Habitué aux joutes médiatiques, hier comme dirigeant communiste, aujourd’hui comme chroniqueur politique. Olivier a des tripes et du cœur quand il s’agit de défendre ses idées. « J’aime qu’on me contredise ! » pourrait être sa devise.
L’arrêté de la préfecture de l’Hérault en avait pourtant informé la population : dans un périmètre autour du collège Louise-Michel de Ganges, tout « dispositif sonore portatif » était rigoureusement interdit lors de la visite du président de la République, le 20 avril. Des casseroles ont été saisies. Il est vertigineux de voir là où nous en sommes : des casseroles saisies ! Absurdistan. Ceux qui contestent aujourd’hui la réalité d’une « crise démocratique » sont ainsi exposés à la menace d’un concert polyphonique. Malgré le rouleau compresseur des dernières années, du référendum de 2005 au 49.3 de 2023, le peuple fait montre d’une inventivité citoyenne toujours renouvelée.
Il y a un an, le 30 avril 2022, lors de la cérémonie de remise des diplômes d’AgroParisTech, huit étudiants avaient publiquement appelé à « déserter » des emplois « destructeurs ». Que nous disaient-ils ? « Nous sommes plusieurs à ne pas vouloir faire mine d’être fiers et méritants d’obtenir ce diplôme à l’issue d’une formation qui pousse globalement à participer aux ravages sociaux et écologiques en cours. […] Quelle vie voulons-nous ? Un patron cynique, un salaire pour prendre l’avion, même pas cinq semaines par an pour souffler et puis un burnout à 40 ans ? »
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Ils ne sont pas des cas isolés. Dans de très nombreuses grandes écoles et universités, la question de l’avenir est posée et âprement discutée. Elle invite à des prises de conscience, des bifurcations et des ruptures. Ces jeunes ingénieurs refusent d’être les exécutants dociles de décisions prises par les marchés financiers et présentées comme « incontournables et urgentes » par leurs serviteurs politiques.
Ils ne veulent pas participer à la folle course à la productivité, à la compétitivité et à la rentabilité. Ils lui opposent d’autres objectifs : le développement humain et écologique durable, une réelle autonomie. Une vie à la retraite et en bonne santé. Selon des travaux
récents, environ 30 % des étudiants de grande école sont en « rupture » et se questionnent sur les métiers auxquels ils sont formés. Ils veulent en connaître l’impact social, écologique ou économique, quelles que soient les conséquences sur leur statut social ou leur situation financière.
Au cours des derniers mois, plus nous avons parlé des retraites et plus il a été question du travail, de son sens, de sa réalité, des transformations à opérer, et de l’ampleur de la crise du travail qui exige de « donner la parole et une partie du pouvoir à celles et ceux qui font le travail », comme le propose Dominique Méda (Le Monde, 15 avril 2023). Et si nous devenions les ingénieurs de nos vies ! Que voulez-vous, on ne me changera pas. Je suis né dans une casserole où étaient mélangés idéaux de justice, d’émancipation, d’utopies concrètes et d’actions immédiates pour de vraies solutions. Pour les héritiers de Denis Kessler, économiste passé du communisme au libéralisme pur et dur, l’objectif reste de « défaire méthodiquement le programme du CNR » (Challenges, 4 octobre 2007). Ma recette est à leurs yeux un brouet indigeste. Et s’il était notre futur festin ?