Le choix du nouveau Premier ministre, probablement Gabriel Attal, indiffère une majorité de citoyens. Le vrai Premier ministre restera Emmanuel Macron, lequel demeure très impopulaire.
Le peuple ? Qu’il continue à la boucler ! La macronie commence mal l’année 2024. Alors que les Français n’en peuvent plus d’être écartés des décisions relatives à leur destin, Emmanuel Macron va proroger son confortable statu quo. Il lui suffira, croit-il, de se boucher les oreilles. C’est un président-squatter qui entend en effet demeurer à l’Élysée jusqu’au terme de son mandat. Il compte pour cela exploiter jusqu’à la corde une Vème République épuisée. Elle a déjà été vidée de ses subtils équilibres après les effacements conjugués du parlement et du Premier ministre.
Macron s’installe plus que jamais comme monarque isolé et immobile. Celui qui se targue d’apprécier les personnalités transgressives, allant jusqu’à soutenir courageusement Gérard Depardieu, se comporte comme un petit bourgeois frileux s’agissant de ses intérêts. Le « big-bang » démocratique annoncé par son entourage se limitera aux habituels effets de communication. Il se pourrait même qu’Elisabeth Borne, nommée le 16 mai 2022 et donnée partante cette semaine, puisse bénéficier d’un sursis à son poste de premier ministre[1]. Il est vrai qu’elle ou un autre (Sébastien Lecornu et Julien Denormandie sont les plus couramment cités, Gabriel Attal étant néanmoins donné favori lundi soir) sont des choix qui indiffère la très grande majorité des Français. Tout le monde a bien compris que le vrai Premier ministre restera Macron, qui a aussi ses entrées à la présidence de l’Assemblée nationale. C’est bien cette anomalie démocratique qui reste le carburant principal de l’irritation des citoyens rejetés par la caste.
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Cette peur du peuple est suicidaire pour la macronie. Dans son obsession à lutter contre Marine le Pen, portée par les sondages, le chef de l’Etat prend le risque d’alimenter les frustrations en refusant mordicus d’en appeler à l’oxygène des urnes, soit pour des législatives anticipées, soit pour des référendums. « Le peuple n’a pas toujours raison », expliquait dimanche soir l’ancien soixante-huitard Daniel Cohn-Bendit, sur LCI. Ce raisonnement est commun à tout un monde prolophobe, privilégié et méprisant, qui n’est pas loin de regretter le suffrage censitaire. L’argument une fois de plus resservi d’Hitler qui aurait été élu démocratiquement par les Allemands n’est d’ailleurs pas exact : c’est le président Von Hindenburg, élu face à Hitler en 1932 (49% contre 30%) qui l’a nommé chancelier l’année suivante, avec l’appui des élites bourgeoises et financières de l’époque.
Cette même haine des « élites » pour l’opinion populaire est en train, en réaction, de pousser Donald Trump dans les sondages, au détriment de Joe Biden.
La question qui se pose désormais est de savoir si les Français, marginalisés par un système politique à bout de souffle, vont patienter encore longtemps. Mon petit doigt me dit que non.
[1] En définitive, Elisabeth Borne a été démissionnée par Emmanuel Macron lundi après-midi.