Dans un récit pudique et précis, Robert Badinter nous parle de sa grand-mère maternelle, juive née dans la Bessarabie tsariste et morte dans la France de Vichy. D’un antisémitisme à l’autre, cette évocation familiale a valeur d’avertissement.
On serait bien avisé, du côté de l’Éducation nationale, d’inscrire aux programmes Idiss, le dernier livre de Robert Badinter, et ce, pour au moins deux raisons. La première est que ce récit sur la vie de la grand-mère de l’auteur est écrit d’une plume précise, sensible, où l’émotion affleure de façon pudique pour tracer les contours d’une vie, celle d’Idiss, née en Bessarabie en 1863, sous le régime tsariste et morte en 1942 à Paris, seule ou presque, sous l’occupation nazie. On y découvre un admirable portrait de femme simple et généreuse, vivant entre deux mondes, qui retrouvera à la fin de son existence le péril qu’elle avait fui au début. Idiss s’inscrit dans une tradition littéraire où l’on trouve aussi bien Le Livre de ma mère d’Albert Cohen que La Promesse de l’aube de Romain Gary. Se souvenir des siens, c’est vivre deux fois, c’est repenser ses origines et surtout ne jamais les oublier : « Aujourd’hui, ayant franchi son âge, écrit Robert Badinter, je rêve à son passé qui est un peu le mien. Il m’émeut, mais j’en souris aussi, comme si un conteur d’histoires était assis devant moi et évoquait le destin de ma grand-mère, dans sa langue dont les accents ont bercé mon enfance. » Les temps sont à l’instantanéité et ce qu’on appelait
