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Renaud Camus, pourfendeur du «grand dépenaillement» et défenseur de la diversité du monde

L'écrivain derrière le concept de «grand remplacement», contesté par toute une intelligentsia, publie son nouveau livre


Renaud Camus, pourfendeur du «grand dépenaillement» et défenseur de la diversité du monde
L'écrivain Renaud Camus. DR.

Dans son nouvel essai autoédité, La destruction des Européens d’Europe, Renaud Camus voit dans le jazz et le modèle de production fordiste le début de nos graves ennuis.


Il est un peu le Goldstein1 de notre époque. Un attentat islamophobe est commis en Nouvelle-Zélande, et tous les projecteurs se braquent sur le château de Plieux : Renaud Camus serait devenu pour quelques esprits hâtifs le Ben Laden de l’extrême droite mondiale. Il s’en défend pourtant : l’islam n’est au cœur que d’un vingtième de ses tweets. C’est également le cas dans son dernier livre, la Destruction des Européens d’Europe, sorti aux éditions dudit château.

Grand et Petit Remplacement, davocratie, in-nocence. Renaud Camus a développé tout un vocabulaire bien à lui. Heureusement, il y a un glossaire à la fin de son livre. Lu au pied de la lettre, un passage comme celui-ci : « la chancelière  Angela Merkel, figure emblématique par excellence de la ‘’seconde carrière d’Adolf Hitler’’ » pourrait faire tomber de sa chaise tout lecteur peu vigilant. L’ouvrage emprunte son titre au livre de Raul Hilberg, la Destruction des Juifs d’Europe. Il emprunte aussi des éléments de critique de la société de consommation qui pourraient le rapprocher de Jean Baudrillard et de Naomi Klein. Au terme d’une longue description du délitement particulier européen, il essaie de montrer comment nous en sommes arrivés à assister à la recomposition ethnique du Vieux Continent.

Dans Le Hussard Bleu, François Sanders se demande si la décadence française n’a pas commencé dès Philippe le Bel2. Renaud Camus la situe plutôt au début du XXème siècle. Pas tellement à cause de la saignée humaine de la Grande Guerre. L’Europe s’en est à peu près remise, y compris numériquement. Renaud Camus n’est pas un « paniqué de la démographie », « soyez féconds et multipliez-vous » n’est pas son crédo, il n’invite pas les Européens de souche à une résistance par les ventres, et même si l’on faisait abstraction des flots d’immigrés arrivés en Europe depuis un demi-siècle, les Blancs n’ont jamais été aussi nombreux qu’aujourd’hui sur leur continent. Faut-il en arriver au modèle extrême-oriental ? En Corée du Sud, on compte sept vieillards pour un enfant – ce qui n’empêche pas un certain nombre de réussites mais pose un certain nombre de problèmes.

Le fordisme et le jazz, les deux mamelles de la décomposition

Plus que le gaz moutarde et la grosse Bertha, deux grands malheurs, venus d’Amérique, se sont abattus sur l’Europe : le fordisme et le jazz. Renaud Camus voit dans l’adulation qu’ont eue les régimes soviétique et nazi pour le modèle de production fordiste la preuve de la nature totalitaire de ce dernier. On pourrait faire remarquer que même les dictateurs à moustache se posent des questions de productivité et recherchent ce qui est le plus efficace. L’interchangeabilité des ouvriers sur la ligne de production, illustrée par Charlie Chaplin dans les Temps modernes, préfigure le Grand Remplacement, puisque les grandes vagues migratoires ont été au début conçues pour remplir les usines et pour remplacer des Européens de souche, pas assez nombreux, ou trop chers. On pourrait objecter que les déferlements migratoires ont commencé bien avant la révolution des modes de production du début du XXème siècle, et que dès le XIXème siècle, des mouvements du Sud vers le Sud se mettaient en place : les coolies indiens sont ainsi venus remplacer les esclaves à Maurice ; même chose pour les Chinois aux Antilles.

Quant au jazz, mélange (selon l’auteur) de bruits métalliques évoquant les hauts-fourneaux et de cris de la savane, il constitue le plus parfait alliage d’ultra-modernité et de bestialité primaire – et serait, en cela, très « afro-américain ». Joséphine Baker se trémoussant avec des bananes autour de la taille amorçait le grand dépenaillement qui nous a conduit jusqu’au rock, au rap et même à Jul. C’est peut-être l’un des endroits où l’auteur fera le plus tiquer quelques lecteurs ; même le personnage raciste de Coluche en salopette se vantait d’avoir des disques de Sidney Bechet ! Dans son dernier livre (Pêcheur de perles, Gallimard), Alain Finkielkraut emprunte à Paul McCartney le sous-titre de son dernier chapitre ‘I believe in yesterday’. Tout ce qui est coincé chronologiquement entre Joséphine Baker et Jul n’est pas forcément à jeter dans la géhenne.

Lady Di, Loana, mêmes habitus

Avec le jazz et l’abandon de la musique (que les petits-bourgeois appellent la grande musique), le XXème siècle aurait permis un grand relâchement de la manière d’être, que Renaud Camus qualifie joliment : « la syntaxe d’être ». Parfois, l’ouvrage flirte avec le manuel de savoir-vivre : on y (ré)apprend à saluer les dames, en baissant son chapeau, etc. Le long processus de décontraction des mœurs est allé de pair avec le triomphe de la petite-bourgeoise, qui n’a plus grand-chose à voir avec les classes dominantes de jadis, anciennement cultivées : la petite-bourgeoisie, quasi-hégémonique désormais, c’est le Petit-Remplacement, sans lequel le Grand Remplacement n’aurait pas été possible. Tout s’est égalisé, hormis les conditions économiques et sociales, et, selon l’auteur, il n’y aurait plus de différence entre Lady Di et Loana (c’est méchant, c’est un peu vache, et on aimerait espérer que ce n’est pas tout à fait vrai).

Et le Grand Remplacement dans tout ça ? Un très beau passage illustre l’inquiétude de l’auteur, d’abord défenseur de la diversité du monde :
« Toute augmentation de la diversité au sein d’un peuple ou d’une nation réduit la diversité du monde, d’abord parce qu’elle fait disparaître ce peuple ou cette nation comme composantes du divers universel, d’autre part parce que toutes les diversités, étant formés d’un nombre limité des mêmes composantes, tendent à être les mêmes ».
C’est un peu la formule de la purée de marron évoquée par de Gaulle devant Alain Peyrefitte3, laquelle tend à ressembler, à chaque marron ajoutée, au gloubi-boulga cher à Casimir.

Autre passage mordant :
« L’Europe a fait entrer l’Afrique dans le monde moderne. Je suis bien placé pour juger que ce n’est pas nécessairement un très précieux présent. D’ailleurs, malgré quelques réussites partielles, l’Afrique semble avoir du mal à s’y maintenir. Et à peine une colonisation s’en retire-t-elle qu’elle semble en attirer d’autres, pas nécessairement plus aimables. Pendant ce temps, les structures et les bâtiments hérités de la précédente tombent en ruine, faute d’entretien. L’Afrique, c’était mieux du temps des blancs, disent aujourd’hui certains vieillards. L’Europe aussi indubitablement ».

Problèmes graves, solutions simples

Il serait possible de faire une analyse plus fine des Grands Remplacements à l’œuvre. L’arrivée de populations hindoues au Royaume-Uni ou vietnamiennes en France depuis un demi-siècle a eu des effets nettement moins catastrophiques que les contacts entre monde européen et monde musulman. Dans un passage, Renaud Camus écrit : « Les tyrans sont avides de peuples ingouvernables, c’est pourquoi les mahométans sont tant demandés de par le monde : ils rendent la tyrannie inévitable ».

Ce qui coince, c’est le hiatus entre des Occidentaux, habitués à un contrôle de soi permis par la civilisation de leurs mœurs enclenché il y a cinq siècles – au point que les États n’ont cessé d’augmenter leur permissivité – et des populations venues d’un monde répressif, perdues dans nos espaces quasi-anomiques. Va-t-il falloir demain des régimes à la Saddam Hussein pour rendre le vivre-ensemble à peu près supportable dans nos contrées ? Ce qui menace l’Europe, ce n’est pas tant le grand dépenaillement que la charia et la schlague musulmanes, la burka, les interdits alimentaires et sexuels.

Coincés entre le « plus jamais ça » et la honte de 1939-1945, les Européens d’Europe n’osent reprendre le contrôle de leur destin, contrairement à leurs cousins d’Australie, beaucoup plus jaloux de leur mode de vie – et donc de leurs frontières. A lire Renaud Camus et sa description de longs processus vieux d’un siècle, le risque est de basculer dans la désespérance. Sarah Knafo, dans son interview accordée à Causeur ce mois, estimait que face aux problèmes graves que traverse la France, il y a des solutions simples. Faisons simples, soyons Australiens !

380 pages.

La Destruction des Européens d'Europe

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  1. Un méchant que tout le monde déteste dans 1984 de George Orwell NDLR ↩︎
  2. Le Hussard bleu de Roger Nimier, Gallimard, 1950 ↩︎
  3. « Chaque peuple est différent des autres, incomparable, inaltérable, irréductible. Si vous voulez que des nations s’unissent, ne cherchez pas à les intégrer comme on intègre des marrons dans une purée de marrons » ↩︎




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Professeur démissionnaire de l'Education nationale

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