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Quelque chose en nous des Kennedy…

Une ascendance peu ordinaire, mais il traîne une réputation d'antivax...


Quelque chose en nous des Kennedy…
Robert Kennedy Junior, à Berlin en 2020, lors d'une manifestation contre les mesures de restrictions sanitaires... © Action Press/Shutterstock/SIPA

Issu d’une famille ô combien illustre, mais qu’on avait quelque peu oubliée ces derniers temps, le troisième fils de Robert Kennedy vient d’annoncer sa candidature à l’investiture suprême. Du même camp que le président sortant, mais remettant en question à peu près toutes les lignes politiques de ce dernier, il pourrait créer la surprise même si, selon les habitudes qui donnent favori le président sortant, il a peu de chances de remporter la victoire.


D’abord, il y a son regard, bleu, perçant et un peu méfiant, qui atteste de la « lignée ». Robert Francis Kennedy Junior est le descendant de l’une de plus célèbres familles américaines, qui a donné au pays John Fitzgerald, 35ème président des États-Unis et Robert Francis, son frère, l’ex-ministre de la Justice et candidat aux élections présidentielles de 1968 ; tous les deux assassinés au sommet de leurs carrières, dans les conditions non élucidées jusqu’à nos jours. Tous les deux devenus de véritables mythes dans leur pays, mais aussi partout dans le monde.

Une ascension non négligeable

Le 19 avril, Robert Kennedy Junior a annoncé, lors du rassemblement de ses partisans à Boston, sa candidature à l’élection présidentielle de 2024. Un fait qui n’a pu laisser indifférente l’Amérique d’aujourd’hui, divisée depuis la dernière campagne présidentielle Trump-Biden de 2020 et plongée dans les multiples crises qui placent son économie au bord de la récession. En deux semaines, les intentions de vote pour sa candidature ont grimpé à 39%, le plaçant ainsi au même niveau que l’ancien président de nouveau candidat Donald Trump et juste à 4 points du président en poste Joe Biden. C’est une donnée qui ne permet plus de réduire le nouveau Kennedy au candidat antivax ; une étiquette que les médias « mainstream » lui avaient collée pendant la pandémie de Covid-19. Étiquette dont cet avocat de 69 ans, spécialisé en droit de l’environnement, se défait assez habilement depuis que les chaînes d’information américaines sont obligées de lui prêter attention.

Une critique acérée

Dans ses interviews à la chaine CNN le 29 avril ou encore à la chaine WMUR-TV le 23 avril, RFK Junior a rappelé que ses interrogations autour du vaccin anti-Covid portaient surtout sur l’hégémonie de l’industrie pharmaceutique ainsi que sur les effets secondaires du vaccin. Il a précisé par ailleurs avoir reçu toutes les doses du fameux vaccin ainsi que le restant de sa famille.

Robert Kennedy Junior est démocrate et ami de longue date de Joe Biden, avec qui il n’est d’accord sur rien ! Dans la même interview à CNN, ce troisième fils de Robert (lequel s’était farouchement opposé à la façon dont son pays avait mené la guerre au Vietnam), a critiqué avec virulence la politique de l’actuel locataire de la Maison Blanche : « Notre pays a pris une mauvaise direction, avec la guerre -en Ukraine-, la censure, le diktat des grandes corporations et la peur utilisée par ce gouvernement comme un véritable outil de pouvoir. »

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Une position à l’abri des soupçons

Sa voix rauque et son calme inspirent la confiance. Ses critiques du « va-t’en guerre » de l’actuelle administration américaine en Ukraine ne risquent pas de le faire passer pour un agent de Poutine, car son fils Connor est allé combattre en Ukraine quelques mois seulement après le début de la guerre. Inutile d’évoquer les inquiétudes de ce père de famille, surtout quand on connaît le nombre de drames que le clan Kennedy a subis depuis ces 60 dernières années. « Papa, tu m’as appris à défendre les valeurs auxquelles je crois » lui a dit son fils de 28 ans. Pour autant, Robert Kennedy Jr ne croit pas à l’utilité pour son pays de continuer à fournir le support financier et militaire de cette guerre, suivant en cela tous ceux qui, aux États-Unis et en Europe, rejettent avec force l’invasion meurtrière de l’Ukraine par la Russie, mais qui réclament aussi une autre solution à la résolution de ce conflit que la boucherie humaine qui dure depuis déjà 15 mois.

Un conflit qui en fait resurgir un autre

Cette prise de position par l’avocat-démocrate n’est pas sans rappeler la gestion par ses illustres aînés de la crise des missiles de Cuba en 1962. 

Durant son mandat, JFK réussit à accroître la domination militaire de l’Amérique sur l’URSS. Le Pentagone déploie les missiles nucléaires pointés vers Moscou en Italie et en Turquie. Nikita Khrouchtchev, le leader soviétique de l’époque, s’accroche à la révolution cubaine de Fidel Castro pour faire de l’Île de la liberté sa base pour l’arme atomique et semble décidé à déclencher la 3ème Guerre mondiale. Après plusieurs mois d’extrêmes tensions, le président américain demande à son frère Robert de rencontrer l’ambassadeur soviétique Dobrynine à Washington pour négocier un compromis. Le monde est sauvé. L’Occident va connaître plusieurs décennies de paix et de prospérité, tandis que le régime totalitaire soviétique s’écroulera pratiquement tout seul en 1991.

Une candidature redoutée par certains

Nul doute que l’entourage de l’actuel président américain redoute la candidature de Kennedy Junior. La responsable de la presse de la Maison Blanche a refusé d’évoquer sa percée dans les sondages lors de sa dernière conférence. Les chaînes TV américaines aiment montrer la photo de Biden avec, derrière lui, un buste de Robert Kennedy posé sur un meuble du bureau ovale, juste à côté de ceux de Martin Luther King, Rosa Parker et Abraham Lincoln, le président américain étant réputé pour être un champion des bonnes causes. Pas de quoi émouvoir R.K. Junior, qui ne manque pas de lire la presse républicaine lorsque celle-ci aime exhiber des citations du jeune sénateur Biden dans les années 1970 considérées aujourd’hui comme « racistes », alors que le discours de son propre père à la mort de Martin Luther Kings en 1968 avait été, lui, sélectionné par la Bibliothèque du Congrès américain afin de préserver son sens significatif culturel, historique et esthétique. Un Kennedy n’ignore rien des dessous du monde politique et de la violence infinie d’une campagne électorale.

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 La légende de la famille Kennedy ne s’est pas construite uniquement sur le charisme et la richesse de ses représentants, mais sur la droiture et la force de ses convictions. En juillet 2018, RFK Jr a rendu visite à l’assassin de son père. Condamné à la perpétuité, Sirhan, l’immigré palestinien avait expliqué son geste par le soutien apporté par le sénateur à la vente des avions américains à l’Israël. Après la rencontre avec le prisonnier âgé aujourd’hui de 79 ans, Kennedy Junior avait déclaré : « J’étais troublé à l’idée que la mauvaise personne puisse avoir été condamnée pour le meurtre de mon père ». Avec sa sœur Kathleen Kennedy Townsend, il a demandé la réouverture d’une enquête sur le crime – demande restée sans réponse à ce jour. 

Des chances a priori minimes, mais a priori seulement

Ses chances de gagner l’investiture de son parti pour les élections de 2024 sont minimes. Un président sortant bénéficie, comme à son habitude, de toute la puissance de la machine du pouvoir, même si les multiples dérapages mettant en question la santé mentale de Joe Biden interpellent de plus en plus son propre camp. D’autre part, les investigations de membres du Congrès républicains sur ses affaires familiales pourront également nuire à sa réputation. Mais le succès de la candidature de Bobby Kennedy Junior, auquel il faut ajouter l’électorat toujours assez important de Donald Trump, est surtout la preuve criante que l’actuelle politique de la Maison blanche n’est pas approuvée par une franche majorité d’Américains.

Le phénomène de la domination des minorités politiques et idéologiques dans les sociétés démocratiques depuis un certain temps commence peut-être enfin à inquiéter le pays qui l’a fait naître…




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Travaille dans l’industrie des hautes technologies. Il est l'auteur du livre « L'Homo Globalis Numericus » paru aux Editions du Panthéon.

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