Une étude IFOP pour un marchand de godemichés, publiée ce jour, mesure une baisse historique de la fréquence des rapports sexuels des Français. La proportion de nos concitoyens ayant eu un rapport au cours des 12 derniers mois n’a jamais été aussi faible en cinquante ans. Les activités numériques ne comptent pas pour rien dans cette apathie sexuelle. Et cette montée de l’inactivité sexuelle affecte tout particulièrement la jeunesse.
Lors de la grande conférence de presse qu’il tint au palais l’Élysée, Emmanuel Macron s’est alarmé du vieillissement de la France, se gardant bien, toutefois, de préciser que c’est chez les autochtones qu’il y a le moins de naissances. (Selon les chiffres de l’Observatoire de l’immigration et de la démographie, la femme française n’a qu’1,68 enfant tandis que l’immigrée algérienne, elle, en met au monde à 3,69. En 2022, un tiers des bébés avait au moins un parent né hors de l’Union européenne. Quant aux naissances issues de deux parents nés à l’étranger, elles ont augmenté de 72% entre 2002 et 2022).
Le plan cul d’Emmanuel Macron
Notre belligérant de la République a ensuite souligné la nécessité d’un « réarmement démographique » pour annoncer, martial, le lancement prochain « d’un grand plan » destiné à lutter « contre le fléau de l’infertilité ». En filant avec pompe la métaphore guerrière, Macron n’a pas manqué de s’attirer les foudres des féministes et de la gauche. Déjà, le soutien apporté à Depardieu avait mécontenté. Qu’Emmanuel Macron prétende maintenant mobiliser les utérus des Françaises pour repeupler l’Hexagone, ça n’était décemment plus possible. On a alors vu les défenderesses des droits des utérus à disposer d’eux-mêmes, déjà sur le sentier de la guerre, se lever comme un seul homme pour dénoncer le projet aux relents pétainistes : faire des enfants ne saurait devenir un devoir patriotique ; les femmes ne serviraient pas l’accroissement de la population française. Que la rhétorique présidentielle amuse ou agace, la question de la baisse du taux de natalité des Françaises n’en demeure pas moins préoccupante et nombreuses sont les explications plus ou moins sociologiques avancées pour l’expliquer : éco-anxiété, peur de l’avenir, crainte devant les changements climatiques, incertitudes économiques ou violences géopolitiques.
Et si on prenait les choses autrement ? S’il y avait tout simplement moins de naissances dans l’Hexagone parce que l’activité sexuelle des Français est en berne ? L’Ifop a mené une enquête pour l’entreprise de sex-toys Lelo. Intitulée « Sex recession », cette étude1 révèle que la France, comme d’autres pays européens (États-Unis ou Grande-Bretagne), est entrée en « récession sexuelle ». C’est officiel: la pratique de la bête à deux dos a enregistré un recul sans précédent ; les Français hétérosexuels font moins l’amour. On apprend ainsi que la proportion des Français ayant eu un rapport sexuel au cours des 12 derniers mois n’a jamais été aussi faible en cinquante ans et cette montée de l’inactivité sexuelle affecte tout particulièrement la jeunesse. En effet, 28% des jeunes de 18 à 24 ans, initiés sexuellement, admettent ne pas avoir eu de rapport en un an. C’est cinq fois plus qu’en 2009. De plus, les célibataires n’ont pas le monopole de l’abstinence sexuelle, les résultats montrent qu’une personne sur quatre, actuellement en couple, n’a pas (ou plus) d’intimité physique avec son conjoint. La sexualité semblerait avoir cessé d’être l’une des composantes essentielles d’une vie réussie ou, à tout le moins, celle d’une vie de couple harmonieuse. On se revendique désormais assez ouvertement abstinent par choix voire asexuel. Ce désinvestissement, du reste, ne se cantonne pas au seul sexe mais s’étend à d’autres aspects de la vie des Français : travail, civisme, associatif, politique… L’étude précise également, on l’aurait parié, que l’activité sexuelle est largement concurrencée par le numérique (TV, réseaux sociaux, jeux vidéo…). Ainsi, lorsqu’on interroge les jeunes vivant en couple sous le même toit, 50% des hommes et 42% des femmes reconnaissent avoir déjà évité un rapport pour regarder une série ou un film.
Finie la fête du slip
L’absence de rapports sexuels, apprend-t-on enfin, serait mieux vécue par les femmes qu’elle ne l’est par les hommes et il semblerait qu’elles s’affranchissent plus facilement qu’autrefois du « devoir conjugal », quand celui-ci leur pèse.
L’étude précise ainsi qu’on s’achemine vers la « déconstruction du devoir conjugal », dans un contexte marqué par la révolution du rapport au consentement.
Les chiffres indiquent que les Françaises acceptent beaucoup moins de se forcer à faire l’amour qu’il y a quarante ans. Parmi les femmes âgées de 18 à 49 ans, elles ne sont plus que 52% à s’y résoudre contre 76% en 1981. En 2024, Brassens, vieux mâle blanc ne pourrait donc plus chanter :
Quatre-vingt-quinze fois sur cent
La femme s’emmerde en baisant
Qu’elle le taise ou le confesse
C’est pas tous les jours qu’on lui déride les fesses
Les pauvres bougres convaincus
Du contraire sont des cocus
À l’heure de l’œuvre de chair
Elle est souvent triste, peuchère !
S’il n’entend le cœur qui bat
Le corps non plus ne bronche pas
Les « encore », les « c’est bon », les « continue »
Qu’elle crie pour simuler qu’elle monte aux nues
C’est pure charité, les soupirs des anges ne sont
En général que de pieux mensonges
C’est à seule fin que son partenaire
Se croit un amant extraordinaire
Que le coq imbécile et prétentieux perché dessus
Ne soit pas déçu
Quoi qu’il en soit, rien de nouveau sous le soleil : ce sont toujours les femmes qui font la nique aux hommes.
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