais la révolution des genres, la prise de pouvoir au féminin, et l’intersectionnalité des luttes : seuls les hommes blancs sont des violeurs en puissance. À terme, Rousseau ne vise rien moins que l’élimination de l’homme occidental.
D’ailleurs, cette militante radicale, qui a le mauvais goût de ne pas être lesbienne afin de vivre en couple avec Alice Coffin, la militante LGBT qui a soutenu sa candidature à la primaire écologiste, a « déconstruit » son actuel compagnon. Ça doit faire mal, de se faire déconstruire par Rousseau. Eparpillé façon puzzle, comme disait Raoul Volfoni ? À poil avec un tablier de soubrette, en train de faire la vaisselle ? Ou attaché à un tilbury et cravaché afin d’avancer au trot ?
Peut-être se contente-t-il d’être le sténographe des discours de Madame — non, ça, ce serait trop cruel.
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Je suggère à cet heureux lascar, qui est un exemple pour nous tous, de donner un coup de main à sa compagne (dois-je dire : à sa maîtresse ?) afin de lui éviter, à l’avenir, de proférer de trop grosses bêtises, dans l’une ou l’autre des interviews qu’elle donne à des journalistes avides de déconstruction.
Parce que Sandrine Rousseau, docteur en économie et prof de fac, vice-doyen de la fac de Lille, qui pèse nécessairement sur le recrutement — une promesse d’impartialité, c’est sûr — a l’art des énormités, lorsqu’elle se livre à cœur ouvert à l’Express.
C’est le 9 octobre dernier que Thomas Mahler et Olivier Pérou ont tendu leur micro (il y a quelque chose de phallique là-dedans, ça m’étonne que Sandrine Rousseau ne s’en soit pas courroucée) à notre militante de la cause des femmes. Et ils en ont appris de belles — et nous aussi par la même occasion.
« Sa bataille, elle le sait, est désormais culturelle, faute de candidature présidentielle… » Les journalistes n’ont toujours pas saisi que la bataille des présidentielles sera culturelle — ce que seul Zemmour (et à un moindre degré Pécresse), pour l’instant, a bien saisi. La France veut-elle achever de périr, ou est-elle susceptible d’un sursaut libérateur ? Peut-on revivifier la langue et la culture française, mises à mal par un système scolaire ingénieusement perverti et une idéologie mondialiste qui fait la part belle aux cultures exogènes ?
Qu’en est-il donc de « l’éco-féminisme » ? Appréciez la dialectique, qui ne joue pas du tout sur l’amalgame des torchons et des lanternes. « Historiquement, l’enfermement des femmes au nom de leur fonction reproductive et l’exploitation de la nature comme ressource se sont faits au même moment, quand s’est cristallisé le système capitaliste. Au nom de la richesse économique, on a exploité les femmes comme la nature pour faire du profit. Tout comme on avait exploité des esclaves africains avec la traite négrière. Tout ça est très lié… »
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Un débat récent entre vrais spécialistes a montré, si c’était encore nécessaire, que comme disait Valéry, « l’histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l’intellect ait élaboré ». On lui fait dire tout et — dans le cas de Sandrine Rousseau — n’importe quoi. Par exemple, on apprend dans cette même interview que les femmes étaient plus libres et socialisées au Moyen Age qu’aux XVIIe, XVIIIe ou XIXe siècles. Cela fera plaisir à Marguerite de Navarre, Mme de Sévigné ou Mme de La Fayette, à Mme de Rambouillet, à Emilie du Châtelet, George Sand, et toutes celles qui tenaient des salons où se sont élaborés la pensée rationnelle, la Révolution, les changements de mœurs, et j’en passe. La répression de la sorcellerie est surtout liée aux conflits religieux au XVIe siècle (les Protestants brûlaient autant que les Catholiques), elle s’est atténuée au XVIIe et a disparu complètement au XVIIIe : le dernier procès où l’accusation de sorcellerie a émergé est celui du Père Girard face à Catherine Cadière, dont je parlais récemment ici-même — et les juges ont rejeté l’accusation, qui n’avait plus sa place en 1730. Alors qu’au Moyen Age, en dehors de trois ou quatre noms (Aliénor d’Aquitaine, Christine de Pisan ou Marie de France — dont on ne sait pas grand-chose), la condition féminine était positivement atroce, avec un viol toutes les quatre minutes — estimation basse. Même si les troubadours ont mis en place l’amour courtois, il ne faut pas imaginer que ces chevaliers affamés ne se jetaient pas sur la première donzelle de passage. L’écuyer de Bayard — le « chevalier sans peur et sans reproche », le défenseur de la veuve et de l’orpheline — raconte au milieu du XVIe siècle que son maître, à chaque étape, mettait dans son lit la plus jolie vierge du pays — et que par extraordinaire, un soir, il en a épargné une.
Quoi que dise #MeToo, la condition féminine est cent fois plus enviable à partir du XVIIIe siècle, et je suggère à celles qui se plaignent aujourd’hui de faire, en rêve, un stage au XIVe siècle, quand une femme qui portait plainte pour viol était brûlée vive, comme le raconte le dernier film de Ridley Scott, le Dernier duel, à propos de l’affaire Carrouges-Legris.
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Mais voilà : c’est au XVIIIe que commence la Révolution industrielle, chargée par les écolos de tous les péchés de la Terre. L’éco-féminisme souhaite un merveilleux bond en arrière, une décroissance rapide, le renoncement au confort, à l’hygiène et au progrès — et Sandrine Rousseau rechargera son portable à la bougie. Et comme elle aura fini de déconstruire totalement ses hommes, dieu sait à quoi lui servira ce qu’il restera de bougie. Grand bien lui fasse.
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