Résurrection d’espèces éteintes. L’annonce spectaculaire de l’entreprise américaine Colossal Biosciences soulève des questions éthiques assez vertigineuses. Analyse.
Il n’y a pas de moment plus propice pour parler de résurrection que la Semaine sainte, et c’est peut-être pour cette raison que Colossal, une entreprise pionnière dans le domaine de la bio-ingénierie, a récemment fait une annonce spectaculaire qui a captivé l’imagination du public : le retour du loup sinistre (Canis dirus), une espèce disparue depuis 10 000 ans ! Trois spécimens, nommés Remus, Romulus et Khaleesi (ce dernier, dont le nom est issu de la série télévisée et littéraire « Game of Thrones », n’a pas encore été présenté au public), ont vu le jour grâce à ce projet à la fois surprenant et prévisible.
Une projet secret ayant abouti l’automne dernier
La surprise réside dans le secret qui a entouré cette entreprise, prenant de court de nombreux experts, ainsi que dans le choix de l’espèce « ressuscitée », le loup sinistre, qui ne figurait pas parmi les candidats en tête pour la dé-extinction. En même temps, ce résultat semble prévisible — ou plutôt inévitable — tant il découle de la convergence entre les principes de la conservation et les avancées de la biotechnologie.
Les concepts de conservation regroupent un ensemble de principes et de stratégies destinés à préserver la biodiversité, les écosystèmes et les ressources naturelles de la planète. Ils recouvrent des approches variées, allant de la protection des espèces menacées et de leurs habitats à la restauration des milieux dégradés, tout en intégrant la promotion de pratiques durables dans l’usage des ressources. Plus récemment, grâce aux avancées scientifiques et technologiques, un champ nouveau est venu enrichir cette réflexion : la dé-extinction. L’objectif global de ces démarches est de renforcer la santé et la résilience de la biosphère, dans l’espoir d’assurer un avenir durable à l’ensemble des formes de vie, y compris l’humanité.
C’est trop injuste !
Les principes de conservation soulèvent néanmoins des questions épineuses quant à leur application et à leurs implications. L’un des écueils majeurs réside dans la définition et l’évaluation de la valeur écologique. Déterminer objectivement l’importance d’une espèce ou d’un écosystème demeure une tâche complexe, souvent teintée de subjectivité. Les critères employés — qu’ils soient économiques, esthétiques ou éthiques — varient considérablement, menant parfois à des décisions contestables et souvent contestées : c’est le cas de la réintroduction des loups et des ours en France. De surcroît,
