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Des Républicains du Texas favorables à une sécession de leur État

L’idée d’un « TeXit » devient de plus en plus sérieuse


Des Républicains du Texas favorables à une sécession de leur État
Daniel Miller du Texas Nationalist Movement. D.R.

Des milliers de Républicains se sont réunis à Houston pour leur convention annuelle dans l’État du Texas. Parmi les 270 propositions adoptées, une en particulier a retenu l’attention de la presse américaine et mexicaine. Celle d’une éventuelle sécession du Texas, qui pourrait être soumise à référendum en 2023. Un air de Dixie flotte désormais au-dessus du «Lone Star State».


Rassemblés à Houston, capitale de l’État du Texas, les Républicains ont semé l’émoi aux États-Unis les 16 et 18 juin derniers et fait grincer bien des dents. Après avoir majoritairement rejeté la victoire au dernier scrutin présidentiel de Joe Biden, les partisans les plus radicaux de l’ancien président, Donald Trump, ont posté une série de 270 propositions sur leur plate-forme officielle. Abrogation de l’avortement ; interdiction de la théorie du genre et de toutes formes de lobbys LGBT au sein de l’éducation nationale, jugeant l’homosexualité comme «un choix anormal de vie» ; renforcement de l’identité américaine ; abolition du «Voting Rights Act» de 1965 interdisant les discriminations raciales dans l’accès au droit de vote, au motif que les Afro-américains ne font plus aujourd’hui l’objet d’une ségrégation raciale ; rupture des relations diplomatiques avec la Chine et reconnaissance de Taïwan ; ou encore retrait des États-Unis de l’Organisation des Nations unies (ONU). Autant de suggestions à soumettre aux votes en cas de victoire de leur camp aux élections de mi-mandat. Mais c’est pourtant une autre proposition inattendue qui a mis les Républicains du Texas sous le feu des projecteurs médiatiques.  

Un vieux fantasme

Sous un paragraphe intitulé « Souveraineté de l’État » où il est affirmé que: « conformément à l’article 1, section 1, de la Constitution du Texas, le gouvernement fédéral a porté atteinte à notre droit à l’autodétermination », les Républicains appellent à ignorer dorénavant le 10ème amendement du Texas qui accorde des pouvoirs au gouvernement fédéral des États-Unis. Les partisans de Donald Trump vont même plus loin, puisqu’ils renouent avec le vieux fantasme de sécession qui agite, depuis quelques années, plusieurs États américains et qui s’inscrit dans l’histoire des États-Unis. Les Républicains ont proposé que la question de l’indépendance du Texas soit à nouveau soumise par référendum en 2023. Un épouvantail déjà agité, il y a deux ans, lorsque le député Kyle Biedermann a vainement tenté de faire adopter une proposition en ce sens.

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Par le passé, le Texas a pourtant fait deux fois sécession. Province mexicaine faiblement peuplée, après avoir été longtemps un objet de contentieux entre la France et l’Espagne, le Texas décide de prendre son destin en main en 1835. Irrités par l’ingérence permanente de Mexico dans leurs affaires (notamment sur la question de l’esclavage), implantés depuis peu dans la région, les colons anglo-américains se soulèvent contre le général Lopez de Santa-Anna. Les Mexicains auront bien du mal à juguler cette révolte dirigée par Sam Houston. Fort Alamo va devenir le symbole de cette lutte farouche, un mythe magnifié par la magie d’Hollywood. Durant 13 jours, entre février et mars 1836, 180 hommes commandés par le colonel James Bowie vont héroïquement résister à 3000 soldats de l’armée mexicaine. Ils vont tous y mourir. Un nom sera retenu pour la postérité, celui de Davy Crockett, trappeur plusieurs fois élu député du Tennessee.

La bataille de San Jacinto, en avril suivant, va contraindre Santa Anna, capturé, à négocier et accorder l’indépendance aux Texans. Une république est née et va exister jusqu’en 1845, date à laquelle elle demande son rattachement aux États-Unis. Une entrée qui fut source d’une méfiance par le Nord, plutôt contre l’incorporation dans l’Union de ces partisans de l’esclavage. L’histoire devait donner raison plus tard à Washington.

L’idée d’un TeXit émerge dans les années 90

Lors de la guerre de sécession, le Texas rejoindra en 1861 la nouvelle Confédération sudiste. Déjà à cette époque, le Texas considère l’élection d’Abraham Lincoln à la tête de l’État comme « malheureuse » et déclare la supériorité effective de la race blanche, justifiant ainsi son acte d’indépendance vis-à-vis du Nord. L’État va jouer un rôle considérable lors de la guerre civile, inscrire son nom avec la découverte des gisements de pétrole et va frapper les esprits lors de l’assassinat du président John Fitzgerald Kennedy à Dallas en 1963. Une ville texane particulièrement hostile au dirigeant démocrate, qui reprochait à JFK sa mollesse face au communisme et sa politique de déségrégation raciale…

Depuis les années 1990, de nombreux mouvements indépendantistes ont émergé et l’idée de « TeXit » est devenue de plus en plus populaire. « Quand les gens disent que le Texas ne pourrait pas devenir une nation indépendante, eh bien, regardez tous les avantages naturels que nous avons, nous sommes la neuvième plus grande économie du monde. Notre puissance économique à l’échelle mondiale est plus forte que celle de la Russie » explique Daniel Miller, leader du Texas Nationalist Movement. En 2009, un sondage publié par Rasmussen Reports affirmait alors que seuls 18% des Texans souhaitaient la séparation du Texas du reste des États-Unis. Ils sont aujourd’hui plus de 37% selon un autre sondage réalisé sur le même thème par l’université du Texas en avril 2022.

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Cette idée divise toutefois le Parti républicain. L’ancien gouverneur de l’Ohio a déclaré que « ce qui s’était passé au Texas n’était qu’un spectacle de clowns »« Je pense que même les clowns étaient gênés par ce qu’ils ont vu là-bas » a déploré John Kasich sur CNN. L’idée ne plaît pas non plus aux constitutionnalistes. La Constitution américaine ne prévoit pas la sécession des Etats et, en 1869, la Cour suprême a statué dans l’affaire Texas c. White que les États ne pouvaient pas unilatéralement faire sécession de l’Union. Une sécession provoquerait carrément une nouvelle guerre civile, selon Richard Albert, professeur de droit et de gouvernement et directeur des études constitutionnelles à l’université du Texas à Austin, interrogé par le magazine Newsweek.

Un danger pris très au sérieux par le gouvernement du président Joe Biden qui a fait récemment part de ses craintes « d’une menace intérieure » importante. « Un divorce national est inévitable. Le gouvernement n’est rien d’autre qu’une illusion que nous avons tous en tête. Si le peuple décide de rejeter son gouvernement, le gouvernement fédéral ne peut pas faire grand-chose pour l’arrêter » a solennellement averti Matthew Santonastaso, député Républicain du New Hampshire. A Houston, lors de la fameuse Convention, quelques participants ont sifflé sans complexe « I Wish I Was In Dixie Land », l’hymne bien connu de la Confédération sudiste et dont le drapeau a été la star des évènements survenus au Capitole en janvier 2021. Sans que cela ne gêne qui que ce soit. 



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Journaliste , conférencier et historien.

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