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France: les bons sentiments ne suffiront pas à intégrer les réfugiés

L'intégration est un enjeu crucial pour notre avenir


France: les bons sentiments ne suffiront pas à intégrer les réfugiés
Un agent de l'OFII renseigne des migrants à Calais, en octobre 2016 © Isabelle SERRO/SIPA Numéro de reportage: 00778108_000016

 


L’intégration du flux de réfugiés est un enjeu crucial pour notre avenir. Les apprentissages de notre littérature et de l’histoire de France (le « roman national ») devraient être privilégiés.


« Notre pays sera confronté dans les années à venir à des mouvements sans doute massifs de population […] parce que des tensions militaires peuvent exister », a déclaré Mme Sibeth N’Diaye.

Les Français vont pouvoir apprendre plein de nouvelles langues, n’est-ce pas formidable? Trêve de sarcasme: qu’envisage concrètement la porte-parole du gouvernement français pour intégrer les réfugiés de Syrie ou d’Afghanistan qui sont déjà chez nous? Ils auraient pourtant de quoi susciter sa compassion: ils ont parfois marché jusqu’à plus soif, connu la malveillance des passeurs ou la misère des camions frigo.

Ni des anges ni des diables

Une débauche de galères ne crée pas nécessairement des anges. Il existe des ordures parmi eux: la sinistre attaque au couteau à Villeurbanne fut l’œuvre d’un Afghan placé sous la « protection subsidiaire » de la France depuis 2018. Néanmoins, on peut raisonnablement penser que la grande majorité n’a aucun intérêt à voir notre pays s’islamiser: les Syriens ont connu les caïds des milices djihadistes, les Afghans ont connu la barbarie des Talibans et le souffle des attentats kamikazes depuis des dizaines d’années. Tout dépendra donc de notre volonté de les intégrer.

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Craignant les foudres de l’Union Européenne, l’Etat français accorde des cartes de séjours aux demandeurs d’asile. Selon le gouvernement, 33 000 en auraient été accordés à ce titre sur 255 956 au total en 2018. C’est donc bien moins que le nombre de cartes de séjour accordées au titre du regroupement familial, qui aurait été de 90 000 en 2018 selon le journal Le Monde. Aux dernières nouvelles, deux Français sur trois ne seraient pas hostiles à l’accueil des réfugiés. Pour la minorité de résistants hostile aux réfugiés, notre Etat assure que ces exilés vont exercer des jobs que nous Français haïssons.

Où donc les entasse-ton? En île de France principalement, dans des cités de Saint-Denis, Sevran, Aubervilliers ou autres paysages de cartes postales où ils sont conviés à goûter aux délices du vivre ensemble. Chouette!

Ni victimes ni coupables

On peut supposer que la majorité d’entre-eux ne repartira pas dans leurs pays. D’une part, parce que ces pays sont encore guerre, d’autre part, parce qu’ils prennent leurs habitudes chez nous et qu’ils savent s’y débrouiller. Ils prendront donc souche en France et y auront des enfants. Voilà pourquoi il est crucial de tout mettre en œuvre pour leur intégration. Or, qu’est-il demandé en contrepartie de la délivrance d’une carte de séjour de dix ans?  Une formation de l’OFII validée par l’obtention du Diplôme initial de langue française (DILF), requérant de savoir se débrouiller chez le médecin dans la langue de Pasteur et de connaître les « symboles de la République » française.

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Qu’est-il demandé pour une éventuelle naturalisation? Un niveau de français B1 (niveau intermédiaire) permettant d’échanger quelques idées sans vraiment rentrer dans le fond. Quid des exigences de français écrit pour cette même naturalisation? Aucune! La proposition du premier ministre de relever le niveau est donc salutaire. Pour autant, cela doit-il être fait en culpabilisant ces nouveaux immigrés? Certainement pas, car ce serait un trop beau cadeau fait aux professionnels de la victimisation, toujours à l’affût de nouvelles recrues à embrigader face au désigné bourreau occidental.

Adhérer au roman national

En France plus qu’ailleurs peut-être, le niveau de familiarité envers l’écriture reste un marqueur social. Grâce à une histoire littéraire d’une rare richesse, la France brille encore dans de lointaines contrées. Ainsi, une exilée iranienne me soufflait il y a peu « aimer beaucoup parler avec les Français car ils sont très cultivés ». Ainsi cette même jeune femme – cheveux baignés par le vent dans la terre de Rimbaud – confessait connaître Simone de Beauvoir en tant que figure du féminisme (le vrai, pas celui de « balance ton porc »).

Au-delà de cette anecdote empreinte de romantisme, savoir écrire convenablement français facilite encore grandement l’adoption de notre mode de vie, condition sine qua non pour s’épanouir dans notre société. Ceux qui ne savent pas écrire quelques phrases ont de fortes chances de vivoter dans notre confort matériel avec leurs habitudes de vie. Pour espérer s’intégrer réellement dans notre pays, il faut savoir qui furent Montesquieu, Jean Jaurès ou Victor Hugo. Il faut savoir que Gambetta n’est pas qu’une station de métro. Il faut comprendre ce qu’a été notre roman national.

Gare aux sirènes du regroupement familial

Cela ne se fait guère par la fréquentation de la gare du Nord, des Auchan, des Western Union ou des mosquées. Cela implique de s’imprégner de notre histoire nationale et de se frotter à nos grands écrivains. Les réfugiés qui choisissent la protection de la France ne nous choisissent pas uniquement pour les Droits de l’homme et la carte vitale. Ils le font car ils y ont des amis et car la France a encore une certaine aura à l’international.

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Ils doivent donc absolument être conviés à vivre comme nous. Cela est d’autant plus crucial qu’ils sont susceptibles de succomber aux sirènes du regroupement familial, ce redoutable frein a l’intégration. Par ailleurs, nombre de Syriens savent à quel point les frictions communautaires peuvent être fatales à une nation. Nombre d’Afghans savent que seul un Etat fort préserve de la guerre civile. Et qu’est-ce que le nôtre leur propose-t-il? Une société atomisée, communautarisée, guidée par la repentance postcoloniale où le mot « patrie » est diabolisé.

Si on souhaitait passer pour des fous à leurs yeux, on ne s’y prendrait pas mieux.

L’intégration sera longue

Contrairement à nos « citoyens du monde », ces nouveaux venus ne sont pas du tout réfractaires aux paroles de La Marseillaise. Au contraire, ils sont très demandeurs de cette dernière et sont frustrés de ne pas en manier toutes les subtilités. Sans doute savent-ils que seule une nation sûre d’elle-même est capable de les intégrer. Sans doute perçoivent-ils qu’il est essentiel de connaître l’histoire d’un pays pour comprendre comment il fonctionne. Ces fameux réfugiés ne sont pas des pauvres hères. Beaucoup ne demandent qu’à connaître notre histoire pour comprendre nos us et coutumes.

Nous sommes actuellement loin du compte: essentialisés par les belles âmes, les réfugiés – confondus avec le reste des « migrants » – sont utilisés au service d’une propagande de rédemption qui souhaite l’abolition des frontières. Chez les libéraux, ils sont envisagés comme une pâte à modeler bon marché au service de la « startup nation ». Ces deux visions s’allient à merveille avec le communautarisme. L’atomisation de notre société nous menant droit au risque de sa désagrégation, l’intégration des réfugiés parmi nous est un enjeu crucial pour notre avenir. Reste à souhaiter que ceux qui nous gouvernent prennent vraiment conscience des réalités. Il n’est pas interdit d’espérer.

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Enseignant, auteur du roman "Grossophobie" (Éditions Ovadia, 2022).

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