La presse d’État fait honte. Elle est l’héritière de La Pravda qui s’était mise au service du parti communiste. Sous couvert de pureté morale, ses journalistes immaculés s’inscrivent dans cet assujettissement. Ils sont, dans leur docilité, des désinformateurs en puissance.
Ne prenez pas la main qu’ils vous tendent : leur prétention à l’honnêteté est suspecte. Depuis le 16 novembre, des journalistes de la radio-télévision d’État se proposent de choisir pour vous les bonnes informations et d’être des guides désintéressés. Vous avez pu apercevoir leur message publicitaire : 14 clercs médiatiques, vêtus d’un T-shirt blanc, rassemblés sous le slogan : « Info ou intox ? On vous aide à faire le tri ». Signé : France TV. Le groupe France Télévisions précise, pour s’en flatter, qu’il « s’implique au côté du ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse et se mobilise dans un mouvement de lutte contre la désinformation ». George Orwell avait mis en scène Big Brother et son service du « contrôle de la réalité ». France TV se propose pareillement d’aider le pouvoir à imposer son narratif en traquant les fakes news, les propos haineux, les complotistes : des accusations habituellement lancées par la Macronie contre ceux qui doutent de la parole officielle.
Ces médias d’État (France 2, France Inter, France Culture, France Info, etc.) font honte. Ils sont les héritiers de La Pravda, qui s’était mise au service du parti communiste. Sous couvert de pureté morale, ces journalistes immaculés s’inscrivent dans cet assujettissement. Ils sont, dans leur docilité, des désinformateurs en puissance. Ils s’autoproclament gardiens de la vérité autorisée, mais ont renoncé à l’esprit critique. Ce clergé propose un journalisme de propagande, construit sur l’infantilisation du citoyen, la rééducation de la masse, la dénonciation du déviant. Dans La Mort est mon métier, Robert Merle fait dire à son personnage devenu gardien de camp nazi : « Notre devoir, notre seul devoir était d’obéir. » C’est vers ce monde enténébré que tend l’audiovisuel public quand il se met servilement du côté du manche et de la brosse à reluire. Kant avait institué le « Sapere aude » (« Ose penser par toi-même ») d’Horace comme symbole des Lumières. Dans son enrégimentement, la chute de France TV est vertigineuse.
A lire aussi: De Laure Adler à Claude Askolovitch, en passant par Paul B. Preciado : entre-soi wokisto-journalistique et philosophie trans
Ces anges purificateurs voient les médias comme des outils de redressement. Ils méprisent la liberté d’expression, redoutent le pluralisme, triturent les faits. En plus de quarante ans de carrière, je n’ai jamais été convié dans l’univers aseptisé de France Inter. Lorsque Elon Musk a fait connaître début novembre son intention de racheter Twitter, cette radio a choisi de traiter l’information en soulignant qu’elle rendait « la fachosphère » et « l’extrême droite euphoriques ». Lorsque le député RN Grégoire de Fournas a été sanctionné pour avoir dit de l’Ocean Viking, ce navire humanitaire qui a débarqué ses 234 passagers désormais dans la nature, « qu’il retourne en Afrique ! », le même média public a expliqué que l’élu avait été « exclu 15 jours après ses propos à teneur raciste ». En réalité, Fournas a été sanctionné pour « tumulte », rien dans ses propos ne relevant du racisme. Le service public n’a pas ébruité le blanchiment en première instance du professeur Christian Perronne, poursuivi par le Conseil de l’ordre des médecins pour avoir critiqué la politique sanitaire du gouvernement. Et quand, le 10 août, France 2 a voulu dénoncer un bombardement attribué à la Russie sur la centrale nucléaire de Zaporijia, la chaîne a fait passer une cheminée bancale pour un missile planté sur un toit…
La pensée récurée, le contrôle social et l’embrigadement des esprits sont des poisons pour la démocratie. Quand le pluralisme des opinions devient suspect, y compris au cœur d’un journalisme inféodé au pouvoir, la dérive totalitaire se profile. Les blanchisseurs d’infos de France Télévisions sont des idéologues. Ils sont semblables aux maltraitants de la liberté d’expression. Ceux-ci rêvent d’étouffer les réseaux sociaux et de faire taire les dissidents. Il va de soi que des modérations s’imposent pour interdire les appels au meurtre, à la violence, au racisme, à l’antisémitisme, à la pédophilie, etc. Musk affole la basse-cour pour s’être présenté en « absolutiste de la liberté d’expression » et pour avoir rétabli le compte Twitter de Donald Trump. Mais Musk n’a jamais prétendu laisser Twitter ouvert au pire. Laetitia Avia, non contente d’avoir signé sa loi liberticide, assure, avec Rachel-Flore Pardo (Le Monde, 31 octobre) : « Bien sûr qu’il faut davantage réguler les géants de la communication publique que sont Facebook, Twitter, Google, TikTok et Instagram, mais on ne peut plus laisser Telegram [NDLR : messagerie privée] hors des radars ! » Cette frénésie de surveillance des pensées, y compris par l’Arcom (ex-CSA), révèle un pouvoir en sursis.
A lire aussi: Aux arbres citoyens : massacre à la tronçonneuse en direct sur le service public
Tous ces gens-là doivent être nommés pour ce qu’ils sont : des dangers pour les libertés individuelles et les opinions intimes. Il aura fallu attendre que Jean-François Delfraissy quitte sa présidence du conseil scientifique, fin juillet 2022, pour qu’il reconnaisse, outre la médiocrité des vaccins, l’autoritarisme de l’État qui a négligé l’avis des citoyens et fait passer « la santé avant l’humanité ». Le service public de l’information n’aura jamais eu un mot pour alerter contre les dérives autoritaristes de l’hygiénisme d’État. Il n’aura jamais eu un mot pour mettre en garde, sinon après les Carabiniers, contre les assauts sectaires des nouvelles religions scientistes, écologistes, wokistes. Il aura radoté que l’islam est une religion de paix et de tolérance, que l’immigration est une chance, que le populisme est le danger. Des journalistes se sont dernièrement donné une « charte » pour être « à la hauteur de l’urgence climatique » et « pratiquer un journalisme bas carbone », en excluant d’entendre ceux qui doutent de l’entière responsabilité humaine dans le réchauffement.
Mais qui est encore dupe ? La lutte contre les « fake news », les « propos haineux » ou « complotistes » sont d’abord des prétextes pour nier des réalités dérangeantes. Il ne revient pas à un juge de dire si une information est bonne à dire, aimable à recevoir, admissible par le système. Il ne revient pas à un « fact-checkeur » autoproclamé de décider qui doit être dénoncé ou réduit au silence. Il est urgent de libérer France Télévisions de ses censeurs.