L’engueulade dont a été victime Arlette Chabot a été l’occasion pour le Président de la République d’émettre une excellente idée. Ceux qui m’accusent d’anti-sarkozysme primaire en seront pour leurs frais. Je sais le reconnaître quand cela arrive, même si c’est trop rare[2. Mon anti-sarkozysme secondaire demeure intact, en revanche.].
Mais revenons à l’épisode s’il vous a échappé. Après l’intervention télévisée de New York, équipe présidentielle et journalistes des première et seconde chaînes se retrouvent autour d’un repas. Sur le dossier iranien, Kouchner et Sarkozy montrent leurs désaccords. Alors que, sagement, les autres convives laissent passer l’orage, Arlette-la-gaffeuse glisse :« Cela ferait un beau débat sur France 2. » Le Président, dont on sait – Arlette la première – qu’il a plusieurs fois déploré le manque d’émissions politiques sur le service public de télévision, saute sur l’occasion et rosse la directrice de l’information. Catherine Nayl[2. A ne pas confondre avec Catherine Nay.], qui fait le même boulot sur TF1 que sa consœur Arlette sur France 2, vole au secours de cette dernière. Il n’y a aucune émission de ce type sur sa chaîne, alors que Mots Croisés et A vous de Juger démontrent un certain volontarisme sur le service public.
Sauf que, dans l’esprit du Président, le service public doit faire davantage qu’une chaîne commerciale. Et il regrette le bon vieux temps de « L’heure de vérité ». Là voilà l’excellente idée que je faisais miroiter en introduction.
« L’heure de vérité ! » Le long couloir d’un pas décidé aux côtés de François-Henri de Virieu, accompagnés par Live and let die de Paul Mac Cartney et les Wings, les trois éditorialistes qui cuisinaient chacun quinze minutes un politique qui devait tenir la distance, la signature du livre d’or en conclusion, cela avait de la gueule ! Et tout cela juste après le journal de vingt-heures pendant des années, puis à midi le dimanche. Certes, je me rappelle aussi de mon arrière-grand-père me martelant qu’on aurait dû appeler cette émission « l’heure du mensonge », mais que dirait-il aujourd’hui, le pauvre ? En voyant l’autre jour Allègre et Cohn-Bendit se chamailler tout en se tutoyant comme au bistrot, il aurait de quoi être effaré.
Faisons un rêve audiovisuel. On rétablit l’heure de vérité. France 2 peut très bien faire de Calvi le présentateur. Des nouveaux éditorialistes, il y en a. On n’est pas obligé de rappeler Duhamel, Nay et Colombani, comme le fait Denisot. Aphatie, qui trépigne de jalousie quand il commente la prestation de Ferrari et Pujadas, pourrait être appelé de temps en temps. Joffrin, Domenach, Thréard, Askolovitch, Fottorino, Olivennes[4. Quoi ? J’ai dit une connerie ?] et mon préféré Zemmour pourraient aussi être conviés. Mais pourquoi se limiter à la presse classique ? La presse Internet devient tous les jours davantage incontournable. Et depuis un an, l’émission Parlons netde David Abiker[5. Qui dure une heure, justement.] montre que les journalistes de la Toile n’ont rien à envier à leurs confrères plus exposés.
Nicolas Sarkozy ferait finalement un bien meilleur président de France Télévisions que de la République française. Il devrait y penser le matin en se rasant.
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