Il y a eu Roland à Roncevaux, d’Artagnan à La Rochelle, Zola à L’Aurore, de Gaulle à Londres, Sartre à La Cause du peuple. Nous avons aujourd’hui l’énarque à calculette. On a les héros que l’on mérite. L’ENA n’est d’ailleurs pas une obligation. Un DESS de marketing suffit – voyez Luc Chatel. Au pire, Sciences-Po fera l’affaire.
Najat Vallaud-Belkacem supprime les classes bilingues, fait disparaître le latin et le grec, rabiote çà et là sur le français et les maths. En regroupant les profs par deux dans des « Enseignements pratiques interdisciplinaires » (EPI), elle supprime des milliers de postes sans en créer de nouveaux, faute de candidats. Carton plein.[access capability= »lire_inedits »]
Luc Chatel, qui avait étêté le lycée, trouve que la réforme de son successeur, qui écrème le collège, va dans le bon sens. Grâce à la conjonction, à quatre ans d’intervalle, de ces brillantes intelligences, l’élitisme républicain a vécu. Le « socle commun de compétences », cette machine à décérébrer jadis fourguée à François Fillon, a trouvé le bon véhicule.
De « disciplines », il ne reste que quelques traces. Le reste est englouti dans les « objets d’étude » au cœur du dispositif des EPI. Un ingénieux reportage au collège Clisthène, à Bordeaux, où se pratique déjà cette pédagogie venue du froid, a montré des élèves sommés par un binôme prof de langue/prof d’histoire-géo de rédiger en espagnol un « tract » à destination des horticulteurs kenyans. Bonne idée.
Pendant ce temps, le latin, le grec et les classes bi-langues européennes passent à la trappe, avec tout ce qui fleure un peu l’élite et la transmission réelle des savoirs. Au total, cinq à six heures de cours en moins chaque année. Le niveau va monter.
Le Conseil supérieur des programmes, composé de politiques niais ou impuissants, de chercheurs en « sciences de l’éducation », d’enfants de Bourdieu et de constructivistes (qui préconisent que l’enfant construise lui-même ses propres savoirs), a demandé l’avis de personnalités toutes choisies dans le camp pédagogiste. Il réalise ce qui avait été projeté en 2007 pour Ségolène présidente : le retour des idéologues, particulièrement en histoire. Les nouveaux programmes éradiquent le « roman national », et imposent un gloubi-boulga de repentance et d’ouverture vers l’Autre et l’ailleurs. Moralité, on laisse l’histoire de France à Lorànt Deutsch, ce qui est certainement dommage. Et on booste le privé, ce qui ne l’est pas moins.[/access]
*Photo : MATHIEU PATTIER/SIPA. 00707887_000004.
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