Réélu triomphalement à la tête du PCF, lundi 10 avril, lors du 39e congrès du parti à Marseille, avec 80,4% des voix, Fabien Roussel fait grincer beaucoup de dents à gauche.
Comme beaucoup de Français, Roussel en a soupé de la Nupes. Il y a désormais la gauche Roussel et la gauche Mélenchon. Et ce n’est pas le grand amour.
Revenons d’abord sur la tambouille politique actuelle : Fabien Roussel appelle à un nouveau Front Populaire, ce qui revient à débrancher la Nupes qu’il a jugé dépassée dans un entretien publié dans L’Express. À Marseille, où se tenait le grand congrès du PCF, aux cadres qui jugeaient dans Le Monde irresponsable de jeter la Nupes avec l’eau du bain, il a répondu: « Il ne s’agit pas de jeter le bébé avec l’eau du bain, mais il faut quand même bien changer l’eau de temps en temps ! » Dans le même temps, le Sécrétaire national du PC tend la main à Bernard Cazeneuve ; il dispute donc le leadership de Jean-Luc Mélenchon à gauche. Crime de lèse-majesté !
La Nupes, tu l’aimes ou tu la quittes
Derrière toutes ces bisbilles tactiques et politiciennes, il y a de vraies divergences de fond. Quelques phrases du discours de Roussel, notamment, ont particulièrement agacé les Insoumis : « Ils ont mis la France sur le Bon Coin, ils ont signé des traités de libre-échange à tour de bras, ils ont transformé nos frontières en passoires, ouvert la France aux quatre vents, aux marchands et à la finance (…) ils ont laissé filer nos usines et ils reviennent aujourd’hui la bouche en cœur en nous parlant de souveraineté, souveraineté, souveraineté… »
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La mélenchosphère s’étrangle sur son thème préféré : voilà l’extrême droite ! « Rouges-bruns no pasaran » , tweete par exemple le documentariste David Dufresne. «Quitter la Nupes pour le RN, j’étais pas prêt », s’agace un autre. En somme, Fabien Roussel, c’est le coco-facho !
Mais pourquoi donc son plaidoyer pour la souveraineté choque-t-il tant les Insoumis?
Même s’il s’adresse en théorie à Emmanuel Macron et à la droite, ces accusations d’avoir bradé la France et son industrie valent très largement pour toute la gauche post-mitterrandienne, laquelle s’est jetée à corps perdu dans la mondialisation financière. C’est sous le pouvoir de cette gauche que la grande braderie s’est en grande partie tenue. Elle a effectivement laissé filer nos usines à l’étranger.
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D’après les soutiens de Fabien Roussel, par ailleurs, ce qu’il a voulu dénoncer dans son discours, c’est la libre-circulation des marchandises, bien sûr. Mais, le véritable enjeu de la discorde à gauche, c’est évidemment la question migratoire, la libre circulation des personnes. Roussel, c’est aussi la gauche du bulldozer de Vitry. Souvenez-vous, en 1980, quand Paul Mercieca, le maire communiste de cette commune, avait participé au saccage d’un foyer de travailleurs maliens pour protester contre l’immigration massive. En somme, alors que Jean-Luc Mélenchon drague le vote musulman, Fabien Roussel entend parler aux classes populaires de souche, au peuple old school (comme l’appelle Michel Onfray) que la gauche a abandonné au RN car il n’était pas assez multiculti, pas assez progressiste, pas assez moderne… Fabien Roussel pourrait donc demain disputer à Marine Le Pen cette France des sous-préfectures. Il ne lui reste plus qu’à abandonner le mot communisme ; d’abord, parce qu’il est tâché de sang ; ensuite parce que les Français veulent réguler le capitalisme, mais pas rompre avec lui. Pour le reste, il a raison. La gauche côtelette a bien plus d’avenir que la gauche quinoa.
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